Le Ross rifle

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Le Ross rifle Empty Le Ross rifle

Message  seschomaru Sam 29 Jan 2022, 17:52

Le Ross rifle Dsc02126

Bonjour,
J’aimerais vous parler de la famille des carabines Ross et de l’histoire rocambolesque qui les entoure. Fruit de l’esprit d’un créateur haut en couleur, facilité par les copinages politique, le Ross jouie d’une des pires réputations attribuées à une arme de service. Il s’agit cependant d’un système à l’histoire fort intéressante pleine de bonne volonté mal canalisée qui nous laisse aujourd’hui peu d’exemplaires d’une arme dont l’excellence sur le pas de tir n’aura eu d’égal que son inadéquation sur les théâtres de guerre.

Cet article se veut être un référentiel de connaissance atour du Ross et ses variantes. Ainsi je m’appuierai largement sur les travaux d’auteurs et vidéastes, américains pour la plupart. Cet article est étoffé par la présentation de mes deux spécimens : un MkII 3* et un MkIII monté avec optique Warner&Swasey 1913. A noter que cet article va de pair avec une vidéo qui sera diffusée plus tard cette année sur la chaîne Youtube LeFeuAuxPoudres dont l’objet sera majoritairement le modèle MkIII avec, chose assez rare pour cette arme, pas mal de tir !

Si l’article est aussi détaillé que possible dans la retranscription des connaissances disponibles, je ne suis malheureusement pas en possession de l’unique et précieuse documentation traitant du sujet : The Ross Rifle Story de Roger F Phillips. Ce gros pavé de presque 500 pages contient certaines informations précises et inédites sur les quantités de production et les prototypes qui seront absentes de cet article. J’envisage de le compléter si jamais je parviens à trouver un exemplaire de cet ouvrage.
 
---------------------------------------------Sommaire----------------------------------------------------------------
 
> Le Canada fin du 19ème siècle
> Charles Ross et Sam Hughes
> La production civile Ross et ses variantes
   > Modèle 1897
   > Modèle 1900
   > Modèle 1903
   > Modèle 1905
   > Modèle 1907
   > Le calibre 280 Ross
   > MkII 1905/1910 Target Rifle
   > Modèle 1910
> Adoption et évolutions du Ross
   > Ross MkI
   > Marquages et identifications sur Ross militaires
   > Ross MkI *
   > Ross MkII
   > Analyse visuelle des différences entre boitier et culasse du MkI et du MkII 
   > Ross MkII *
   > Ross MkII avec hausse Mk3
   > Ross MkII 2*
   > Le Ross MkII 2* et le tir de compétition
   > Ross MkII 3*
   > Ross MkII 4*
   > Ross MkII 5*
   > Baïonnette Ross MkI + MkII 
   > Ross MkIII
   > Ross MkIIIB
   > Baïonnette Ross MkIII
   > Ross M10 Military Match Target Rifle
   > Recap modèles et quantités produites
> Autres “déclinaisons” notables
   > Ross 1912 de Cadet
   > Le Huot Automatic Rifle
> Le MkIII de tireur d’élite
   > Francis “Peggy” Pegahmagabow
   > L’optique périscopique Warner& Swasey
   > La Warner&Swasey 1913 sur Ross MkIII
> Le retrait du MkIII et la fin de la firme Ross
> Le Ross hors du Canada
> MTs-17 le "Ross russe"
> Armes présentées
> Album photos d’époque
> Médias d'intérêts sur le Ross et ses variantes


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Message  seschomaru Sam 29 Jan 2022, 17:52

----------------------------- Le Canada fin du 19ème siècle ---------------------------------
 
Considéré comme un conflit mineur à l’échelle mondiale, la guerre des Boers a de nombreuses répercussions dans tout l’Empire britannique et ses colonies. Pour faire très simple, ce conflit oppose les armées coloniales britanniques aux colons hollandais aussi appelés Boers et Afrikaners. Les Boers refusent les droits à la citoyenneté aux immigrants anglais ce qui dégénère quand la couronne anglaise décide de prendre la défense de ses sujets. Et puis les Boers contrôlent la région du Transvaal abritant les plus grandes mines d’or du monde ce qui est plutôt motivant également.
 
Le Canada est alors une colonie britannique et le restera jusqu’à l’acquisition de son indépendance en 1931 à l'application du Statute of Westminster qui octroie l'autonomie à tout les Dominion britanniques (Canada, Australie, Nouvelle-Zélande, Afrique du Sud et Irelande). En tant que colonie, le Canada est appelé à participer à la guerre. Malgré une résistance initiale de la communauté francophone qui voit cet appel à la guerre comme une manipulation de trop de la part de la couronne anglaise, le gouvernement cède et envoi en octobre 1899 un premier bataillon de 1000 hommes en soutient aux anglais. 6000 volontaires viendront renforcer ce nombre dans les mois suivants portant l’effort canadien à 7000 soldats. Il s’agit du premier conflit de cette jeune nation sur un terrain étranger.
 
Ce conflit apporte son lot de nouveautés : positions ennemies en tranchées durant les premières phases du conflit, tactiques de guérilla durant la suite, affrontements à longue distance contre un ennemi équipé d’un armement de pointe (Mauser pour la majorité, quelques Steyr M95). Le précédent conflit auquel participent les Anglais les oppose aux Zulus qui leur sont vastement inférieur en termes d’équipement. Les Boers connaissent mieux le terrain, sont bien entrainés et joue à équipement égal. Si l’empire anglais sort vainqueur, les pertes sont de 7000 Boers contre 22000 soldats impériaux dont 267 canadiens qui se distinguerons par leur courage.
 
Le Canada s’engage dans la guerre équipée du Lee-Enfield Mk1 fraichement adopté en 1896. Celui-ci est une évolution du Lee-Metford adopté par les Anglais en 1889. L’évolution consiste simplement en un remplacement du canon. Le Lee-Metford utilise un canon à âme Metford pensé pour réduire l’encrassement provoqué par la poudre noire des premières versions du 303 British. Le Lee-Enfield profite des performances de la 303 British à la cordite et dispose d’un canon à âme conventionnelle. Le Magazine Lee-Enfield évoluera une dernière fois en 1907 en Mk1* avec l’ajout d’un portique pour lame chargeur. Le MLE Mk1* est conservé en service alors même que le Short Magazine Lee-Enfield Mk1 commence à arriver dans les mains des troupes en 1903. Le SMLE servira tous les pays de l’empire britannique durant la première guerre mondiale. Tous sauf pour le Canada comme on va le voir.
 
Pour la Canada, ce conflit leur laissera un goût amer de la structure hiérarchique et de la rigidité militaire anglaise. Il est suggéré par les sources historiques canadiennes que ce conflit sera la première pierre de leur indépendance quelques 30 ans plus tard.
 
Pour recentrer le propos sur le Ross, à l’issu de la guerre des Boers et des pertes d’un nombre important de leurs Lee-Enfield, le gouvernement canadien se tourne naturellement vers les Anglais pour refaire leurs stocks. La réponse des Anglais sera qu’ils n’en ont pas de disponible à moyen terme, BSA et Enfield étant déjà occupé avec les besoins de la Grande-Bretagne. Cette réponse pousse le Canada à étudier la possibilité de produire le Lee-Enfield à domicile. L’Angleterre se montrera également non coopérative face à cette demande. Plutôt agacé par cette réponse laconique et peu empathique, le Canada cherchera des solutions alternatives. 
 
Ce qui nous amène aux deux personnages récurrents de l’histoire du Ross.


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Message  seschomaru Sam 29 Jan 2022, 18:03

----------------------------- Charles Ross et Samuel Hughes --------------------------------

Le Ross rifle Crsh10
   A gauche : Sir Charles Ross - A droite : Sir Samuel Hughes

La création et l’histoire des armes est bien souvent l’œuvre d’un nombre important de personnage plus généralement associé à une entreprise plutôt qu’à une arme en particulier. L’étude de personnages particuliers est donc généralement un propos accessoire à l’étude d’un système d’arme. Cependant, dans le cas du Ross toute son histoire est intrinsèquement liée à ces deux individus aux caractères hauts en couleur. Nous verrons par la suite que tous les évènements qui ont entouré la courte carrière du Ross sont les conséquences directes de l’excentricité des Sir Ross et Sir Hughes.
 
Le Ross rifle 20190523
 
Charles Ross 04/04/1872 – 29/06/1942 :

Né au château de Balnagown dans les Highlands écossaises, Charles Henry Augustus Frederick Lockhart Ross est le fils d’une des familles nobles les plus fortunées de l’empire britannique. Fin 19ème, la famille Ross est le deuxième plus gros propriétaire terrien de Grande-Bretagne.

Charles est souvent décrit comme un jet-setter avant l’heure. Grand pour l’époque, costaud physiquement, charmant, il passe une majorité de sa vie d’adulte à parcourir le monde s’adonnant à ses diverses passions et conquêtes. Il est également décrit comme un tempérament volcanique. D’une vive intelligence, il est cependant facilement distrait et ne se consacre jamais très longtemps à une seule et même tâche. Quelques anecdotes d’une vie bien remplie permettent de cerner le personnage :
-        A une époque où les mœurs voyaient le divorce comme une très mauvaise chose, il se maria trois fois.
-        Dans les années où sa fortune lui faisait défaut, il attaque sa mère en justice sous prétexte que les multiples cadeaux extravagants qu’elle lui fait durant sa jeunesse sont une mauvaise gestion de la fortune familiale dont il hérite.
-        Il est attaqué en justice par avoir presque étranglé à mort un homme suite à une partie de carte ayant mal tournée.
-        En tentant d’éviter les taxes de l’empire britannique sur son activité armurière, il déclare sa propriété en Ecosse comme territoire des Etats-Unis d’Amérique. Ce qui lui vaut d’être un hors la loi aux yeux de la couronne pendant un temps.

Il démontre très tôt une affinité et un talent naturel pour le tir de compétition et la chasse au gros gibier. Ses talents incluent aussi une affinité naturelle pour l’ingénierie et ses premiers brevets relatifs à l’armement datent de l’époque où il étudiait encore au Trinity College de Cambridge. Il fonde en 1897 une petite manufacture d’armes situé à Hartford, Connecticut en association avec le machiniste J A Bennet.

Si la volatilité du personnage est avérée, il convient de considérer que Ross montrera outre ses talents naturels d’ingénieurs, un fin sens des affaires. Il a son nom de nombreux brevets couvrants des systèmes divers tels que des hélices de bateaux et un générateur hydro-électrique. Très tôt ses investissements s’orientent vers le Canada dont la jeunesse est porteuse d’opportunités. Il s’y installe en 1897 et y investit dans une compagnie de tramway électrique sur rail à Vancouver puis y fondera une compagnie de distribution d’électricité pour toute la Colombie Britannique utilisant son brevet de générateur.

Le Ross rifle Cr310

En 1900 Ross est à la recherche de nouvelles aventures et s’engage comme volontaire dans la guerre des Boers en quête de gloire et plus généralement d’une source de distraction. Il y sera lieutenant du 3ème bataillon des Seafort Highlanders. Au sein même de ce bataillon, il est responsable d’une unité de mitrailleuse qu’il offrira d’équiper avec des armes de sa fabrication.

C’est lors de ce conflit qu’il rencontre Samuel Hughes.
 Le Ross rifle Sh110
 
Samuel Hughes 08/01/1853 – 24/08/1921 :

Samuel Hughes n’est pas un personnage très reconnu à l’échelle globale de la première guerre mondiale. Il s’agit en revanche d’une des figures politiques les plus célèbres de l’histoire du Canada qu’il a marqué par son rôle dans la création de l’armée régulière canadienne au tournant du siècle ainsi que par son caractère hors du commun et ses nombreux déboires.

Il né à Darlington au Canada de parents immigrés, d’un père irlandais et d’une mère écossaise. Il étudie à la Normal School de Toronto. Fervent défenseur de l’appartenance du Canada à l’empire britannique, opposant de toute heure à la communauté française canadienne et Protestant très pratiquant, il soutiendra durant toute sa vie un idéal victorien de la masculinité exacerbée affirmé par le labeur physique, la recherche de l’héroïsme et la discipline de soi. Cet idéal le mènera à soutenir la nécessité d’une milice volontaire civile comme force de défense principale du Canada. Il fait partie du 45ème bataillon de West Durham, une branche de la milice, dès ses 13 ans. C’est durant son service de milicien qu’il prendra goût au tir et y développera des talents notables. Ses capacités et sa réputation le mèneront à diriger la Dominion of Canada Rifle Association, demeurant encore aujourd’hui une des associations majeures pour la pratique du tir civil au Canada.

Vers 1885 il décide de poursuivre une carrière en politique. Son éloquence et sa personnalité le feront élire à siéger à la House of Commons en 1891. A noter que son élection se fera par vote secondaire, son opposant direct l’ayant battu lors de l’élection fédérale. Hughes ne manquera pas d’attaquer ledit opposant en justice sous accusation de fraude électorale.

En 1899, alors que le Canada débat de la possibilité d’envoyer des troupes participer à la guerre des Boers, Hughes est considéré pour le rôle de commandant de la force initiale de 1000 hommes pour son étroite connexion avec la Milice. Ses détracteurs voient d’un très mauvais œil la possibilité que Hughes commande la première expédition étrangère du Canada à cause d’un caractère impatient et bagarreur. Il est finalement autorisé à participer le 31/10/1899. Malgré de nombreux accrochages avec la structure de commandement britannique, il sera félicité pour sa détermination et son courage. Hughes revient de la guerre des Boers avec la conviction que tous les futurs conflits se feront à longue distance et sur des schémas de bataille similaires à  ceux rencontrés en Afrique du Sud. Un défaut qu’on ne puis le reprocher exclusivement tant ce conflit aura des répercutions idéologiques durable dans tout l’empire britannique. Il y rencontre aussi Charles Ross dont il se fera un ami proche, miroir de son propre tempérament. Avide de tir de compétition, le fusil Ross qui y excelle déjà à l’époque lui apparaitra comme le summum de l’armement militaire moderne.

Le Ross rifle Sh210

Rentré au pays à l’issu de la guerre, il n’aura de cesse de vanter ses exploits militaires en quête d’une Victorian Cross qui ne lui sera finalement jamais accordée. Il reste impliqué à la House of Commons durant la décennie suivante jusqu’à ce que les circonstances le mènent au poste de ministre de la Milice et de la Défense en 1911. Il ne quittera dès lors plus son uniforme militaire même lors de réunions informelles. Il s’affairera envers et contre tous à mettre en œuvre sa vision idéalisée d’une armée Canadienne dérivée de la Milice civile. Il est à la tête de l’effort de mobilisation canadien démarrant le 7 août 1914. Son frère John est chargé de l’organisation du campement pour les 33 000 soldats mobilisés de la première division. Durant la mobilisation il est réputé pour ses accès de colère autoritaires, pour dénoncer toute réserve concernant son commandement comme une marque de faiblesse et pour critiquer ouvertement ses officiers devant leurs propres hommes. François-Louis Lessard, vétéran et héro de la guerre des Boers se verra refusé toute fonction d’autorité par Hughes sous prétexte avoué qu’il est catholique et québécois. En contraste à ses accès de colère, il est réputé accorder des promotions de manière aléatoire.

Une anecdote des plus amusantes est la pelle MacAdam présentant un trou de grande taille au milieu (!) supposé pouvoir y passer un fusil et ainsi servir de support de tir. Sam Hughes agissant de son propre chef, la fait adopter à grande échelle par l’armée. Ce sera bien sûr un échec total malgré qu’il ait mobilisé les fonds pour en produire 22 000 exemplaires.

Le Ross rifle A2023910
Ceci n'est pas une parodie

Le Ross rifle 3012
Rigolez pas, il est pas commode!

Malgré une détestation largement répandue dans la force canadienne envers Hughes, ses méthodes, son comportement et son traitement inégalitaires, il parviendra de l’avis général à créer un sentiment d’appartenance à une force nationale distincte et non à un subsidiaire de l’empire britannique. Les Canadiens seront considérés par alliés comme ennemis comme des combattants féroces et imprévisibles notamment pour leurs exploits héroïques durant la seconde bataille d’Ypres.

Il est anobli le 24 Aout 1915. Cet anoblissement est alors tant controversé du fait de sa désastreuse réputation que plus aucun Canadien ne sera anobli des suites de la crise diplomatique résultante. 

De nombreuses débâcles, accusation de fraudes, de mauvaises gestions ainsi que ses incessantes confrontations avec supérieurs comme subordonnés forcent le Premier Ministre Robert Borden à démettre Hughes de ses fonctions le 9 novembre 1916. Robert Borden était jusqu’alors un des meilleurs amis de Hughes et le plus grand support de sa carrière politique. Il est dit que son retrait de commandement fut largement célébré parmi les troupes mobilisées. Parmi les accusations de corruptions et mauvais jugement dont il fait l’objet, l’adoption du Ross reste le fait le plus marquant et celui qui contribuera le plus à sa perte. Il n’aura alors de cesse de critiquer et d’entraver par tous les moyens possibles le gouvernement en place. Le temps le verra sombrer peu à peu dans la paranoïa. Il accuse notamment le gouvernement de filtrer son courrier.

Le Ross rifle Tzolzo10

Hughes décède durant l’été 1921. Ses dernières paroles connues seront traduites ainsi :
« Ne vous en faites pas pour moi. Très bientôt je serais assis sur la main droite de Dieu où je pourrais enfin remettre les choses dans le droit chemin ».

Ses funérailles sont les plus grandes du pays jamais vu avec plus de 20 000 participants. Son dévouement, son charme et sa force de caractère seront salué. Mais la plupart des sources même acquis à sa cause ne manqueront pas de mentionner son manque de discernement, son caractère abrasif à l’extrême, son racisme et sa vanité. Sa participation acharnée à l’effort de guerre et son rôle central, même si involontaire, dans l’acquisition de l’indépendance du Canada restent indéniables.

Son rôle dans l’adoption et surtout dans le maintien envers et contre tous du Ross comme arme d’infanterie principale de l’armée canadienne durant la première guerre illustre bien le personnage qu’était Samuel Hughes et son influence sera mis en évidence dans la suite de l’article.

Je vous conseille vivement l’article de Canadian History Ehx sur le bonhomme : https://canadaehx.com/2021/07/11/sir-sam-hughes/

On y apprend bien d’autres choses sur cet homme haut en couleur qu’on croirait tout droit sorti d’un film de guerre parodique à l’américaine. Je ne peux pour ma part m’empêcher de l’imaginer comme une sorte d’Amiral Benson dans une version un tant soit plus sérieuse de Hot Shots!


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Message  seschomaru Sam 29 Jan 2022, 18:46

------------------------- La production civile Ross et ses variantes-------------------------
 
Le premier concept du système Ross date de 1893 alors que Charles Ross était encore au Trinity College de Toronto. Ce mécanisme vaguement assimilable à une action rectiligne était fantastiquement complexe et avoué non viable par Ross lui-même.
 
J’utiliserais le terme de Sporter pour désigner plus généralement une variante civile de Ross. Cette terminologie sera maintenue lorsqu’il s’agira de parler des versions à usage militaire.
 
Modèle 1897 :
 
La petite manufacture d’arme Ross Rifle Company ouverte en 1897 dans le Connecticut commercialise une carabine très largement inspirée de l’action rectiligne du Steyr 1890 qui deviendra le M95. Il s’agit d’une culasse à tête rotative entrainée par des cannelures correspondant à des rainures à l’intérieur d’un corps de culasse évidé. Celle-ci ressemble fortement à une culasse de Steyr M95. Remarquez notamment cet extracteur flottant typique du système Mannlicher rectiligne.
Le Ross rifle Steyrm10
    
Je n’ai malheureusement pas d’images de ce modèle 1897 dont la production est confidentielle. Il s’agit d’une carabine plus généralement assimilable à une carabine de traque de l’époque avec des bois raccourcis. Il s’agit d’une arme haut de gamme à l’époque et presque toutes les configurations de bois ou d’organes de visée sont envisageables.

L’un des curiosités récurrentes sur toutes les premières versions du Ross, civiles comme militaires est le système de chargeur breveté dit "Harris Control Feed". Il s’agit d’un magasin interne de 5 cartouches en deux colonnes. Cependant, le ressort d’élévateur est actionné manuellement par un levier dont le point de rotation se trouve en avant de la hausse.
Le Ross rifle Hall_m10
Elévateur au repos avec schéma de la position du levier d'élévateur


Le Ross rifle Hall_m12
Elévateur en position basse avec schéma de la position du levier d’élévateur

Ce levier est maintenu en pression par un ressort agissant sur son axe de rotation. On voit sur la photo suivante la rainure qui est laissée dans le bloc pontet+chargeur pour laisser passer ce levier :
Le Ross rifle S-l16010
Le Ross rifle S-l16011

En pratique cela permet de se passer de lame chargeur sans toutefois avoir à insérer les cartouches une par une. Au moment de recharger vous saisissez l’arme au niveau de la hausse avec la main faible tout en maintenant vers le bas le bouton actionnant l’élévateur. Vous êtes ainsi face au magasin vide avec l’élévateur en position basse. Avec votre main libre vous prenez une poignée de 5 cartouches que vous déposez ensuite dans le magasin. Il suffit ensuite de relâcher le bouton ce qui va remettre l’élévateur en pression vers le haut et les cartouches se mettent en place correctement.  Cet approvisionnement ne nécessite pas de soin particulier, vous pouvez même jeter les cartouches dans le magasin et tant qu’elles sont toutes orientées pareil, elles se placeront correctement lorsque vous relâchez le bouton de l’élévateur. Si une cartouche se met de travers il suffit de descendre brièvement l’élévateur et de le relâcher à nouveau pour corriger. Le « rimlock » (autrement dit le fait que le bourrelet de la cartouche du dessus soit en avant du bourrelet de la cartouche du dessus) empêchant le chargement se corrige également avec une action brève sur le bouton de chargeur.

Chose intéressante, les productions civiles feront l’objet d’un partenariat avec la firme anglaise Lancaster qui agit à la fois en tant que distributeur officiel des carabines Ross sur le territoire anglais et  fournisseur des canons. Ce partenariat prendra fin en 1907 une fois que la manufacture militaire Ross québécoise acquit le savoir-faire nécessaire pour produire ses propres canons. Les premiers canons Lancaster présentent alors ce qu’on appelle une âme ovale.
Le Ross rifle Britis10

Cette version 1897 diffère des versions suivantes par son percuteur suspendu activé par l’action d’un chien. Il est suggéré que c’est avec cette version que Ross équipera son régiment de mitrailleuses durant la guerre des Boers et cette même arme qui attirera l’intérêt de Samuel Hughes.
Le seul calibre proposé est alors le 303 British.
 
Modèle 1900 :
La percussion par chien est abandonnée au profit d’un percuteur lancé actionné par un ressort interne au corps de culasse. Très peu d’exemplaires existent de cette version et je ne suis pas parvenu à en trouver de clichés. A titre de référence, Ian McCollum présente ci-après un splendide Sporter 1900 en coffret : https://www.youtube.com/watch?v=UCPWWgnOQCc

C’est cette version 1900 qui sera la première mise en configuration militaire pour être présentée aux canadiens.

Le seul calibre proposé est le 303 British.

Modèles 1903 :
Ce modèle sera majoritairement produit à la petite manufacture Benett au Connecticut mais quelques-uns (environ 200) seront assemblés dans la toute nouvelle usine Ross ouverte au Québec en 1904. Les caractéristiques ne diffèrent presque pas par rapport au modèle 1900 mais l’arme bénéficie de quelques améliorations issues des quelques retours des essais sur les prototypes destinés à l’armée.

D’autres calibres commencent à être proposé tel que le .256 Mannlicher, le .370 Express. On trouve également des références à des modèles d’essais chambrés en .450 et .500 Nitro Express. Dans cette déclinaison, le Ross pèse un demi kilo de moins qu’un Lee-Enfield contemporain. Autant dire que ça devait déménager en .500 NE !
Cette version 1903 est la première à faire l’objet d’une commande militaire. Les versions militarisées du 1903 deviennent le MkI.

Quelques photos :
Le Ross rifle Ross_s10
Le Ross rifle Ross_s12Le Ross rifle Ross_s11
Le Ross rifle Ross_s13

Remarquez le bouton en avant du tonnerre permettant de contrôle le système de chargeur Harris.

Remarquez la forme du levier de culasse ainsi que la sécurité qui se présente depuis la version 1897 sous la forme d’un bouton coulissant latéralement à l’arrière du corps de culasse.
Le Ross rifle 1903_m10

La culasse est inchangée depuis le modèle 1897 avec deux tenons de verrouillage. La cinématique de verrouillage de la tête de culasse fait passer les tenons de la verticale vers leur position verrouillée à l’horizontale. Le réarmement du percuteur se fait à la fermeture.
Le Ross rifle 2gjv3t10
Le Ross rifle R8d44w10   
Culasse de Sporter 1903. Remarquez les cannelures en spirale pour guider la tête de culasse dans le corps de culasse

Modèles 1905 :
La version 1905 voit la forme du boitier évoluer assez radicalement. La forme du levier de culasse et la sécurité différente également.

Cette variante voit apparaitre un filetage sur la moitié de la longueur des cannelures de guidage de la tête de culasse. Cette modification vise à augmenter la surface de contact entre les éléments mobiles de la culasse. Les tenons de verrouillage sont  légèrement inclinés (environ 10°) pour aider à l’extraction primaire. Ils étaient auparavant parfaitement rectangulaires. Ces ajustements sont rendus nécessaires par la volonté d’adapter le 1905 à des calibres hauts pressions tel que 35 WCF qui est testé en vue d’un ajout prochain au catalogue. Les cartouches hautes pressions peuvent avoir tendance à coller aux parois de la chambre et l’absence d’extraction primaire peut vite devenir un vrai problème sur un mécanisme à action rectiligne. D’autant plus sur des armes dont les gros calibres leurs permettent de prétendre à une utilisation pour la grande chasse africain où l’impossibilité de tirer rapidement et sans défaut un deuxième coup est souvent fatal. Le réarmement se fait désormais à l’ouverture et restera ainsi pour la suite de la production du Ross.
Le Ross rifle S-l16013
Le Ross rifle S-l16012

Ce modèle 1905 deviendra le MkII dans sa version militaire.

Le Ross rifle Ross_s14
 
Le magasin est légèrement simplifié avec une enceinte d’un seul tenant au lieu de deux sur le 1903.

Le Ross rifle S-l16014

Modèle 1907 :
Là ce se complique car cette version fait la transition progressive depuis le 1905 vers la version finale 1910. Ces exemplaires 1907 restent marqué 1905 sur le côté gauche du boitier même s’ils voient l’apparition progressive de quelques évolutions dont :
-        La sécurité qui devient une sorte de drapeau plutôt qu’un bouton coulissant.
-        Un boitier renforcé
-        Une modification en profondeur des tenons de verrouillage qui étaient alors au nombre de 2 (1+1) et qui deviennent 7 (3+4) interrompus.
-        Le chargeur à élévateur manuel Harris est abandonné pour être remplacé par un magasin double pile à élévateur captif plus classique.

Il s’agit des premiers modèles entièrement fabriqués et assemblés, canon inclus, dans la nouvelle usine du Québec. Le partenariat avec Lancaster pour fourniture des canons prend fin. D’autres pièces spécialisées tel que la hausse sont encore issues de contrats en sous-traitance.

Cette version 1907 voit aussi l’introduction de différentes configurations commerciales qui vont marquer la transition vers l’évolution finale du Ross dans sa version 1910 :
-        modèle M et R chambrés en 303 British. Les seules différences entre les deux se situent au niveau des finitions apparemment mais j’ai des difficultés à le confirmer. Cette version dispose encore de la sécurité ancien modèle, de la tête de culasse à deux tenons de verrouillage et du chargeur à système Harris. Quasi impossible à différencier d’un modèle 1905 si ce n’est la référence catalogue sous laquelle ces modèles étaient vendus.

Le Ross rifle Extrai10
Le Ross rifle 1907_m11
Le Ross rifle Ross_111

-        Modèle E chambré en 303 British ou 35WCF avec un canon au profil plus lourd et un boitier renforcé. Cette variante possède déjà le chargeur modifié et la sécurité drapeau mais pas encore la tête de culasse modifiée.
Le Ross rifle 1907_m12
Œilleton moderne rajouté

-        Model 1907 « Scotch Deer Stalking Rifle” avec action renforcée et chambré en 280 Ross. Les parois du boitier autour de la chambre sont épaissies et ce modèle voit l’apparition de la tête de culasse modifiée.
Le Ross rifle Ross_112Le Ross rifle Ross_113Le Ross rifle 1907_210
Tête de culasse à tenons interrompus apparue sur le 1907 SDS :
Le Ross rifle Culass10

Bien que la culasse ressemble désormais fortement à celle de la version finale 1910, le verrouillage des tenons s’opère pour l’instant toujours depuis la verticale vers l’horizontale.

----------------------------------------------------------------------------
Le calibre 280 Ross :
Le Ross rifle Tw-410


Charles Ross éprouve une fierté non dissimulée pour son mécanisme à armement rectiligne qu’il juge, peut-être à juste titre, comme étant le mariage parfait d’une arme de grande chasse et d’une arme de match. Cependant, il ne cache pas un certain dédain à l’encontre du calibre 303 British. Il en fait le calibre principal de son arme car il s’agit après tout de LA cartouche standard de gros calibre de l’empire britannique.
Ross, dans sa recherche de performance balistique et dans l’optique de s’octroyer un avantage technique lors des matches de Bisley dont il est un habitué, conçoit d’abord une balle longue et profilée de type Boat-tail de 200gr pour le 303 British. L’avantage balistique apporté par cette ogive ne parvient cependant pas à cacher une relative insuffisance du 303 British. Aussi, dès 1906, Ross s’allie au balisticien et tireur longue distance Frédéric W Jones avec comme objectif de créer une nouvelle cartouche. L’inspiration pour la conception de ce calibre est de dépasser les performances du 7x57 Mauser qui est alors considéré comme la meilleure cartouche de match allemande. Les objectifs numériques sont 150gr (9.7g) à 2800fps (853m/s). Jones s’en approche en modifiant un étui de 30-06 pour une ogive de 7mm et un angle d’épaulement plus agressif. 2735fps sera le maximum atteint par ce calibre nommé .28/06. Les 2800fps sont atteints avec un étui de 28/06 allongé, épaissit à la base et affublé d’une forte conicité pour obtenir le 280 Ross-Eley. Eley Brothers basé à Edmonton UK étant alors contracté comme fabriquant de ce calibre. 
Le Ross rifle Vo155t10
280 Ross en haut, 303 British en bas


Avec sa cartouche de 280, Ross associe enfin son arme idéale à son calibre idéal. On ne peut pas lui donner tort, le 280 Ross est pour l’époque et encore aujourd’hui un calibre formidable. Utilisant une ogive de diamètre .288 (et non .284 comme la plupart des 7mm), cette cartouche est proposée par Ross en deux chargements :
-        Chargement chasse. Ogive demi-blindée à base plate de 140grs, 58grs de poudre Neonite (dérivé plus lent de la Cordite). Vitesse résultante de 3047fps (929m/s). Il s’agit du premier calibre produit en série à dépasser les 3000fps.
-        Chargement match. Ogive FMJ type Boat-tail de 180grs particulièrement longue et profilée. Vitesse résultante de 2800fps.

Le profil de l’ogive match permet d’obtenir sensiblement la même trajectoire jusqu’à 900m pour les deux chargements malgré la différence de vitesse. Ross ne tarit pas d’éloge sur ce nouveau calibre avec notamment les données suivantes issues de leurs catalogues commerciaux :
Le Ross rifle Graphi11

Les prétentions de précisions sont tout aussi impressionnantes. Avec un tir de de cartouche réalisé depuis un appui mécanique, les groupements suivants sont indiqués.
Le Ross rifle Groupe10

Si le 280 Ross est aujourd’hui plus ou moins oublié, il fut un classique de la grande chasse et du tir longue distance pendant de nombreuses années. Si l’activité armurière de Ross s’arrête en 1917, Kynoch produira cette cartouche jusqu’en 1967. Mauser entre autres chambrera sur catalogue des carabines de grande chasse en 280 Ross jusque dans les années 50.

L’exploit représenté par cette cartouche inspirera notamment le développement du 25-3000 Savage, réponse d’orgueil des américains souhaitant un calibre domestique de même capacité. En application militaire, cette cartouche sera maintes fois imitée :
-        .276 Enfield associé au fusil Enfield P13 qui deviendra plus tard le P14 une fois rechambré en .303 British en vue de son adoption par l’Angleterre. Puis deviendra encore plus tard l’US 17 en 30-06. Ce même US 17 servira enfin de base pour le développement de multiples calibres Magnum également inspiré du 280 Ross. La boucle est bouclée
-        7x57 Meunier qui sera chambré par le Meunier A6 que nous adopterons en petit nombre durant la première guerre mondiale. L’aboutissement de la conception de cette cartouche est estimé à 1912 mais constitue l’aboutissement d’une longue séquence de développement de cartouches hautes performances débutée par Meunier en 1890.

La réputation à la chasse du 280 Ross sera toutefois un peu mitigée. Il est admis que ce calibre délivre suffisamment d’énergie cinétique pour l’engagement des animaux le plus dangereux et il aura largement l’occasion de le faire. Cependant, plusieurs occurrences décrivent le fait que le 280 Ross ne parvient pas toujours à stopper un animal en charge du premier coup. Ceci étant peut-être dû à la trop grande vitesse atteinte par l’ogive qui ne lui permet pas de délivrer de manière optimale son énergie à l’animal à courte distance. Un problème dont ne souffrent pas le 375 H&H ou le 505 Gibbs qui apparaitront en 1912 et 1911 respectivement et qui auront dès lors la faveur de la chasse africaine.

A noter que de par son diamètre plus élevé que l’étui de 303 British, le magasin des Ross 1907 chambré en 280 n’accepte que 4 cartouches au lieu de 5.
Le Ross rifle S-l16015
--------------------------------------------------------------------------------------------------
MkII 1905/1910 Target Rifle :
Le Ross rifle 112
Un exemplaire extrêmement rare mais non moins intéressant dans la chronologie du développement du Ross MkII est cette modification pour le tir de compétition longue distance qualifié de 1905/1910 Target. Il est construit sur la base d’un boitier civil 1905 et a été adapté pour employer une culasse à tenons interrompus comme le modèle civil 1907. Chambré en 280 Ross avec la sécurité type drapeau. Deux exemplaires seulement sont connus mais il s’agit bien d’une production de la manufacture Ross et non d’une transformation civile. Cet exemplaire est dépourvu de chargeur.
Le Ross rifle 312Le Ross rifle 412
Un attribut intéressant de cet exemplaire est l’absence de traces de montage pour organes de visée sur le boitier ou le canon. Il semble qu’une hausse rabattable ait été montée tout à l’arrière de la crosse.
Le Ross rifle 512 
Cet emplacement de l’organe de visée suggère que l’arme était utilisée dans une position de tir de type Creedmoore très spécialisée pour les longues distances.
Le Ross rifle Back0611 

--------------------------------------------------------------------------------------------------
Modèle 1910 :
Le Ross rifle Tzolzo11


Ultime évolution de la lignée Ross, le modèle 1910 change une nouvelle fois complétement de boitier. Celui-ci se renforce encore au niveau de la chambre et est désormais fermé par un portique à hauteur du pontet. Le portique permet l’ajout d’organes de visée plus proche de l’œil du tireur. La culasse à 7 tenons de verrouillage est conservée au même titre que le chargeur double pile à élévateur captif. Le verrouillage des tenons se fait cette fois depuis la verticale vers l’horizontale contrairement au modèle 1907.
Le Ross rifle Ross-m11Le Ross rifle Pix07312Le Ross rifle Pix58612

Remarquez également l’arrêtoir de culasse fortement inspiré (voir carrément copié) de celui du Springfield 1903. Les trois positions sont :
-        Bas pour bloquer le chargeur et faire fonction de cut-off
-        Milieu pour démontage de la culasse
-        Haut pour utiliser le chargeur
Le Ross rifle Pix96110

Ce modèle, le plus répandu toutes variantes confondues, sera chambré majoritairement en 303 British et 280 Ross. Sa déclinaison militaire, le MkIII est également la variante la plus commune. Ces carabines sont produites jusqu’en 1917 à la fermeture de la manufacture québécoise.


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Message  seschomaru Sam 29 Jan 2022, 18:50

------------------------------- Adoption du Ross et évolutions ------------------------------
 
Nous en étions restés à la fin de la guerre des Boers avec un gouvernement Canadien dans l’incapacité de refaire ses stocks de Lee-Enfield. Soit parce que la Grande-Bretagne refuse de vendre, préférant privilégier ses propres réserves. Soit parce le Canada ne parvient pas à obtenir de solutions pour produire le Lee-Enfield localement, Enfield et BSA refusant d’établir des antennes de production au Canada. L’Angleterre n’est vraiment pas arrangeante dans l’histoire car elle refuse même de confier au Canada les droits de fabrication du Lee-Enfield dans le cas d’une création d’usine locale.
 
Le ministère de la défense est alors laissé avec deux solutions :
-        Passer une commande d’armement à un pays tiers à l’empire britannique. Solution qui ne sera pas considéré car diplomatiquement épineuse.
-        Etablir une manufacture locale pour produire une arme de conception canadienne.
 
Charles Ross sentant le filon arrive avec une solution semblant presque trop belle pour être vraie. Il est alors déjà très bien connecté avec le milieu industriel et politique du Canada de par ses investissements d’utilité publique à Vancouver ou plus simplement son statut de résident membre de l’élite sociale depuis 1897. Ross à une arme de sa propre conception qu’il propose d’adapter aux besoins militaires. Mieux encore, il propose de prendre, à sa charge, la construction d’une usine de fabrication d’arme au Québec à proximité de la rivière StLaurent pour un montant estimé à 500 000$ de l’époque soit environ 16.6millions de $ ajustés à l’inflation! Pas de main-d’œuvre importée, Ross n’emploiera que des travailleurs d’origine canadienne. Il est aisé de comprendre la motivation du gouvernement canadien envers cette solution quasi-miraculeuse. Toutefois, personne ne sera autant enthousiasmé par l’idée qu’un certains Samuel Hugues. S’il n’est pas encore ministre de la Milice et de la Défense, il est déjà bien impliqué en politique et une figure proéminente de la Milice. Il se dévouera entièrement à faire adopter cette arme qu’il trouve à juste titre formidable car très performante sur le pas de tir. Il a déjà été établi que Ross et Hughes s’apprécient, se respectent et se ressemblent sous bien des aspects. L’idée que l’arme soit produite au Canada dans une usine financée entièrement sur fonds privés ne gâche rien.

Le Ross rifle 8f10
Photo de l'usine Ross
 
La première présentation que Ross fait au ministère de la Défense prend la forme d’un modèle sporter 1900 adapté avec une crosse toute longueur et un embouchoir adapté pour recevoir une baïonnette de Lee-Enfield. Les premiers prototypes font l’objet de quelques tests sommaires pour jauger la viabilité de la proposition. Quelques problèmes sont notés tel que la fragilité des bois, les organes de visée pas adaptés, difficultés à ouvrir la culasse en tir soutenu à cause de l’absence d’extraction primaire, etc… mais la commission, dont fait partie Hughes, confirme son intérêt et les tests et améliorations successives se poursuivent jusqu’à l’adoption en 1903 du MkI.
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Message  Airforce1 Sam 29 Jan 2022, 23:32

seschomaru a écrit:----------------------------- Le Canada fin du 19ème siècle ---------------------------------
 
Le Canada est alors une colonie britannique et le restera jusqu’à l’acquisition de son indépendance en 1929. En tant que colonie, le Canada est appelé à participer à la guerre. Malgré une résistance initiale de la communauté francophone qui voit cet appel à la guerre comme une manipulation de trop de la part de la couronne anglaise, le gouvernement cède et envoi en octobre 1899 un premier bataillon de 1000 hommes en soutient aux anglais. 6000 volontaires viendront renforcer ce nombre dans les mois suivants portant l’effort canadien à 7000 soldats. Il s’agit du premier conflit de cette jeune nation sur un terrain étranger.
 
Il y a une erreur de 2 ans le statut de Westminster a été octroyé au Canada en 1931 et non en 1929.

Le Statut de Westminster de 1931, adopté le 11 décembre 1931, est une loi du Royaume-Uni reconnaissant la souveraineté externe de tous les dominions de l'Empire britannique : l'Australie, le Canada, l'Irlande, la Nouvelle-Zélande, Terre-Neuve et l'Afrique du Sud.

------------------------

Capitaine Airforce1 salut Le Ross rifle 842554592 Le Ross rifle C_broa11
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Message  seschomaru Sam 29 Jan 2022, 23:49

Ross MkI :

Ce premier modèle adopté sans réel phase d’essai sérieuse fait l’objet d’une commande de 10 000 exemplaires.
 
Malheureusement j’ai peu de photos et ce que j’ai n’est pas de super qualité. Cependant, ces versions Mk1 sont assez faciles à reconnaitre si vous prenez l’apparence de l’action Sporter 1903 comme référence. Les marquages sur la gauche du boitier ainsi que la sécurité typique du modèle sont les meilleurs indicateurs.
 
Malgré son incapacité à fournir des Lee-Enfield au Canada ainsi que sa non-volonté de compromettre, l’empire britannique voit d’un mauvais œil l’adoption d’une arme de conception indépendante par un de ses subsidiaires. Le MkI est dès le départ proposé chambré en 303 British ce qui rationnalise la démarche d’un point de vue logistique au sein de l’empire et aidera les Anglais à fermer l’œil quant à l’adoption du Ross.
 Le Ross rifle 9-110Remarquez ici, au-dessus du pontet, un bouton servant à activer le cut-off de chargeur. Il s'agit d'un attribut déjà présent sur les versions civiles du 1903

Le Ross rifle 15-110Le Ross rifle 18-110
Fin texturage du tonnerre pour limiter que le soleil ne s'y réfléchisse et gêne la prise de visée

Le Ross rifle 12-110
Comme sur la version civile, la culasse présente des tenons de verrouillage carrés et deux rainures de guidage ininterrompues. A l’instar de la version civile, le réarmement du percuteur se fait à la fermeture. 

Le Ross rifle 2gjv3t11

Exemples de marquages sur MkI :

Le Ross rifle 5-110
A96, un des 100 premiers exemplaires donc.

Certaines sources citent les 500 premiers exemplaires comme ayant été livrés au Departement of Ocean and Fisheries. Institution encore existante aujourd’hui et dont la mission était la régulation de la pêche sur les eaux canadiennes.

Le Ross rifle 4-110

« DP » pour "Drill Purpose" désignant une arme destinée soit à la parade soit à l'entraînement et manipulation. Arme non destinée au tir. C695, le 3 692ème Ross produit.


---------------------------------------------------------------------------------------
Marquages et identification Ross militaires :
La règle générale des Ross militaires issus de contrats canadiens est que le tonnerre et le boitier ne présente aucuns marquages que ce soit la date de fabrication, le numéro de série ou l’affectation à une unité. Ces informations sont toujours indiquées sur la droite de la crosse comme ci-dessus. Si les MkI sont assez avares en informations, cela va s’étoffer rapidement avec les évolutions successives. Il n’est pas rare que ces marquages soient très effacés jusqu’à en être illisibles et il va de soi qu’un changement de crosse fait à posteriori du service laisse une arme qui ne raconte plus grande chose. La numérotation des Ross se fait par bloque allant de A jusqu’à ZZ puis 001 à 999. Certaines informations telle que le numéro de série, l’identification de la variante et l’année de fabrication sont également indiqué sur le canon sur le dessus de la chambre mais non visible sous le garde-main.
 
Tous les Ross suivent une numérotation continue depuis le premier MkI jusqu’aux dernier MlII. Si la chronologie précise correspondante à la numérotation n’est pas toujours bien établie, il est en revanche plutôt aisé de placé un exemplaire dans le temps relativement aux autres variantes.
-----------------------------------------------------------------------------------------------

Les meilleures photos d’ensemble que j’ai sont en fait de la très rare variante carabine estimée à 1000 exemplaires seulement :
Le Ross rifle 1903_m12
Le Ross rifle 1903_m11

Cette version carabine diffère très peu de la version d’infanterie. Le canon standard mesure 30" (762mm), celui de la carabine 28" (711mm). Un protège guidon différent est adopté et se retrouvera sur les versions MkI*. L’embouchoir est dépourvu du tenon de baïonnette.

Le Ross rifle Mk1_lo10
De haut en bas : Carabine de cavalerie MkI*, MkI précoce

Ces 1000 carabines sont issues d’une commande de la Royal North West Mounted Police. Une sorte de milice territoriale créée en 1873 ayant juridiction sur les territoires de l’Alberta, du Saskatchewan, Yukon, la côte Arctique et le Nord Manitoba. Cette branche de la milice servira à l’étranger durant la guerre des Boers ainsi que les deux guerres mondiales.
 
Cette première version MkI est affublée d’une hausse franchement farfelue et d’une délicatesse paraissant tout à fait inadapté à une utilisation militaire.
Le Ross rifle 10-110
Le système d'élévateur Harris est présent comme sur la version civile

Le Ross rifle 16-110Le Ross rifle 17-110

Cette hausse est graduée jusqu’à une distance de 2800 yards, risible même pour l’époque où tir de volée est une pratique militaire courante.
 
Très rapidement, cette distance et surtout l’extrême fragilité de cette hausse seront reconnues et aux environs du 2500ème exemplaire, une hausse raccourcie est proposée avec une limite de graduation à 2300 yards :
Le Ross rifle 1903_m13
 
La fragilité de la hausse reste un problème et les utilisateurs du MkI se plaignent que le V du cran de mire est difficile à utiliser pour le tir réactif. Ce V est associé à un cran un guidon carré ce qui rends la prise de visée lente et peu intuitive. Cela nécessitera une modification en profondeur de la hausse qui justifie que la dénomination du modèle évolue vers le MkI*
 
La plaque de couche comporte une trappe coulissante pour le kit de nettoyage.

Le Ross rifle 26-110
 
Ross MkI* :
 
Cette variante voit trois évolutions :
-        Modification en profondeur de la hausse qui devient un système ressemblant au viseur du Mauser G98 nommé ″HL Bock Sight″ et protégé par le brevet américain 837180A.
Le Ross rifle Hausse10

La graduation est limitée à 2300 yards, les éléments constituants la hausse sont nettement plus résistants et le système est affublé d’une molette crantée permettant le réglage sans toucher à la glissière. Le garde-main est désormais en deux parties pour accommoder ces nouveaux organes de visée.

Le Ross rifle Mk1_si10
De haut en bas : MkI précoce, MkI*

Le Ross rifle 940xz610 
-        Le support de guidon est renforcé

Le Ross rifle Mk1_si11

-        Les marquages sur la crosse sont plus étoffés.

Le Ross rifle Sans_t10

Mes excuses pour la piètre qualité du cliché. On devine ici une nouvelle fois le DP désignant une arme destinée à l’entraînement à la manipulation. Directement à la gauche du macaron, un « I* » identifiant la variante. Le numéro de série 176G. La date de fabrication apparait, ici 1905. Le M&D fait très probablement référence à l’unité de service de cet exemplaire.
Malgré ces améliorations, les premières occurrences d’utilisation du MkI, même dans le cadre relativement tranquille de l’entraînement, commencent à révéler un certain nombre de faiblesse :
-        L’extraction est difficile. La faute d’une part aux tenons qui sont carrés sans aucune inclinaison et ne donnent donc aucun avantage mécanique à l’ouverture de culasse. D’autre part aux deux rainures continues du corps de culasse mobile qui peinent à traduire le mouvement rectiligne en une rotation de la tête de culasse avec suffisamment de force.
-        L’embouchoir est trop fragile. L’entraînement à la baïonnette avec notamment le fait de la planter dans des sacs de sables entraîne des déformations importantes.
-        Plus embarrassant, l’arrêtoir de culasse est bien trop faible. Cela est découvert lors des parades. Lorsque la crosse de l’arme est amenée vivement contre le sol il arrive régulièrement que la culasse se déverrouille et s’extraie d’elle-même de l’arme.
 
Ces défauts sont facilement attribuables au fait que le MkI ait été adopté sans une phase de test sérieuse. La fourniture de ce modèle aux troupes aura constitué un prototypage à grande échelle en quelques sortes.
 
Malgré un passage de commande initial en 1903, la mise en route de la chaîne de production occasionne des retards et les premiers MkI sont livrés débuts 1905. Vers fin 1905, Ross développe un nouveau modèle pour le marché civil. Celui-ci est adapté pour l’usage militaire afin de corriger aux passages quelques-uns des défauts du MkI.
 
Pour rappel, environ 10 000 exemplaires du MkI et MkI* ont été produits. La transition vers le MkI* n’est pas bien située chronologiquement mais d’après le peu d’exemplaires que j’ai pu apercevoir, le changement a dû être opéré vers le 6000ème exemplaire.


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Message  seschomaru Sam 29 Jan 2022, 23:51

Ross MkII :
 
Je vais faire de mon mieux pour rendre le propos qui va suivre aussi explicite que possible. Sachez cependant qu’on distingue 6 variantes du MkII jusqu’au MkII 5*, mais que le MkII 2* est la dernière variante produite avec un boitier différent et que les MkII4* n’existe plus car ils ont tous été reconfiguré en MkII 3*…
 
Certaines de ces variantes étant extrêmement rares, je vais fortement m’appuyer sur la vidéo de ForgottenWeapons sur le Ross Mk2 pour illustrer les mises à jour successives.
 
Pour tenter de simplifier un peu les choses, il convient de garder à l’esprit que l’attribut qui distingue presque toujours toutes ces variantes à l’exception du 5* est la hausse. C’est la principale chose qui change car il s’agit d’une pièce complexe qui était alors produite aux Etats-Unis et Ross souffre continuellement de problèmes d’approvisionnement pour ce délicat ensemble. Il n’aura donc de cesse de modifier la hausse de son MkII pour la simplifier et tenter d’en accélérer la fabrication.
 
De la même manière que le MkI était une adaptation du 1903 Sporter, le MkII est une adaptation du 1905 Sporter.

Le MkII militaire récupère les améliorations de la version civile :
-        Nouveau boitier renforcé
Le Ross rifle Boitie10
Le Ross rifle Boitie11
-        Culasse avec tenons de verrouillage incliné pour aider l’extraction primaire. Les cannelures liant le mouvement de la tête de culasse au corps de culasse sont améliorées. Il y en a désormais 4 et elles sont interrompues sur la moitié de la longueur.
-        A l’instar du modèle civil 1905 sur lequel il est basé, le MkII opère le réarmement du percuteur à l’ouverture.
Le Ross rifle S-l16016
-        La sécurité est améliorée
-        L’arrêtoir de culasse est renforcé pour éviter que la culasse ne sorte de l’arme durant la parade aux prix d’un embarras non mérité.
-        Le cut-off de chargeur est désormais situé à l’intérieur du pontet et prend la forme forme d’un crochet. Le cut-off est activé lorsque le crochet est en position basse et désactivé en position haute. Son effet est d’actionner une sorte de patte qui vient entraîner l’élévateur vers le bas pour mettre la cartouche hors de portée de la culasse.
Le Ross rifle H0759-10
Ici une version sporterisé sur lequel un portique à été ajouté pour accepter des organes de visée plus proche de l'oïl du tireur

La plaque de couche est légèrement différente de celle du MkI :
Le Ross rifle Buttst10
A gauche MkII, à droite MkI


---------------------------------------------------------------------------------
Analyse visuelle des différences entre boitier et culasse du MkI et du MkII :
 
Boitier allongé et renforcé aussi bien au niveau du tonnerre que des parois.
 Le Ross rifle 1512
MkI en haut, MkII en bas


L’arrière du boitier ainsi que le support de l‘axe de la queue de détente sont modifiés.
Le Ross rifle 1612
MkI à gauche, MkII à droite


Forme générale de la culasse.
Le Ross rifle 2012
MkI en haut, MkII en bas

Différence au niveau des têtes de culasse. Remarquez l’inclinaison des tenons sur le MkII pour aider à l’extraction primaire.
Le Ross rifle 2112
MkI à gauche, MkII à droite


La sécurité opère de la même manière, avec une goupille qui coulisse vers la gauche pour entraver la course du percuteur. Mais le bouton est différent et l’action générale de la sécurité est renforcée.
Le Ross rifle 2313
MkI à gauche, MkII à droite


Comparaison de l’avant du boitier avec ajout d’une pièce dont la forme tends à emmener les tenons de verrouillage en position déverrouillée lors de l’ouverture de la culasse. Cela pour améliorer l’extraction primaire.
Le Ross rifle 1811
MkI à gauche, MkII à droite


Le Ross rifle 1912
Un autre aspect intéressant du MkII est la méthode montage du canon utilisant un filetage très grossier associé à une vis de blocage.
Le Ross rifle 2212

Cette disposition semble uniquement présente sur les versions militaires du MkII et non sur les 1905 civils. Ce système permet d’envisager le démontage et remplacement rapide du canon. Apparemment une proposition de Ross plutôt qu’une requête de l’ordonnance canadienne. On peut émettre l’hypothèse que cette disposition était censée apporter une solution logistique à l’usure prématurée des canons causé par la combustion agressive de la Cordite. Quoi qu’il en soit, le MkI employait un filetage de canon standard sans vis de blocage ce qui change sur le MkII.
---------------------------------------------------------------------------------
Le viseur Hl Bock Sight du MkI* est conservé.
Le Ross rifle 2411
La longueur du canon est ramenée à 28".

Les marquages de crosse sont plus ou moins les mêmes que sur le MkI pour l’instant.

Le Ross rifle Ross_m10
Les premiers exemplaires sont livrés en 1906.

Ross MkII* :

Le MkII conservait le défaut de l’embouchoir jugé trop fragile car prompt à être déformé lors de l’entraînement à la baïonnette. Le MkII * est en tout point identique au MkII à l’exception de l’embouchoir modifié et renforcé.
Le Ross rifle 2512
En haut MkII, en bas MkII*


Le Ross rifle Ross_m11

Ross MkII avec hausse Mk3 :
Il s’agit d’une modification de la hausse faite sur la base d’un MkII ou d’un MkII*. Cette modification n’est pas considérée suffisamment importante pour mériter d’être identifiée dans la nomenclature de l’arme.
Le Ross rifle Mk2_x_10Le Ross rifle Ross_m10

Cette hausse fonctionne sur le même principe que la hausse présente jusqu’à maintenant sur le MkII mais est à la fois simplifiée et renforcée.
 
Ross MkII 2* :

Celui-ci est problématique… A partir du MkII *, la continuité du développement se sépare en deux voies distinctes :
-        La première continuera à honorer les demandes des commandes militaires avec des améliorations sur la base du MkII boitier 1905. Cette branche du développement donnera le 3*, le 4* et l’évolution finale 5* qui sera produite en 1910.
-        La deuxième suit plus directement les instructions de Charles Ross qui souhaite proposer une variante militaire fondamentalement revue intégrant certaines des améliorations de sa carabine Sporter 1907.
 
Le MkII 2* est placé chronologiquement après le MkII* car son développement commence vers 1908 et les premiers exemplaires sont livrés aux Canadiens en Mai 1909 pour essais. Charles Ross a tenté avec cette variante de faire adopter sa cartouche de 280 Ross comme calibre principale de l’armée canadienne, ce qui n’a pas abouti pour des raisons logistiques.
 
Le MkII 2* présente un nombre important de différences par rapport au MkII * :
-        La longueur du canon revient à 30" (762mm)
-        Le démontage rapide du canon par une vis de blocage est abandonné. Le filetage traditionnel du canon du MkI est réutilisé.
-        Le cut-off de chargeur est supprimé
-        L’extracteur est élargi et renforcé
-        La sécurité par bouton coulissant est abandonnée au profit d’un drapeau comme sur la version civile 1907.
Le Ross rifle M2_2x_10 
-        Une vis anti-desserrage est ajoutée sur la platine du fond de magasin
Le Ross rifle Mk2_2x11
En haut MkII *, en bas MkII 2*
-        La hausse ainsi que le garde-main sont changés pour accepter un nouveau viseur rabattable et finement ajustable désigné Sutherland MkII
Le Ross rifle Mk2_2x10
Remarquez l'encoche au sommet de la hausse indiquant que cet exemplaire a été auparavant équipé d'un autre modèle de hausse
-        Bien qu’il soit difficile de généraliser cette mesure, un grand nombre de 2* présentent un portique en tôle pliée et rivetée à l’arrière du boitier. Ce portique répond à une demande de l’armée pour une solution d’utilisation de lames chargeurs Lee-Enfield sur leurs MkII.Le Ross rifle Mk2_ch10
Profitant de cet ajout, Ross propose le montage d’une hausse sur le portique afin d’augmenter la longueur de la ligne de visée.
Le Ross rifle Mk2_2x12
Cette hausse montée sur le portique pour lame chargeur peut varier. Ici il s’agit du « Ross Battle Aperture » de fabrication Ross qui sera utilisé plus tard sur le MkIII. Mais on y trouve aussi les modèle Sutherland MkII ou les Sutherland MkI simplifiés du MkII 5*.
Il a été envisagé de retirer les hausses Sutherland MkII déjà présentes et désormais inutiles sur ces exemplaires suite à l’installation d’une nouvelle hausse à l’arrière du boitier. Cependant, il a été réalisé que cette étape aurait un coût inutile et c’est pourquoi on peut parfois retrouver des exemplaires de MkII 2* avec deux hausses. Une Sutherland MkII à l’avant du tonnerre, une autre à l’arrière du boitier.
L’intention initiale de cette variante était d’en faire le MkIII à l’issu des essais. Le MkII 2* est officiellement adopté par le Canada comme arme d’infanterie principal en 1911 avec une commande de 13 000 unités. Cette variante ne deviendra pas le MkIII car cet honneur reviendra à la version militaire du Sporter 1910 adopté en 1912.
Le MkII 2* équipera l’artillerie canadienne sur les théâtres de la première guerre mondiale.
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Le MkII 2* et le tir de compétition :
Le Ross rifle Target10
Si la carrière militaire du Ross laisse sérieusement à désirer, le MkII 2* va débuter la tradition de domination incontestable du Ross dans le cadre des compétitions avec arme d’ordonnance. De 1908 à 1913, Ross propose à son catalogue le MkII 2* Commercial Target Model chambré en 303British et équipé par défaut d’un support de hausse à l’arrière du boitier.
Le Ross rifle Target12Le Ross rifle Target11
A l’époque opposée aux Lee Enfield N°1 MkI et premiers N°1 MkIII, le Ross était privilégié par près de 70% des participants lors des matches longues distances pour sa précision intrinsèque supérieure au Lee-Enfield.
 
Toutes les variantes destinées au tir de compétition ont leur numéro de série frappé sur la gauche du canon entre le garde-main et le tonnerre.
Le Ross rifle Target13

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Ross MkII 3* :

Variante la plus courante du MkII, le 3* est une transformation sur base des MkII*, des MkII avec viseur Mk3 ou plus tard des MkII 4*. Aucun MkII 3* n’a été produit neuf dans cette configuration. La conversion est on ne peut plus simple, il s’agit de remplacer la hausse par un modèle Sutherland MkII déjà présent sur le 2*. Environs 26 000 exemplaires sont convertis de cette manière entre 1910 et 1912.

Le Ross rifle Mk2_3x10
Il est important de garder à l’esprit que le MkII 2* est la variante qui est adoptée de manière officielle mais qu’elle nécessite la fabrication d’une nouvelle arme avec un nouveau canon et un nouveau boitier. Cette évolution sur base du MkII* est une façon pour le Canada de maintenir en service les MkII déjà dans son inventaire.
Le Ross rifle Mk2_3x11
Le Ross rifle Us_mk210

Le viseur Sutherland MkII est un petit bijou de finesse mécanique. Composé d’un nombre important de pièces, il propose des réglages fins à la fois en élévation et en dérive, un œilleton pour le tir de précision et un cran de hausse pour le tir de combat. Le réglage maximum est un cran au sommet de la hausse et correspond à 2200 yards.
Le Ross rifle Dsc02127
 
Ross MkII 4* :

La seule trace de l’existence de cette évolution persiste dans les marquages sur la crosse de 4000 exemplaires de MkII 3*.
Le Ross rifle Mk2_3x12 
Ces 4000 MkII 4* sont produits de 1910 à 1912 mais ne font à priori l’objet d’aucune commande. Il reste dans l’inventaire de la manufacture Ross jusqu’en 1917 à l’occasion d’une commande de 20 000 MkII 3* passée par les Etats-Unis. Ross y répond avec 16 000 exemplaires de 3* et le reliquat de 4000 exemplaires est traité avec l’ensemble des MkII 4* figurant dans l’inventaire. Le 4* est une amélioration du MkII avec hausse Mk3. Les changements appliqués par Ross sont :
-        Hausse Sutherland MkI, simplification de la MkII des modèles 2* et 3* et que l’on retrouvera sur le 5*
-        Extracteur renforcé du 2*
 
Les USAs souhaitent une uniformité dans leur commande. Avant la livraison, il est demandé de retirer les hausses Sutherland MkI et de les remplacer par des MkII afin que toutes les armes livrées correspondent à la variante 3*. Cette demande un peu étrange est honorée par Ross et il n’y alors plus de raison de créer cette nouvelle variante 4* vu que seul l’extracteur a été changé. Le marquage 4* est donc barré et remplacé par un 3*. Cette commande de 20000 exemplaires dont 16000 3* et 4000 "4*" est signée le 17 Novembre 1917 et sera livrée en totalité vers Janvier 1918.
 
Ross MkII 5* :
 
Dernière évolution dans la nomenclature du MkII, le 5* prends le 3* comme base avec les changements suivants :
-        Remplacement de la hausse Sutherland MkII par le modèle simplifié Sutherland MkI.
-        Garde-main modifié sur la base de celui adopté sur le MkII 2*
Le Ross rifle Mk2_5x10Le Ross rifle 1905ro11Le Ross rifle 1905ro10

Le Ross rifle Mk2_5x11
L’armée canadienne commande 15 000 exemplaires de cette variante début 1910, lesquels seront livrés courant 1911 avant d’être officiellement remplacé à grande échelle par la variante 2* en 1912.
 
Ceci conclue la complexe famille des variantes du MkII. La quantité totale de Ross produits en configuration militaire est estimée à environ 420 000 exemplaires. Il estimé qu’environ 307 000 de ces exemplaires sont des MkIII dont 240 000 pour l’armée canadienne et 67 000 livrés dans le cadre d’une commande de l’Angleterre. On sait de manière assez certaine que 10 000 à 12 000 exemplaires de MkI ont été produits ce qui laisse une quantité estimée de MkII toutes variantes confondues de 103 000 exemplaires.
 
Il est important de noter à ce stade que l’armée canadienne est relativement satisfaite de ses MkII 2*. Le viseur ne parvient pas encore tout à fait à répondre à la demande d’un compromis entre simplicité et précision, l’extraction primaire peut encore de temps en temps poser problème et on note plusieurs cas de têtes de culasse mal trempée. Mais globalement le nouveau MkIII est adopté plus par souci de s’équiper de la version la plus moderne que par réel besoin d’amélioration. A ce stade également, l’Angleterre est en capacité de fournir des SMLE aux canadiens et encourage la standardisation du matériel au sein de l’empire. Les Canadiens font néanmoins le choix de maintenir le Ross. A la fois par satisfaction globale et aussi sans doute à titre de revanche pour le rejet sans cérémonie dont ils sont faits l’objet à l’issu de la guerre des Boers.

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Baïonnette Ross MkI + MkII :
Le Ross rifle H5403-10Le Ross rifle 12497910


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Message  Airforce1 Dim 30 Jan 2022, 00:08

seschomaru a écrit:----------------------------- Charles Ross et Samuel Hughes --------------------------------

Il né à Darlington au Canada de parents immigrés, d’un père irlandais et d’une mère écossaise. Il étudie à la Normal School de Toronto. Fervent défenseur de l’appartenance du Canada à l’empire britannique, opposant de toute heure à la communauté française québécoise et Protestant très pratiquant, il soutiendra durant toute sa vie un idéal victorien de la masculinité exacerbée affirmé par le labeur physique, la recherche de l’héroïsme et la discipline de soi. Cet idéal le mènera à soutenir la nécessité d’une milice volontaire civile comme force de défense principale du Canada. Il fait partie du 45ème bataillon de West Durham, une branche de la milice, dès ses 13 ans. C’est durant son service de milicien qu’il prendra goût au tir et y développera des talents notables. Ses capacités et sa réputation le mèneront à diriger la Dominion Rifle Association, demeurant encore aujourd’hui une des associations majeures pour la pratique du tir civil au Canada.


Rentré au pays à l’issu de la guerre, il n’aura de cesse de vanter ses exploits militaires en quête d’une Victorian Cross qui ne lui sera finalement jamais accordée. Il reste impliqué à la House of Commons durant la décennie suivante jusqu’à ce que les circonstances le mènent au poste de ministre de la Milice et de la Défense en 1911. Il ne quittera dès lors plus son uniforme militaire même lors de réunions informelles. Il s’affairera envers et contre tous à mettre en œuvre sa vision idéalisée d’une armée Canadienne dérivée de la Milice civile. Il est à la tête de l’effort de mobilisation canadien démarrant le 7 août 1914. Son frère John est chargé de l’organisation du campement pour les 33 000 soldats mobilisés de la première division. Durant la mobilisation il est réputé pour ses accès de colère autoritaires, pour dénoncer toute réserve concernant son commandement comme une marque de faiblesse et pour critiquer ouvertement ses officiers devant leurs propres hommes. François-Louis Lessard, vétéran et héro de la guerre des Boers se verra refusé toute fonction d’autorité par Hughes sous prétexte avoué qu’il est catholique et québécois. En contraste à ses accès de colère, il est réputé accorder des promotions de manière aléatoire.
C'est vrai Sam Hughes était un anti-canadiens-français et non contre seulement la "communauté française québécoise". Vous oubliez qu'il y a des canadiens-français en dehors de la province du Québec. Présentement, il y a plus de 1 millions de canadien parlant quotidiennement le français tous les jours en dehors de la province du Québec. J'en suis un canadien-français qui habite en dans la province de l'Ontario. 
 
Il y a une erreur dans le nom de la Dominion Rifle Association, la vraie désignation est la Dominion of Canada Rifle Association et la version française officielle est L'Association de tir Dominion du Canada.

Pour le Major-général François-Louis Lessard est un canadien-français à son époque et encore aujourd'hui. Une petite anecdote, j'ai une copie de son dossier militaire, il est inscrit dans son dossier qu'il parle une langue étrangère: français.
 
Il est à noter que seulement le 22e Bataillon (canadien-français) (devenu en 1921 le Royal 22e Régiment (R22eR) qui a combattu comme régiment canadien-français sur le front dans le cadre du corps expéditionnaire canadien.


Dernière édition par Airforce1 le Dim 30 Jan 2022, 19:07, édité 4 fois

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Message  seschomaru Dim 30 Jan 2022, 00:44

Ross MkIII :
Le Ross rifle Sans_t16
Basé sur l’action du Sporter 1910, refonte en profondeur de l’action 1907, le Ross M1910 communément appelé MkIII est adopté en 1912 comme arme d’infanterie principale de l’armée canadienne.
 
C’est cette variante qui est communément associée à l’implication du Canada dans la première guerre mondiale. Elle équipera la majorité des unités combattantes d’infanterie et le MkII 2* sera réservé à l’artillerie et à l’arrière garde. Les autres variantes en service telles que le MkII 3* seront réservés à la Milice territoriale canadienne et autres divisions non mobilisées pour la première guerre mondiale.
 
Dans sa version militaire, le MkIII ne subira presque pas de changements jusqu’à son implication lors de la guerre et les modifications qui seront faites seront internes afin d’en améliorer le fonctionnement. Par rapport à la version civile du 1910, les changements sont les suivants :

-        Canon profil lourd de longueur 30"1/2 soit 775mm

Le Ross rifle Diamzo10
Pour illustrer la différence sensible d'épaisseur du canon : A gauche MkIII, à droite MkII

-        Crosse toute longueur d’un seul tenant avec un garde-main d’une seule pièce maintenue par agrafes.
-        Embouchoir embouti repris du MkII 2* sur les tout premiers exemplaires, il sera très vite remplacé par une version usinée.
-        Le magasin interne à double pile et élévateur Harris est abandonné au profit d’un magasin simple pile en tôle emboutie dépassant du profil de la crosse. Celui-ci n’est pas solidaire de la platine du pontet mais exige le démontage de la crosse pour être extrait.

Le Ross rifle Charge10

-        Le portique supportant la hausse inclue un guide pour lame chargeur. Celui-ci place la lame chargeur à environ 10° par rapport à la verticale.
-        La hausse Ross Battle Aperture est adoptée de manière universelle.

Le Ross rifle Mk3_ac10Le Ross rifle Mk3_ac11Le Ross rifle Dsc02237

-        La plaque de couche est changée et présente désormais une trappe pivotante pour le kit de nettoyage.

Le Ross rifle Dsc02128
A gauche MkII, à droite MkIII
Environ 240 000 seront produits pour armer les troupes canadiennes en vue de leur arrivée sur les côtes françaises en février 1915. La force globale compte alors environ 600 000 homes. Les personnels nécessitant une arme et ne disposant pas du Ross MkIII sont équipés soit du MkII 2*, soit du MkII 3*, soit de Lee-Enfield datant des stocks de la guerre des Boers.
 
De nombreux problèmes apparaissent avec le MkIII notamment lors de la seconde bataille d’Ypres en Aout 1915. Ces défauts seront analysés dans un chapitre suivant, en voici la liste non exhaustive :
-        Arme trop encombrante et trop lourde pour les manœuvres rapides en espace confiné des tranchées. Le canon lourd confère un point d’équilibre très en avant du magasin ce qui est tout sauf idéal. L’arme fait 1.32m et presque 5kg. 20cm et 1kg de plus qu’un SMLE.
-        La culasse peut être remontée de manière incorrecte de telle sorte qu’une fois en batterie les tenons ne sont pas engagés. Le tir propulse alors la culasse en arrière occasionnant un danger mortel pour l’utilisateur.
-        Divers problèmes liés au magasin. L’alimentation par lame chargeur est jugé très difficile, la tôle fine du magasin est facilement déformée ce qui le rends hors service, le magasin ne reste pas correctement en position ce qui occasionne des défauts occasionnels de chambrage.
-        Sensibilité aux corps étrangers du mécanisme qui a rapidement tendance à ne plus permettre la fermeture de la culasse. La faute a des tolérances d’usinages serrées.
-        La baïonnette a souvent tendance à se désolidariser de l’embouchoir
-        La chambre du MkIII n’est pas adaptée aux munitions de 303 British de fabrication anglaises. Je vais m’attarder en longueur sur ce point un peu plus tard car c’est réellement ce défaut qui cristallisera toutes les frustrations envers le Ross.
 
L’identification se fait toujours depuis la crosse avec une numérotation toujours dans la continuité de la production globale des variantes militaires.

Le Ross rifle Rossbu10

Le dessus du tonnerre peut présenter deux types de marquages correspondant soit à la commande initiale après l’adoption en 1912 soit à la deuxième commande passée en vue de l’entrée en guerre et du débarquement en France.

Le Ross rifle Mkiii_10
A gauche M-1910 de la première commande, à droite M-10 de la deuxième commande

Ross MkIIIB :

Le Ross rifle Mk3b10

L’Angleterre passera commande après la guerre de 100 000 exemplaires d’une variante qui deviendra le MkIIIB. Au final seulement 67 000 semblent avoir été livrés. Les principaux changements concernent les organes de visée :
-        Le guidon est remplacé par celui du P14
-        La hausse est remplacée par un modèle nommé « War Office Pattern Sight » consistant en une sorte de berceau triangulaire associé à une hausse de P14.

Le Ross rifle Pix77410Le Ross rifle Pix60910
Le Ross rifle Pix31910Le Ross rifle Pix56410

Certaines de mes sources indiquent un épaississement de la crosse à hauteur de la chambre mais je ne parviens pas à le confirmer.
 
Ces MkIIIB possèdent leurs propres numéros de série et sont signalés par un B gravé à gauche du tonnerre. Le numéro de série figure sur le tonnerre. Aucun marquage n’est présent sur la crosse.

Le Ross rifle Mk3b_m10
Intéressant poinçon en croix démontrant une prise russe sur cet exemplaire

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Baïonnette Ross MkIII :

La baïonnette du MkIII est une modification de celle du MkII. La lame est taillée plus en pointe et légèrement raccourcie. Le diamètre intérieur de la partie venant autour de la bouche du canon est augmenté pour accommoder le canon lourd du MkIII.

Le Ross rifle Dsc02238Le Ross rifle 2x_bay11Le Ross rifle 2x_bay10
------------------------------------------------
 
Ross M10 Military Match Target Rifle :

Pouvant être considéré comme la version ultime du MkIII et l’arme de compétition rêvée par Charles Ross, ce modèle Match Target est une des variantes les plus rares car produit à seulement une vingtaine d’exemplaires. Il ne s’agit pas d’une arme militaire convertie mais d’un boitier civil M-10 précoce qui a été adaptés en configuration militaire. Le canon est ramené à 26" (660mm) et chambre le 280 Ross. La différence la plus notable provient du magasin qui passe d’un système simple pile protubérant à un magasin de style Mauser à double pile affleurant.

Le Ross rifle M10_ta11

Les grenadières sont déplacées et sont désormais sur le côté gauche.

Le Ross rifle M10_ta12Le Ross rifle M10_ta10

Pour de meilleure prise de vue du MkIII ultime, celui que Ross souhaitait faire adopter au Canada et à l’Angleterre, je vous invite à consulter la vidéo de Forgotten Weapons dédiée à cette arme absolument superbe : https://www.youtube.com/watch?v=89wAHMSik9o

------------------------------------------------
Recap modèles et quantités produites :

Ci-après je vous propose un tableau retraçant et clarifiant au mieux les différentes variantes militaires du MkI au MkIIIB. Figurent dans ce tableau également les dates et périodes estimées de production ainsi que les quantités indiquées dans les diverses archives de l’usine Ross et de l’ordonnance canadienne :
Le Ross rifle Tablea13

Informations parfois incomplètes, surtout en ce qui concerne les sous-variantes carabine de MkI. Il semblerait qu’une carabine de MkII ait été produite pour une unité de Police canadienne mais je ne trouve ni photos ni référence explicite (une source suggère qu’il en reste moins de 30 connues). Ce tableau n’indique pas non plus clairement le sort des quelques 235 540 MkIII qui seront dispersés chez les Anglais et de par le monde après la guerre. Je donne quelques informations à ce sujet dans un prochain chapitre. Le moins que l’on puisse dire est qu’ils ont beaucoup bourlingué en Europe.


Dernière édition par seschomaru le Mar 08 Fév 2022, 22:25, édité 3 fois
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Message  seschomaru Dim 30 Jan 2022, 00:52

---------------------------------- Autres ″déclinaisons″ notables ----------------------------
 
Ross 1912 de Cadet :

Le Ross rifle Cadet_10

L’année de l’adoption du MkIII, la Milice canadienne passe commande à Ross d’un modèle en 22LR pour l’entrainement des nouvelles recrues. Cette commande pour 10 000 exemplaires est honorée avec une livraison étalée sur 3 ans d’une petite carabine mono-coup à action rectiligne reprenant l’ergonomie générale du MkIII. Le 1912 de Cadet est équipé à la fois d’un œilleton rabattable à l’arrière du boitier et d’un cran de mir en avant du tonnerre.

Le Ross rifle Cadet_11
Le Ross rifle Sf20-010Le Ross rifle Sf20-011
Le Ross rifle Cadet_13

La variante militaire est proposée avec un canon de 22". Plus tard, des versions civiles seront offertes au catalogue Ross avec des canons de 18", 20" ou 22" et des bois raccourcis portant le nombre total de ces carabines à 17 000 exemplaires environ.

Le Ross rifle Sans_t17

Il semble que ces 1912 de Cadet ait reçu leur propre série de numéros. Les marquages figurent toujours sur le côté droit de la crosse.

Le Ross rifle Marqua10
"CC" signale ici l'appartenance au Cadet Corps canadien qui est une branche de la Milice

Le Huot Automatic Rifle :

Etant friand des bizarreries que constitue les tentatives de conversion semi-automatiques d’arme à réarmement manuel, je souhaite m’étendre un peu sur ce curieux instrument qu’est le Huot.

L’action rectiligne du Ross en a fait une excellente base de développement pour des conversions semi-automatiques. Ross lui-même s’y essayera, mais il est opportun de mentionner le prototype de Joseph Alphonse Huot car celui-ci est passé très proche de l’adoption par le gouvernement canadien.

Le Ross rifle Huot1110

Les canadiens utilisaient soit le Lewis soit l’antique Colt 1895 dans le rôle de mitrailleuse durant la première guerre mondiale mais en nombre largement insuffisant pour être intégré proprement dans leurs tactiques de combat. Huot, ingénieur canadien y voit en 1916 l’opportunité de proposer une arme légère offrant un tir automatique contrôlable au fantassin. Une démarche remarquablement similaire à celle ayant animé le développement et l’adoption du Chauchat et plus tard du BAR. Huot est également très familier du Ross MkIII désormais abondant après avoir été retiré du service en 1916.

Dans les grandes lignes, un ensemble boitier, culasse et canon de Ross MkIII est utilisé. L’approvisionnement se fait par un chargeur tambour détachable de 25 cartouches de conception plutôt complexe et pas sans rappeler celui équipant le Farquhar-Hill 1918. Le refroidissement du canon se fait par un manchon radiateur en aluminium copié du Lewis. Un emprunt de gaz propulse un piston sur la gauche de l’arme, ce piston est relié à la culasse. L’ensemble constitué de l’emprunt de gaz, du piston, du liaisonnement à la culasse ainsi que d’un système d’amortisseur pour la fin de course du mécanisme est protégé par un grand capotage. Ce mécanisme alambiqué confère au Huot une cadence très faible d’environ 470 coups/min ce qui a pour effet de le rendre tout à fait contrôlable malgré l’absence de poignée pistolet et de faire durer un peu le chargeur de 25coups. Il est aussi noté que le chargeur peut être changé en environ 4s ce qui est plus rapide qu’un Lewis, plus lent qu’un BAR et relativement équivalent à un Chauchat.

Le Ross rifle Mzocan10
On reconnait bien ici la base du MkIII qui conserve même le drapeau de sécurité. A noter aussi la hausse très similaire à celle du MkIIIB

Si l’esthétique et l’ergonomie loufoque n’était pas du goût de tout le monde, le Huot se comportera admirablement durant plusieurs tests d’endurances. Huot présente son premier prototype, fabriqué dans sa cabane de jardin, le 8 septembre 1916 à un Colonel de la Milice québécoise et il est presque immédiatement enrôlé dans ce qui est alors l’équivalent du département R&D gouvernemental de l’armement léger. Le système est couvert par les brevets canadiens 193724 le 8 mars 1971 et 193725 le 13 novembre 1917. La Dominion Rifle Factory (nom donné à la manufacture Ross après sa fermeture et son rachat par le gouvernement) produit un premier de série.
Plusieurs tests sont menés. Le premier est un test de fonctionnement de 650 cartouches le 15 février 1917. Ce test encourageant mène à un deuxième essai de 11 000 cartouches le 5 mars 1917. Les résultats à nouveau très encourageants allimentent l’intérêt vis-à-vis de la poursuite du développement en vue d’une adoption et une présentation aux britanniques est suggéré. Le 10 janvier 1918, le même Huot ayant passé les essais au Canada est testé à nouveau à la RSAF Enfield pour un test comparatif de 10 000 cartouches l’opposant au Lewis. Il s’y comporte à nouveau admirablement et mieux que le Lewis à plusieurs égards. Contrairement au Lewis nécessitant des cartouches spécifiques, le Huot supporte à peu près tout. Contrairement au Lewis également, le Huot se montre capable de supporter un test en continu de 4000 cartouches sans lubrification.

Le 1er octobre 1918, le Lieutenant-Général de la force armée canadienne engagée en France fait la demande pour achat urgent de 5000 exemplaires du Huot suite à un avis favorable  de ses hommes et pour répondre au manque cruel de mitrailleuses. Cette adoption est une excellente opportunité, l’outillage peut être rapidement mis en place à la Dominion Factory qui a déjà produit quelques prototypes et les mécanismes de MkIII servant de base à la conversion sont abondements disponibles suite au retrait de service du Ross en 1916. Une donnée qui parait assez incroyable mais que plusieurs sources corroborent : En partant du principe qu’un Ross MkIII ne coute rien, car destiné à la ferraille à ce stade, la conversion complète en Huot coûte 50$CAN. Cette valeur est à comparer aux 1000$CAN que coûte un Lewis.
Malheureusement la guerre se termine, le contrat est annulé et après de longues années de bataille juridique contre le gouvernement canadien Joseph Huot est compensé pour son travail à hauteur de 30k $CAN. 4 exemplaires ont été fabriqués d’après les archives et 3 sont dans des musées, la situation du 4ème n’est pas connue à ce jour. Aucun exemplaire n’est fonctionnel et tous sont plus ou moins incomplets.


Dernière édition par seschomaru le Lun 31 Jan 2022, 21:25, édité 1 fois
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Message  seschomaru Dim 30 Jan 2022, 01:39

---------------------------------- Le MkIII de tireur d’élite ------------------------------------


Le Ross rifle Ross-r10

On ne le réaffirmera jamais assez, le MkIII et le Ross en général sera un désastre pour les troupes canadiennes à un niveau rarement constaté sur une arme de service. Comme on le verra dans un chapitre suivant, les problèmes majeurs rencontrés par les utilisateurs du Ross ne sont pas tant la faute de l’arme, même si sa conception est peu adaptée aux tranchées, mais plutôt des munitions anglaises pour lequel le Ross n’a pas été conçu.
 
Le MkIII sera cependant l’arme préférée des tireurs d’élite canadiens et de plusieurs de leurs homologues anglais durant la première guerre mondiale et jusque dans la deuxième. L’encombrement, le poids, la délicatesse mécanique, la sensibilité aux débris, le magasin un tant soit peu capricieux et la non-compatibilité avec les munitions anglaises sont non avenus pour des tireurs soigneux, expérimentés, patients, en arrière de la première ligne d’affrontement et auxquels sont réservées les munitions de haute qualité canadiennes.
 
Je vais principalement parler des variantes équipées d’optiques mais même dans sa configuration de base en visée ouverte, le MkIII est déjà un formidable outil pour le tir de précision :
- La hausse est au plus près de l’œil et d’une grande finesse de réglage. Similaire à un 1903A3 ou un US17, généralement considérés comme le top dans cet exercice.
- La ligne de visée est longue, très longue avec ce canon de 30″1/2.
- Le canon lourd garantie une excellente précision car moins impacté par les effets néfastes des harmoniques et de la mise en bois.
- La chambre serrée et le mécanisme offrant un verrouillage régulier garantie une excellente régularité mécanique.
- La détente à bossette ajustée pour le tir de match est excellente.
- L’arme est lourde ce qui contribue à sa stabilité sur appui.
- Les munitions de 303 British de fabrication canadienne sont optimales pour le MkIII à la fois en termes de fonctionnement et de régularité. Elles correspondent aussi le mieux aux réglages de la hausse.
 
Rien d’étonnant finalement, Le développement du fusil de Charles Ross a toujours été pensé avec le tir de compétition longue distance en tête.

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Francis ″Peggy″ Pegahmaggabow
 
Nombre de tireurs prouveront l’efficacité du MkIII mais le nom le plus célèbre qui y est associé est sans aucun doute celui du Sergent-Major Francis Pegahmagabow dit ″Peggy″.

Le Ross rifle Peggy10 

Un personnage exceptionnel à bien des égards. Chef indien de la tribu autochtone canadienne des Ojibwé, il est comme tous les autochtones initialement découragés à participer à l’effort de guerre par le gouvernement canadien. Sa persévérance lui permet finalement d’être un des premiers inscrits sur les registres de volontaires en août 1914 à l’entrée en guerre du Canada. Son passé de pompier, son absence de famille proche encore en vie et sa bonne forme physique lui valent d’être le premier d’environ 4000 autochtones à être envoyé en France. Il est affecté au 23ème régiment des Northern Pioneers qui viendra grossir les effectifs de 20 000 hommes du 1er Bataillon d’Infanterie. Après sa formation militaire en Angleterre, il débarque en France en février 1915.
 
Son baptême du feu sera la terrible seconde bataille d’Ypres lors de laquelle les féroces attaques allemandes et, pour la première fois, le gaz de chlore fera perdre au bataillon la moitié de son effectif. Il est promu Caporal suppléant à l’issu des affrontements. Son engagement sans faille et sa grande bravoure lui valent d’être plusieurs fois blessé, mais il retourne au combat à chaque fois malgré une condition physique diminuée. Il contracte une pneumonie en décembre 1917. Bien qu’il en guérisse, il retournera au combat avec des douleurs importantes à la poitrine qui le suivront jusqu’à la fin de sa vie. Excellent tireur et meilleur encore dans le rôle d’éclaireur, il est régulièrement impliqué dans des missions d’infiltration à haut risque et le plus souvent de nuit. Lors de ces missions et comme plusieurs de ces camarades aborigènes, il privilégie des mocassins en peau aux bottes militaires pour se déplacer de manière plus discrète. Il participe activement et toujours avec distinction aux grandes batailles majeures en tant que tireur d’élite et éclaireur : Ypres, mont Sorrel, la Somme (il y sera blessé d’une balle dans la jambe), Passchendaele, Amiens, Arras. On lui attribue 378 soldats allemands tués et 300 prisonniers ce qui fait de lui le soldat le plus prolifique et le héros canadien le plus respecté de la première guerre mondiale. Il est décoré de multiples fois :
-        Médaille de la Vaillance Militaire canadienne
-        Médaille du Service deux agrafes canadienne
-        Etoile britannique
-        Médaille de guerre britannique
-        Médaille de la Victoire britannique

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Médailles dans l'ordre listé à l'exception de la médaille de la Vaillance Militaire
Il attribuera sa bravoure à ses fortes croyances spirituelles, portant en tout temps plusieurs charmes Indiens sensés le protéger. Des rôles de commandements lui seront plusieurs fois proposés mail il décline, souhaitant rester au plus près des affrontements.
 
A son retour et malgré son statut de héros plusieurs fois décoré, il constate avec frustration que la persécution dont il faisait l’objet en tant qu’Indien n’a pas changé. La condition des Indiens au Canada est alors à peine meilleure que celle des Indiens américains. Il devient actif dans la politique et militant pour le droit des autochtones. Sa santé fortement diminuée des suites de sa pneumonie et peut être des séquelles d’exposition au gaz de chlore, il recevra une fonction de garde d’un dépôt de munition en Ontario durant la seconde guerre mondiale. Il occupe également le rôle de Sergent-Major de la Milice locale. A partir de 1945 il effectue deux mandats comme chez suprême du gouvernement de la communauté des Autochtones nouvellement formé. Il restera dévoué à la cause des peuples originels canadiens jusqu’à sa mort le 5 août 1952.
 
Pendant toute la durée de son service, Francis Peghamagabow emploiera avec succès le Ross MkIII qu’il conserve comme beaucoup de tireur d’élite même après le retrait du service en 1916. A l’instar d’un autre tireur d’élite célèbre de la seconde guerre mondiale, il semble que Francis ait toujours privilégié une arme dénuée d’optique.
 
En 1916, un monument à son honneur et à celle de la participation des tribus natives à l’effort de guerre est érigé en Ontario non loin de la réserve où il est né. Ce monument le représente en tenue militaire, un Ross MkIII à l’épaule droite. Le MkIII en question est équipé d’une lunette Winchester A5 pour souligner son excellence en tant que tireur d’élite mais rien ne laisse à penser qu’il ait utilisé une arme ainsi équipée. De plus, il n’y a pas de preuve historique que le MkIII ait été équipé dans cette exacte configuration.

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L’attitude de l’armée canadienne vis-à-vis des modifications de terrain pratiquées sur leur matériel est assez laxiste et aux antipodes de la philosophie d’inventaire rigide de l’armée régulière britannique. C’est une attitude assez détendue que partagent d’ailleurs d’autres colonies anglaises telles que l’Australie et la Nouvelle-Zélande. Les raccourcissements de crosse, montages de lunette et accessoirisassions diverses ne sont pas activement combattues et la place est laissée à l’inventivité des armuriers de section voir à celle du soldat lambda. Grâce à ce laisser-faire créatif, de nombreuses configurations de montage d’optique sur MkIII ont été réalisées sur le terrain dont un nombre non négligeable de montage à crochet allemands. On constate également des montages de lunettes flottantes type Winchester A5 auxquels presque toutes les nations ont recours à cette époque des débuts de la doctrine du tir de précision en application sur les théâtres de guerre. Les Français en feront sur leurs Lebels (peut-être également sur Berthier), les Anglais sur leur SMLE et P14, les Américains sur leurs 1903 et US17 et bien entendu les Canadiens sur les MkIII.

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Le montage de Winchester A5 sur Ross MkIII est notable car bien qu’étant une modification de terrain, il semble que des unités entières de tireur d’élite y ait eu recours à tel point qu’on constate un certain niveau de standardisation. Deux exemplaires documentés sont connus aujourd’hui. Un se trouve dans la collection d’un musée canadien, l’autre est présenté dans une vidéo de ForgottenWeapons : https://www.youtube.com/watch?v=QR30Ox-bcrI
 
La modification est plutôt simple :
-        Suppression de la hausse et montage de la Winchester A5 avec l’embase arrière vissée sur le tonnerre et l’embase avant vissée sur le canon. Ce montage est très similaire à celui fait par l’USMC sur ses Springfield 1903. L’ajout des embases rend la hausse inutilisable, c’est pourquoi elle est retirée.

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-        La crosse est raccourcie et le guidon est supprimé, l’absence de hausse le rendant inutile. Certains écrits mentionnent le fait que la crosse était raccourcie de manière à ne plus entrer en contact avec le canon au niveau de l’embouchoir. Sur un canon lourd comme celui du MkIII il est raisonnable de penser qu’un canon ainsi partiellement flottant donnerait un avantage en précision en limitant les occasionnelles irrégularités d’harmoniques dues à la mise en bois.

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Au-delà de ces modifications de terrain, l’ordonnance canadienne se mets à la page de l’empire britannique qui, dépourvu face aux nombreux Scharfschutzer allemands, démarrer son programme de formation et d’équipement pour tireurs d’élite. Cette volonté prend la forme d’un projet de modification de 500 MkIII pour recevoir une optique périscopique de fabrication Warner&Swasey. Une première commande de 250 optiques est passée le 11 Mars 1915, une deuxième le 19 Février 1916 ce qui place le programme canadien de développement d’une arme dédiée aux tireurs d’élite parmi les premiers après les Allemands. Le montage de cette encombrante et primitive lunette se fait toujours de la même manière : Un rail est vissé en trois points sur le côté gauche du tonnerre. Ce rail présente une section en queue d’aronde et deux encoches distantes de 3cm environ. L’embase de l’optique présente une encoche correspondante à la queue d’aronde du rail ainsi qu’une clavette montée sur ressort qui vient se verrouiller dans une des deux encoches du rail.

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Ce système de montage est quasi identique à celui employé par l’US Army pour équiper ses Springfield 1903 :

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A gauche un Springfield 1903, à droite un Ross MkII. Tous les deux sont des copies conformes des modèles de tireurs d'élite respectivement équipés d'une optique Warner&Swasey 1913


L’avantage de ce montage est qu’il est plutôt facile à réaliser. Trois percements sont à réaliser dont un au niveau du tonnerre et deux dans la paroi gauche du boitier. Un petit enlèvement de bois est également nécessaire pour l’installation du rail.
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L’optique périscopique Warner&Swasey :
Au courant de la première guerre mondiale, les choix d’optiques pour équiper les armes de tireurs d’élites sont limités à :
-        Diverses optiques allemandes dont les Oigee Luxor et autres Walter Gerard Charlottenburg. Associé à des montages à crochets, le réglage en élévation se fait via un tambour sur l’optique mais la dérive se fait via l’embase arrière. Les optiques allemandes sont alors considérées comme les meilleures du monde. Ce seront aussi de loin les plus abondantes durant la guerre. Grossement fixe variant selon les modèles de 2.5x à 4x. Le réglage du plan focal n’est pas systématique. Ces optiques sont relativement économiques, robustes, de très haute qualité optique et disponibles en quantité abondante sur le marché civil. Ces lunettes et ces montages se retrouvent un peu partout sous forme d’adaptation sur armes diverses et variées. On peut notamment citer les variantes du Steyr M95 équipés de lunette allemandes mais avec un montage à crochet spécifique dont le réglage de la dérive depuis l’embase avant.

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-        La Winchester A5 américaine. Issue de la tradition des optiques en tube flottant avec réglages extérieurs. Ces premières optiques sont des versions raccourcies et simplifiées des très longue optiques montées sur les Sharps à poudre noire pour le tir longue distance. On peut même en retracer l’origine jusqu’aux lunettes Davidson montées sur les Whiteworth de confédérés (la première application connue d’arme à lunette dans un conflit majeur). Ces lunettes sont de construction légère avec un grossissement fixe variant de 3x à 5x selon les versions. L’optique est très délicate et supporte très mal les chocs. Celle-ci est d’ailleurs montées flottante dans ses colliers de montage et maintenue en pression par ressort pour la protéger du recul. Au moment du tir la lunette ne suit pas le recul de l’arme et avance relativement à son montage, il convient de la remettre en place avant chaque nouveau tir. Le réglage se fait à la fois en élévation et en dérive via des molettes portant des pointeaux qui viennent déplacer le tube. Le réglage du plan focal se fait en tournant le support la lentille avant. Ces optiques sont économiques, légères et adaptables à toutes sortes de configurations. Elles sont toutefois excessivement fragiles et le rapport faible diamètre/longueur du tube optique donne un champ de vision très réduit. On vise plus ou moins à travers une paille.

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-        L’Atelier de Puteaux produit la lunette APX1915 à la demande de l’Etat pour répondre au besoin de matériel pour les tireurs d’élites. Cette optique d’un grossissement x3 subira quelques évolutions avec l’APX1917 plus courtes, puis l’APX1921 avec tourelle modifiée. Les techniques de montages sont diverses mais ne comporte pas de réglages. L’élévation se fait par la tourelle. Le réglage de la dérive se fait en desserrant le support de la lentille avant et en le tournant. Un réglage d’atelier pas vraiment reproductible sur le terrain. Ces optiques sont robustes même si un peu rudimentaires avec une technologie de lentille nettement en retrait des lunettes allemandes. La France reste l’utilisateur quasi exclusif de ces optiques mais il semble qu’un petit lot ait été vendu aux Italiens pour montage sur leurs Carcano 1891.

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-        Plus tard durant la guerre, les anglais introduiront des optiques de fabrication diverses avec des systèmes de montages tout aussi divers pour leurs SMLE et leurs P14. On peut citer les optiques Aldis et Prism Co comme les plus courantes. Ces lunettes d’excellente qualité s’apparentent aux optiques françaises APX dans le sens où elles ont un réglage de l’élévation depuis la tourelle et un réglage de la dérive via la rotation de la lentille avant. Le réglage de la focale se fait en translatant puis en sécurisant une lentille mobile situé légèrement en retrait de la tourelle. Les grossissements sont fixes et d’environ x3 ou x4. Ces optiques apparaissent à partir de 1916 et n’ont alors pas grand-chose à envier aux optiques allemandes si ce n’est des difficultés d’approvisionnement et un manque de standardisation dans les montages.

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La molette sous le corps de lunette cache la vis sécurisant le porte lentille coulissant permettant d'ajuster le plan focal

-        Les Italiens ont monté des optiques de fabrication La Filotecnica à Milan sur leurs Carcano 1891 au moyen d’un montage déporté reprenant le concept flottant à ajustements extérieurs de la Winchester A5 mais muni cette fois d’un ressort de rappel pour que l’optique revienne en place après le tir. Peu d’info ou de retours de terrain sur cette optique qui a visiblement été fournie à moins de 200 exemplaires.

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Ceci nous laisse avec la dernière alternative et peut être la moins bonne : la Warner&Swasey périscopique fabriquée à Cleveland dans l’Ohio.

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La firme Warner&Swasey fondée en 1880 est un des noms majeurs de la manufacture d’outils, machines et instruments de précision ayant façonné le paysage de la ville de Cleveland jusqu’à sa fermeture en 1980. La firme est plus connue encore aujourd’hui pour ses tours d’usinage de dimension industrielle et dans une moindre mesure pour ses instruments d’observation astronomiques. Elle a à son actif de multiples contrats pour divers instruments militaires d’usages divers. Si comme moi vous aimez les beaux instruments en fonte de laiton de la fin du 19ème siècle je vous invite à explorer leurs fabrications, de superbes objets! Parmi ces instruments figurent cette optique Warner&Swasey qui sera la seule tentative de la firme de réaliser une optique de tir.
Le première modèle dit 1908 est issu d’un concept dessiné par Ambrose Swasey, cofondateur de l’entreprise. Ce concept retient l’attention de l’US Army recherchant une solution pour équiper ses Springfield 1903. Ce concept sera également considéré par les Marines mais ils lui préfèreront la Winchester A5. Au total, 2075 exemplaires de la W&S Model 1908 seront produits et délivrés à l’US Army:
-        1000 unités en 1909
-        10 unités (?) en 1910
-        1065 unités en 1912
Sur ces 2075 unités, environ 450 unités équiperont finalement des mitrailleuses Benet-Mercié.

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Les optiques montées d’origine sur un 1903 ont le numéro de série de l’arme gravé de manière on ne peut plus explicite au niveau de l’encoche de l’embase.

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La lunette porte son propre numéro la situant dans la chronologie de production Warner&Swasey. Ce numéro se retrouve sur les inscriptions à gauche du corps principal de la lunette :

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Ainsi que sur le rail de montage et généralement quelques part sur l’arme.

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La Warner&Swasey est une optique dite prismatique, c’est-à-dire que l’axe de la prise de vue du tireur n’est pas colinéaire avec l’axe de sortie de la visée. Cette disposition plutôt inhabituelle permet d’employer un jeu de prismes internes en lieu et place des lentilles traditionnellement utilisées afin ″d’allonger″ la distance que doit parcourir la lumière depuis l’objectif jusqu’à l’œil. Cet allongement de la distance permet d’obtenir un facteur grossissement/encombrement de la lunette plus avantageux. Considérez par exemple que le modèle 1908 propose un grossissement x6, identique à celui de la Winchester A5 pourtant bien plus longue. Cette compacité permet aussi de proposer un champ de vision plus important car débarrasser de cet effet de tunnel handicapant l’A5.

Le Ross rifle Dsc01811

 Le corps principal de la lunette est en fonte de laiton au même titre que les pièces tenantes les lentilles avant aux deux extrémités de la lunette et tout le châssis interne tenant les prismes. Le piètement et les molettes de réglage sont en fonte d’acier et le tout est protégé avec une peinture noire.

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Le châssis portant les prismes faisant la fonction périscopique de la lunette. Celui-ci est solidaire du capot supérieur de la lunette, on remarque d’ailleurs les emplacements des vis


Le Ross rifle Ws_1710Le Ross rifle Ws_19010


Tous les réglages attendus du tireur se font sur piètement. Rien n’est réglable à l’intérieur même de la lunette. Le réglage en élévation est géré par la grosse molette à l’avant (1). Celle-ci est sécurisée par un écrou au centre qu’il faut dévisser. Cette molette est graduée de 0 à 3000 yards sur le modèle 1908 avec une balistique calée sur celle du 30-06.

Le Ross rifle Dsc01710
Ici sur une W&S 1913 avec un écrou en  croix


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Schéma  modèle 1913 mais identique en fonctionnement au modèle 1908. On voit ici sur le détail du bas comment le corps de la lunette est pivoté latéralement en étant entraîné par l’axe partiellement fileté de la molette de dérive (53). Également l’axe de zérotage (58).


Pour vous donner un ordre d’idée, les deux réglages extrêmes :

Le Ross rifle Ws_rzo10

La petite molette (2) sert à faire translater l’avant de la lunette le long d’un axe. En même temps, celle si pivote autour d’un axe (3). C’est ainsi qu’est réglé la dérive. La graduation est à lire en pouces.
L’axe (3) est fileté et dispose d’un écrou entre le piétement et le corps de la lunette. La lunette est mise en pression par un ressort ce qui la plaque sur l’écrou. Le fait de faire monter cet écrou permet d’ajuster le point bas de la lunette, autrement dit le zéro. Ce réglage était fait en atelier au moment de la conversion de l’arme et doit faire correspondre le point d’impact avec les distances indiquées sur la molette (1).
La Warner & Swasey trahit d’une part la culture de l’entreprise qui l’a conçue, plus habituée aux instruments de mesure de haute précision, et d’autres part le fait que ce matériel est un des plus précoces dans le cadre de la mise en application du tir de précision militaire. Cela se constate dans cette conception complexe s’apparentant plutôt à un télescope astronomique, mais surtout dans le fait que vous avez littéralement une table balistique gravée sur plaque de laiton au-dessus de la lunette.

Le Ross rifle Ws_1810

Les indications de la table balistique indiquent des valeurs en pouces qui sont à répercuter sur la molette de réglage de la dérive ou à estimer depuis le réticule.
1)    DRIFT : Ces indications vous permettent d’ajuster la compensation liée au décalage latérale de l’axe de visée par rapport à l’axe du canon. D’usine la lunette est réglée pour que ces deux axes soient sécants à 500 yards. La lunette étant décalée de 80mm environ par rapport au canon, le parti est pris de dire que la compensation en dessous de 500 yards est compris entre 0 et 80mm et est donc négligeable. Au-delà de 500 yards, l’impact va être de plus en plus à gauche de ce que vous visez. Par conséquent, il faut déplacer le réticule vers la droite. A 1000yards (823m) la compensation est de 18" (457mm), déjà pas négligeable. A 3000 yards (2750m) cette compensation atteint 550" (13.97m)!! Les joies du montage déporté.
2)    WIND CORRECTION 3 OR 9 O’CLOCK – 1 MILE PER HOUR : Cette table vous donne les corrections latérales à observer dans le cas d’un vent perpendiculaire soufflant à 1.6km/h. Les ajustements correspondants sont donnés en pouces. Il est considéré ici que l’augmentation de la vitesse du vent et la correction à appliquer sont proportionnels. A 3000 yards et pour un vent de 1mph, la correction sera de 3.33" (85mm). A 3000 yards toujours, un vent de 10mph nécessitera une correction de 85cm).
3)    RANGE CORRECTION : Celle-ci est fantaisiste au point que l’on puisse se demander si des tireurs ont été consultés préalablement. Il s’agit ici, pour les distances listées allant de 500 à 3000 yards, d’analyser la différence de point d’impact en cible pour corriger l’estimation de distance. Pour la distance estimée à laquelle vous engagez une cible, disons 1000 yards (915m) si vous manquez votre cible et estimez que votre point d’impact est trop bas de 10" (25cm) alors cela veut dire que votre estimation de distance est 10 yards (91.5cm trop courte). Inversement si votre impact est trop haut de 10" alors votre estimation doit être réduite de 10yards. Bien que la fonction liant la distance à la correction ne soit pas linéaire, les intervalles donnés doivent permettre d’extrapoler pour retrouver votre erreur d’estimation. Soyons honnêtes, ces indications sont quasi inutiles en situation de combat. Au mieux cela a pu servir pour le réglage de l’optique au moment du montage, et encore…
Toutes ces corrections nécessitent des estimations de distances. Or, cette optique est remarquablement avant-gardiste sur ce point. Le réticule est une simple croix mais comporte trois petits traits parallèles à la barre horizontale.

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Ces 3 barres sont utilisées pour estimer la distance d’une manière remarquablement similaire à celle employée sur les optiques PSO-1 russes. Une plaque supplémentaire vous permet d’utiliser ces trois marques.

Le Ross rifle Dsc01813

La hauteur de référence est de 68" (1.727m) soit la hauteur d’un homme moyen à placer entre la barre principale du réticule et une de ces trois barres. La barre la plus à gauche donne la référence pour 1000 yards, puis 1500, puis 2000 yards. Ils ont au moins eu la présence d’esprit de réalisé qu’une telle référence à 3000 yards serait inutile car impossible à voir!
Ces premiers modèles accusent cependant de sérieux problèmes et les premiers utilisateurs sur le terrain n’en tombent pas franchement amoureux :
-        Malgré une relative compacité, surtout en longueur, le tout accuse un poids conséquent et plus du double de la Winchester A5. Pire la position déportée (environ 80mm à gauche d l’axe du canon) induit un déséquilibre permanent de l’arme. Un effort supplémentaire doit être fait pour empêcher l’arme de basculer ce qui est tout sauf souhaitable pour le tir de précision.
-        Certes pas limité à la W&S car partagé par toutes les lunettes déportées tel que l’APX française, la quasi-impossibilité d’obtenir un appui stable de la joue. On se retrouve à positionner le menton contre le côté de la crosse comme seul point de référence.
-        Le montage déporté à également pour effet d’induire une variable de point d’intersection entre l’axe de visée et l’axe du canon qui varie avec la distance de la cible. La doctrine demande au soldat de prendre en compte un réglage de la dérive pour compenser et assurer une concordance entre les deux axes en fonction de la distance d’engagement. En pratique, les tireurs règlent l’optique de manière à ce que les deux axes soient parallèles et tiennent compte d’un décalage permanent de 80mm en latéral correspondant au décalage de la lunette sur l’arme. Ce décalage est peu problématique sur une cible à taille humaine. Une référence visuelle permet de déplacer le réticule de 80mm vers la gauche pour les cibles nécessitant plus de précision.
-        L’optique est non scellée et très sensible à la moisissure et à la condensation.
-        Si la construction générale de l’optique est tout à fait solide, le châssis supportant les prismes ne l’est pas et les prismes ont tendance à prendre du jeu.
-        L’optique est peinte à l’intérieur pour tenter de ralentir la formation de patine verte. Sauf que cette peinture a tendance à faire des flocons qui viennent se déposer sur les prismes ou sur les lentilles et deviennent de véritables briques dans le champ de vision après magnification. Ce défaut nécessitait des nettoyages quasi routiniers des lentilles avec démontage à la clé, très pénible sur un terrain d’opération.
-        La distance oculaire est très faible, environ 38mm. Avec l’ergonomie douteuse due à la lunette déportée et le recul du 30-06, le tireur coure un risque réel d’être blessé par son optique. Afin d’y remédier, une bonnette en caoutchouc caractéristique est ajoutée afin à la fois de protéger l’œil du tireur mais aussi de lui donner un point de référence physique pour se placer à une distance optimale pour la prise de visée.
-        Mais le caoutchouc de l’époque est très loin de la souplesse d’aujourd’hui et les tireurs se plaignent de subir de manière permanente des impacts de la bonnette plutôt que l’occasionnel impact de la lunette. C’est pourquoi on retrouve aujourd’hui beaucoup de ces bonnettes coupées. Un autre problème de ces bonnettes c’est qu’elles sont tout de même suffisamment souples pour se ventouser occasionnellement au visage du tireur. Les trous que l’on voit percés (généralement trois) dans la bonnette sont une modification de terrain d’abord puis d’usine sur le modèle 1913 afind e contrer cet effet. La W&S de mon 1903 est équipée de sa bonnette d’époque ce que j’apprécie d’un point de vue collection mais proscrit le tir pleine charge. Le caoutchouc est désormais dur comme du bois, l’expérience est déplaisante.
-        La méthode de montage est mal conçue. Pour permettre le démontage de la lunette qui nécessite de translater le piètement sur toute la longueur du rail, un jeu doit être laissé entre la queue d’aronde du rail et l’encoche du piètement. Or, ce jeu se retrouve une fois l’optique en place. J’ai pu confirmer qu’il est tout à fait possible de faire bouger la lunette de droite à gauche d’environ 5mm en position "verrouillée". Ces 5mm valent bien entendu plusieurs mètres en cible et paraissent tout à fait inacceptables aujourd’hui. La clavette sur ressort parvient en revanche à éliminer le déplacement de la lunette le long du rail. Ne trouvant pas de solution concrète, l’ordonnance américaine donne comme excuse le fait que la lunette, étant déportée, son poids la force à se mettre en appui sur le rail d’une manière répétitive et que le jeu peut donc être ignoré. L’inventivité viendra comme bien souvent des tranchées. Deux types de bricolage sont constatés. Le premier relativement accepté des officiers consiste, ajouter une vis sur le côté du piètement. Cette vis permet de mettre en pression l’encoche du piétement contre le rail. La deuxième modification désapprouvée par les officiers consistait à mettre des lames de rasoir dans l’encoche du piètement et à les laisser rouiller. Ces lames de rasoir forment une cale permettant d’éliminer le jeu de montage au prix d’une optique devant être mise en place parfois au maillet ce qui n’est pas trop recommandé.
-        Le corps de la lunette vient empêcher l’utilisation du cut-off et de la sécurité. Il faut démonter la lunette à chaque utilisation.
-        La bonnette avec sa forme de cornet gêne fortement la manipulation du verrou. Il est nécessaire d’utiliser la main faible pour écarter la bonnette du passage du levier de culasse.
Un matériel avec énormément de défauts mais représentant, il ne faut pas l’oublier, une des toutes premières tentatives à la standardisation d’une optique militaire. Qui plus est de la part d’une firme dépourvu d’expérience préalable dans le domaine.
Ces lunettes ont été fournies avec un étui un cuir rectangulaire incluant les outils pour le démontage des objectifs et du capot supérieur. Une bretelle de transport ainsi qu’une agrafe pour fixation au ceinturon sont fournis avec. Les étuis sont fabriqués soit par Rock Island Arsenal soit par la Diamond D Company.

Le Ross rifle Ws-m1910
Modèle 1908 avec corps de lunette arrondi sur le dessus, écrou rond sur la molette d'élévation. Ici avec la bonnette coupée come souvent


En 1913, l’US Army renouvelle l’expérience avec une commande de 5730 unités d’un modèle amélioré de la Warner&Swasey.

Le Ross rifle Ws-mod10
Modèle 1913


Les changements visent à améliorer certains des défauts de jeunesse du modèle 1908 :
-        Forme globalement plus anguleuse traduisant une construction plus robuste du capot et du châssis pour les prismes.
-        Grossissement revu à x5.2.
-        Ecrou de verrouillage de la molette d’élévation en forme de croix pour pouvoir être desserré à la main.
-        La bonnette est maintenue mais les percements pour éviter l’effet potentiel de succion sont faits d’usine.
Ces modifications sont plutôt superficielles et ne parviennent pas à cacher les défauts inhérents à la conception de cette optique primitive. Sur les 5730 exemplaires commandés, seuls 1530 seront livrés courant de la première guerre mondiale et montés sur des 1903. Le reliquat sera vendu au surplus courant des années 30 et constitue la majorité des exemplaires que l’on peut trouver aujourd’hui. Seuls les 1903 de fabrication Springfield seront équipés de ces lunettes, pas les Rock Island.
 
La première utilisation documentée de ces 1903 Warner&Swasey est l’expédition punitive de 1916 menée durant la révolution mexicaine par l’US Army à l’encontre des révolutionnaires de Pancho Villla. A noter qu’en plus de la Warner&Swasey, une autre innovation de taille équipera en quantité les 1903 des tireurs d’élites américains. Il s’agira d’une des rares occurrences connues d’utilisation des silencieux Maxim sur 1903 au combat. La bande à Villa fera face avec ses Krags, ses Winchester 1895 et une poignée de Mausers à des tireurs entraînés équipé du nouveau 1903 monté avec optique et silencieux. Un rapport de force un tant soit peu inégal.

Le Ross rifle Maxim610

Les 1903 équipés de Warner&Swasey seront retirés du service vers le milieu des années 20. Ils seront remplacés durant la deuxième guerre mondiale par des 1903A1 montés avec optique Unertl x8 descendantes directe de la Winchester A5 utilisée par les Marines.
 
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La Warner&Swasey 1913 sur Ross MkIII :


Le Ross rifle Canadi10

Les 500 Warner&Swasey 1913 commandée par le Canada en vue d’équiper ses tireurs d’élite sont largement identiques aux américaines et ne différent qu’en deux points :
 
-        La molette d’élévation est graduée pour la balistique du 303Bbritish et ne va que jusqu’à 2300 yards au lieu des 3000 yards de l’américaine.
-        La table balistique ne sera pas adaptée du 30-06 vers le 303Brit et sera purement supprimée. Seul restent les plaques de compensation du désaxement entre axe visée et axe canon (idem 1903) et d’utilisation des repères du réticule.

Le Ross rifle Pix21212
Il est raisonnable de penser que ces optiques pour le Canada étaient des 1913 standards convertis étant donné que les percements pour la plaque balistique sont toujours présents. On espère simplement que les trous auront été rebouchés au risque d’une étanchéité plus que douteuse


A l’instar des lunettes américaines, un numéro commun est présent sur le corps de la lunette et sur le rail. Le rail ressemble fortement à celui du 1903 mais ils ne sont pas interchangeables. Le numéro de la lunette est également gravé sur la droite de la crosse.

Le Ross rifle Rails_10

L’étui cuir est différent pour ces W&S canadiennes et l’ensemble des informations marquées sur la crosse de l’arme sont inscrites dessus.

Le Ross rifle Canada10
Warner&Swasey 1913 contrat canadien avec son étui cuir. On y devine le numéro de série de l’arme, l’année de fabrication, le numéro à trois chiffres commun entre arme et lunette et les marquages de section
 
L’association de la Warner&Swasey avec le Ross MkIII souffre de presque toutes les mêmes tares que sur le 1903 :
-        Il n’est pas non plus possible d’utiliser le cut-off qui est gêné par le corps de la lunette.
-        Le montage est instable et les mêmes bricolages de terrain seront pratiqués dans l’armée canadienne.
-        L’ergonomie et l’équilibre de l’arme est désastreuse.
-        S’ajoute le fait que la hausse ne peut plus être dépliée ou repliée avec la lunette en place. On devine ce conflit sur la photo suivante :

Le Ross rifle Pix08410

En revanche la culasse n’est pas gênée par la lunette. Certains écrits racontent que l’action rectiligne rapide associée au fait que la lunette soit déportée sur la gauche permettait aux tireurs de placer leur tête sur le côté de la crosse et d’actionner la culasse sans jamais quitter le réticule de l’œil avec à la clé la possibilité de suivre les impacts en cible. Malgré les défauts de l’optique, cette combinaison gardera la préférence des tireurs d’élite jusque dans la deuxième guerre mondiale où la précision du Ross MkIII reste inégalée. De nombreuses photos de MkIII de sniper sur le terrain les montrent avec les bois coupés jusqu’au niveau de la grenadière. Cette modification très répandue semble avoir les mêmes justifications que celle pour les exemplaires montés avec Winchester A5 comme discuté précédemment. Cette modification est presque uniquement attribuée à la 1ère Division.

Le Ross rifle I103410
A noter sur cette pose photo d’un groupe de la 1ère division canadienne, les bois raccourcis de ces 4 Ross MkIII W&S


Il n’y a pas beaucoup d’images d’époques du Ross MkIII de sniper mais il existe un court segment d’une vidéo d’archive intitulée Cambrai 1917. De 1:25 à 1:48 on y voit un jeune tireur utilisant sont MkIII sniper et semblant bataillé plus avec son chargeur, sa bonnette et son couvre-chef qu’avec l’ennemi. Vu sa relative nonchalance dans l’exercice on peut penser qu’il s’agit d’un tir de démonstration.
 
https://www.youtube.com/watch?v=XawFlopJvO8
 
N’ayant rien d’historique mais valant selon moi tout de même la peine d’être signalé, le film russe « Sniper – The Art Of Killing » de 1931. Le titre laisse présager de la qualité du média et on n’est pas déçu de ce côté-là… Cependant le héros, un tireur d’élite, y utilise tout le long du film un Ross MkIII apparemment équipé d’une lunette allemande sur montage à crochets plutôt réaliste.

Le Ross rifle Sniper11

Configuration qui a très certainement été pratiqué par l’un ou l’autre armurier de section canadien. Le MkIII fait quelques autres apparitions durant le film en version visée ouverte. Mieux encore, ce film est disponible en version intégral sur Youtube. Enjoy! 
https://www.youtube.com/watch?v=v-ij45rEsnI

Le Ross rifle Sniper10 

Certaines de ces 500 Warner&Swasey canadiennes seront recyclées pour être monté sur des P14 durant la seconde guerre mondiale, l’avantage étant que la balistique du 303 British était déjà prise en compte par l’optique.

Le Ross rifle 9632c210

Sur les 500 exemplaires produits du MkIII W&S, très peu survivent en configuration d’origine. Il existe bien plus de reproductions de cette configuration que d’originaux. On dénombre 8 exemplaires de MkIII W&S connus dont 6 en collection de musée canadiens, anglais et écossais, 2 en collection privée. Parmi ces 8 exemplaires, un seul possède encore sa lunette au même numéro, il se trouve dans la collection du Royal Winnipeg Rifles Regimental Museum au Manitoba, Canada. Les 7 autres sont des MkIII originaux auxquels ont été associé des lunettes du contrat canadien mais pas au numéro. Etant donné que 7805 lunettes sous contrat américain ont été produites contre 500 sous contrat canadien, la vaste majorité des remontages sur MkIII standard sont faits avec des Warner&Swasey graduées pour le 30-06. D’après mes sources, moins de 10 copies existent avec des optiques Warner&Swasey d’origine canadienne.


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Message  seschomaru Dim 30 Jan 2022, 01:49

-------------------------- Le retrait du MkIII et la fin de la firme Ross -----------------------
 
Remontage erroné de la culasse :
 
Les premiers incidents graves avec le MkIII arrivent à l’entraînement peu après le débarquement en France. Il est découvert que la culasse peut être remontée de manière incorrecte de telle sorte que la tête de culasse ne pivote pas une fois en batterie. Ce défaut transforme essentiellement l’action rectiligne du Ross en un mécanisme à culasse non calée… en 303 British. Le tir a alors pour effet d’expulser la culasse sur la totalité de son débattement avant que l’arrêtoir de culasse ne vienne impacter les tenons et, normalement, la stopper. Seulement selon la position de tir, cela place la tête sur le chemin de la culasse propulsée à haute vitesse représentant ainsi un danger de blessure grave pour le tireur. On ne connaît pas bien la fréquence ave laquelle cet évènement est arrivé, combien ont été blessés, avec quelle gravité ou s’il y a même eu des morts. Les retours sporadiques laissés par écrit par l’ordonnance canadienne suggèrent en réalité moins de 20 occurrences dont ont résulté une dizaine de blessé sérieux et apparemment un décès.

Cependant, si à l’échelle des 240 000 armes commandées ces évènements paraissent quasi anecdotiques, ils sont spectaculaires et les nombreux détracteurs du Ross dans les hautes sphères du pouvoir ne se privent pas de déclarer le MkIII comme une bonne à retardement et une honte pour quiconque est impliqué dans son adoption. Par effet médiatique, une arme dont la culasse peut, sous des circonstances très précises, être mal remontée et occasionner un danger pour le tireur devient une arme qui explose littéralement sans prévenir et sans raison. La machine médiatique fait remonter la chose jusque dans les sphères politiques de l’empire britannique et la pression est désormais sur Charles Ross et celui qui aura tant poussé pour faire adopte cette arme, Samuel Hughes.

Pour rappel, Samuel Hughes est promu à la fonction de ministre de la Défense et de la Milice en 1911. Ses nouvelles fonctions lui permettront de peser considérablement en faveur de l’adoption du MkIII de son ami Charles Ross. Il fera notamment parti de toutes les commissions chargées de l’évaluation du Ross. Un conflit d’intérêt évident qui n’a pas eu l’air d’inquiéter grande monde… Lorsque la nouvelle des accidents survenus avec le MkIII arrive à ses oreilles, sa première réaction, peu surprenante, est le dénie. Après maintes difficultés la chose lui est démontrée comme provenant d’un mauvais remontage de la culasse. Il conclura officiellement, lettres à l’appui, que ces occurrences sont liées à un manque de compétence et de jugeote de la part du soldat et que des formations spécifiques doivent être mises en place pour éviter la possibilité de ce mauvais remontage. Ross sera un peu plus pragmatique dans son approche et proposera rapidement une modification de la culasse, réalisable au niveau de l’armurier de section, empêchant le mauvais remontage de la culasse.

Ce problème est résolu mais le manque de confiance s’installe envers le MkIII qui pose déjà problèmes avant même d’avoir vu le combat. Cela ne va en rien aider les choses une fois que le réel problème sera rendu apparent.

Raisons du mauvais remontage et identifier le risque :


Le Ross rifle Bolt_310

   
Comme on l’a vu, la culasse du Ross fonctionne avec un corps de culasse creux dans lequel sont usiné des stries interrompues disposées de manières hélicoïdale. La tête de culasse présente des cannelures, hélicoïdales également, interrompues sur la moitié de leur longueur. Lorsque les deux sont assemblés, l’action du ressort du percuteur tend à vouloir replier la tête de culasse dans la position verrouillée. Dans l’arme, la tête de culasse est bridée par le boitier en position ouverte (tenons horizontaux) jusqu’à ce qu’elle atteigne le tonnerre. Les tenons sont alors libres de pivoter en position verticales, sécurisant la culasse pour le tir. A l’instar de la culasse du Mannlicher M95, ce fonctionnement se remarque par le fait que la culasse hors de l’arme a tendance à rabattre la tête de culasse en position fermée au moindre choc. Contrairement au M95, il est facile de la faire tenir en position ouverte pour le remontage sur le Ross car le ressort de rappel est gérable pour un humain normalement constitué... Le problème de la culasse du MkIII est qu’il est possible de remonter la tête de culasse sans que les cannelures n’engagent les rainures du corps de culasse. On se retrouve donc avec une culasse dont la tête est complétement rentrée sans possibilité de pivoter. Pour un œil non attentif ou non familier du système, il est possible d’introduire la culasse de cette manière sans réellement détecter le problème. En revanche, cette configuration entraîne une résistance anormale de la culasse dont le ressort tente de rabattre la tête sans que celle-ci puisse pivoter. La résistance occasionnée est tout à fait anormale compte tendu de la grande fluidité qui caractérise l’action du Ross. Si à ce stade, rien d’anormal n’est relevé par l’utilisateur, il reste possible de détecter visuellement le fait que les tenons n’ont pas pivoté bien que la culasse soit en batterie. Cependant cela exige une attention qui aurait sans doute évité les erreurs précédentes et le danger d’accident est désormais imminent.

Le Ross rifle Bolt_d10
De haut en bas : Culasse mal remontée / Culasse correctement remontée

Le premier indice visuel confirmant un mauvais remontage est la longueur de la tête de culasse dépassant du corps de culasse. Normalement, on voit clairement quelques 20mm séparant le corps de la culasse des tenons. Si l’arme est mal remontée, cette distance est nulle. A noter qu’il est également possible, même si difficile, de rétracter la tête de culasse dans la mauvaise position sans démonter toute la culasse.
 
L’erreur de Ross ici est de ne pas avoir considéré une des premières règles à appliquer lors de la conception d’un matériel, outil ou tout autre objet adressé à l’usage militaire. Il ne s’agit pas tant de s’assurer de fournir un système qui fonctionne mais d’avoir passé en revue et corrigé toutes les manières dont le système pourrait être mal utilisé. Le nombre d’interactions que les utilisateurs vont avoir avec le système garantit que tout défaut aussi minime ou improbable soit-il finira par être découvert avec des conséquences plus ou moins graves.
 
La modification effectuée rapidement par Ross pour palier à ce problème consiste à ajoute une goupille sur le corps de culasse. Cette goupille sert d’arrêtoir agissant sur les cannelures de la tête de culasse si celle-ci venaient à être inséré dans la mauvaise position, empêchant ainsi le remontage. Une solution simple et pouvant être mis en œuvre au niveau du régiment. A compter de la validation de cette mesure tous les MkIII recevront cette modification en usine et la plupart déjà livrés seront convertis. Gardez à l’esprit qu’il est néanmoins possible de rencontrer des exemplaires ayant échappé à cette correction. Ceux-ci sont très remarquables par l’absence de la goupille.

Le Ross rifle Bolt_p10
Goupille empêchant le remontage incorrect de la culasse


Pour résumer, la plupart des exemplaires de MkIII rencontrés ne posent aucun risque et même si vous avez affaire à un exemplaire non sécurisé, un remontage de la culasse avec un minimum d‘attention vous évitera tout problème.
 
L’ami Ian McCollum, a réalisé une excellente vidéo très démonstrative dédiée aux causes et surtout conséquences de ce mauvais remontage :
 
https://www.youtube.com/watch?v=EaSui_UqDX8
 
Incompatibilité des cartouches de fabrication anglaises :
 
22 Avril 1915, une position défensive est établie un peu à l’est de la ville d’Ypres en Belgique par deux divisions françaises, dont une coloniale. Vers 17h00 un nuage jaunâtre se dresse à quelques centaines de mètres depuis la position allemande. Porté par le vent ce nuage semblant ne jamais monter de plus de deux ou trois mètres avance et remplit les tranchées françaises. Presque immédiatement les hommes étouffent, les poumons en feu et les yeux voilés par les larmes. 6000 hommes trouvent la mort en moins de 10 minutes, les survivants escaladent et abandonnent la position dans la panique et sous un feu ennemi nourris. Nombre d’entre ces rescapés mourront peu de temps après de séquelles pulmonaires. D’autres garderont à vie les traumatismes physique et psychologique de cette journée. Dans un effort de briser le statu quo de la guerre de tranchées, les Allemands mettent en œuvre la première attaque au gaz de chlore.
 
La fuite des Français laisse une brèche dans la ligne de défense. Les Allemands s’y engouffrent tentant tant bien que mal d’éviter les effets de leur propre gaz. La première division canadienne s’engage dans sa première bataille depuis qu’ils ont posé pied en France. Ils montent prestement une ligne de défense avec postes de mitrailleuse. Les attaques de gaz allemandes reprennent sur leur position. Dans un éclair de lucidité il est ordonné aux hommes d’uriner sur des bandages et de s’en couvrir la bouche et le nez pour combattre tant bien que mal les effets du gaz. La première division tiendra la ligne de défense avec bravoure contre l‘assaut allemand jusqu’à ce qu’il cesse finalement le 3 Mai. La division initialement forte de 10 000 hommes en sort amoindrie de 1000 décès et près de 5000 blessés.

Le Ross rifle Batail10
Représentation picturale du régiment d’Infanterie Légère de la Princess Patricia lors de la deuxième bataille dYpres du 22 Avril (tableau de Richard Jack). Quelques SMLE au premier plan, une Colt 1895, des Ross MkIII pour les autres.

Si on peut imaginer l’enfer d’un combat de tranchée de 10 jours à devoir gérer les effets encore mal connus de cette nouvelle arme chimique, on a peine à imaginer ce que cela doit être quand en plus votre fusil vous trahit et refuse de faire feu. Les Canadiens se retrouvent pour beaucoup incapables de fermer leurs culasses et faire feu dans ce moment crucial. Il sera plus tard identifié que les Anglais et les Canadiens sont désormais amenez à partager leurs stocks de munitions de 303 British. Les munitions de fabrication canadienne sont réputées parmi les meilleures de l’époque. Produites non seulement avec une grande régularité de la charge de poudre et du poids d’ogive mais aussi et surtout des tolérances réduites des dimensions d’étuis. Les tireurs d’élites canadiens et même anglais en particulier sauront apprécier la qualité de ces cartouches. On ne peut pas émettre les mêmes éloges à l’égard des munitions anglaises dont les contrôles de dimensions sont quasi inexistants. Quiconque a déjà tiré au Lee-Enfield pourra attester de la différence flagrante de forme entre une cartouche neuve et un étui tiré. L’argument est souvent donné que la forme excessivement généreuse de la chambre des Lee-Enfield est supposé supportée une accumulation de débris et permettre le chambrage quoi qu’il arrive. En réalité, cette chambre taillée très large, notamment au niveau de l’épaulement, est sensé accommoder la grande variabilité des cartouches anglaises. Le Ross pendant son développement, ses essais, son service en Canada ainsi que durant les premières phases de la guerre ne sera exposé qu’aux munitions canadiennes avec lesquelles il donne satisfaction.

Les armes à culasse linéaire supportent particulièrement mal les défauts de chambrage. Sur une arme à verrou il suffit de frapper le levier de culasse fermé ou ouvert selon ce que l’on veut faire. Sur une arme à culasse linéaire, cette rotation est transmise par ce qui est essentiellement une came et la force qu’on y applique se transmet mal.  Ceux qui ont rechargé pour un Schmidt-Rubin ont déjà dû rencontrer le cas d’un étui trop long ou recalibré partiellement qui ne chambre pas. On arrive parfois à fermer la culasse en frappant le levier vers l’avant mais il arrive que cela reste impossible même avec la meilleure volonté du monde. La solution est alors de frapper la culasse vers l’arrière pour extraire la cartouche défectueuse mais cela s’avère parfois tout aussi difficile à cause de cette incapacité à agir directement sur la rotation de la tête de culasse. Sur un pas de tir on tâche de respecter un tant soit peu le matériel et on utilise un bout de bois. Les Canadiens eux dans le feu de l’action mettent leurs MkIII à la verticale, canon vers le haut et mette un grand coup de botte sur levier de culasse afin d’extraire cette satané cartouche et faire coopérer ce satané Ross. Ce geste parvient à forcer l’extraction et à ouvrir la culasse mais il a aussi pour effet de propulser la culasse, et en particulier le premier tenon de verrouillage gauche, contre l’arrêtoir de culasse mesurant à peine 8x3mm environ.

Le Ross rifle Bolt_s10

On découvrira bien plus tard qu’un lot important de tête de culasse ont subi une trempe insuffisante à cause d’un lot d’acier dont les caractéristiques dévient de celles exigées par Ross. Le tenon se déforme légèrement sous l’effet de l’impact. Si par chance la cartouche suivante dans le chargeur est aux bonnes cotes, c’est maintenant le tenon de verrouillage déformé qui ne trouve plus son logement à l’usinage si précis. Le tireur répète l’opération, aggravant les dégâts jusqu’à ce que l’arme soit abandonnée par frustration au profit si possible d’un SMLE prélevé sur un camarade anglais déchu. Tel est l’ennui des soldats de la première division ainsi que du reste de l’armée canadienne qui fait face à ce problème pendant des mois le temps que la cause puisse être identifiée.

La débâcle sera cinglante. La première division sortant de l’expérience traumatique de la seconde bataille d’Ypres jette purement et simplement ses Ross en signe de protestation, exigeant des SMLE en remplacement. Eu égard à leurs exploits héroïques ils seront accommodés. Mais le problème reste omniprésent dans le reste de la force armée canadienne. Les soldats se débarrassent de leurs Ross et tentent par tous les moyens de se munir d’un Lee-Enfield en allant parfois jusqu’à les dérober discrètement aux anglais. Le haut commandement exige des sous-officiers qu’ils interdisent et punissent la pratique mais le cœur n’y est pas car aucune solution n’est donnée en alternative.
 
Pour sa défense Ross fera tout ce qui est en son pouvoir pour déterminer l’origine du problème et proposer une solution. Mais les rapports d’incidents sont transmis depuis le front par des officiers excédés par ce Ross qui a déjà causé tant de problèmes et relayés à nouveau plusieurs fois jusqu’à l’état-major canadien pour finalement arriver jusqu’à Ross. L’incrimination des munitions anglaises mettra des mois à être établie. Les têtes de culasse à la trempe défectueuse, près d’un an. Dès qu’il est entendu que les chambres doivent être revues, une fraise de chambre est immédiatement mise au point pour assurer un chambrage même de la pire cartouche anglaise imaginable. Cette fraise est appliquée sur toutes les armes sortant de la chaîne de montage et envoyée à tous les armuriers de section sur le front. Les armes ainsi modifiées présentes un poinçon LC pour "Large Chamber" sur le tonnerre ou juste devant. Le lettrage peut être différent selon que la modification a été faite en arsenal ou sur le terrain.

Le Ross rifle 18_l_c10
Ici sur un MkIII de la première commande. Le lettrage légèrement stylisé indique une probable modification en arsenal

Le Ross rifle Dsc02240Le Ross rifle Dsc02239
A gauche : Etui fireformé dans une chambre "LC", à droite : étui neuf


Cette mesure est efficace et assure un fonctionnement fiable des armes ainsi modifiées. Malheureusement il est bien trop tard, la confiance est définitivement rompue entre les soldats canadiens et le Ross. Personne ne pourra dès lors être convaincu qu’il s’agit du dernier problème.
 
Samuel Hughes, tout à fait au courant de la situation, refusera obstinément de reconnaitre un défaut de conception de l’arme. Sir Edwin Anderson, commandant en chef de la force expéditionnaire canadienne écrira personnellement à Hughes pour lui faire part des problèmes et l’encourager à retirer prestement le MkIII du service. Hughes l’accusera d’ignorance et portera l’échange à l’attention d’autres officiers importants à titre d’avertissement. La presse de tout l’empire britannique et toute la classe politicienne canadienne s’empare de l’affaire et de la position désastreuse de Hughes. Devant l’obstination de Hughes, Edwin Anderson démissionne de ses fonctions. Il est remplacé en juillet 1916 par Sir Douglas Haig qui donne, immédiatement et indépendamment de l’avis du ministère, l’ordre de remplacer tous les Ross par des Lee-Enfield n°1 MkIII (SMLE) désormais disponibles en quantités. Hughes tentera bien sûr par tous les moyens de discréditer Haig allant jusqu’à l’accuser de trahison. Devant la polémique, le premier ministre n’a d’autre choix que de remercier en novembre 1916 son ministre de la Défense et de la Milice qu’il eut autrefois compté parmi ses amis proches.
 
Le Ross MkIII est officiellement retiré du service fin 1916 après juste 5 ans d’adoption et 1 an d’utilisation sur théâtre de guerre. Charles Ross jouera de son influence pour argumenter que les défauts rencontrés par son MkIII sont la conséquence d’un cahier des charges initial n’ayant jamais requis une tolérance aux munitions anglaises. Il obtient gain de cause début 1917 et sera compensé d’une somme de 2 millions $, soit 51,15 millions de $ ajustés pour inflation. Soit également trois fois l’investissement initial de son usine, une bonne affaire au final! Les parachutes dorés ne datent pas d’hier…
 
Les tireurs d’élite conserveront précisément leurs MkIII et les utiliseront avec succès pendant le reste de la guerre et jusqu’à la deuxième guerre mondiale.
 
L’usine Ross est réquisitionnée par le gouvernement et devient la Dominion Rifle Factory qui assumera dès lors les projets de développement d’armement canadien et l’entretien de l’inventaire de l’armée. Ross ne reprendra pas d’activité armurière et voyagera de par le monde jusqu’à sa mort le 29 juin 1942.
 
En à peine plus de 15ans, la boucle est bouclée. De l’impossibilité d’acquérir des Long-Lee à l’issu de la guerre des Boers, à l’adoption d’une arme de conception et fabrication canadienne, pour finalement revenir au Lee-Enfield qui servira le Canada avec succès pendant de longues années.

Le Ross rifle Dsc02241

En vue de réaliser son rêve d’offrir à son pays l’arme de service parfaite, Ross aura tenté d’imposer sa vision de l’arme de match qu’il aurait voulu avoir avec lui dans les grandes plaines d’Afrique du Sud pour engager les Boers au-delà de 800m. Vendant initialement son Ross comme plus simple, plus fiable, plus précis, plus léger que le Long-Lee, Ross n’anticipera pas la rudesse des tranchées et son arme évoluera pour devenir un MkIII, trop long, trop lourd, horriblement cher et capricieux au point de rester encore aujourd’hui un des grands scandale ayant marqué l’histoire militaire canadienne.


Dernière édition par seschomaru le Lun 31 Jan 2022, 21:29, édité 1 fois
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Le Ross rifle Empty Re: Le Ross rifle

Message  seschomaru Dim 30 Jan 2022, 01:54

----------------------------------- Le Ross hors du Canada ----------------------------------
 
Sur les 420 000 Ross fabriqués, il est estimé que pas moins de 342 000 finiront par être achetés par l’Angleterre. Durant sa période de service de 1900 à 1916, le Ross ne fera l’objet d’aucune commande étrangère (à la seule exception d’une acqusition anecdotique de 500 MkI par la Chine en 1911). Au retrait du service fin 1916, le Canada se retrouve avec un stock important de Ross composé majoritairement de MkIII et de MkII 3*. Cet inventaire fera l’objet de quelques commandes officielles documentées et ces armes voyageront à travers le monde jusque dans les années 50 en tant qu’aide de guerre pour divers conflits mineurs.
 
US :
Les Etats-Unis passent une commande pour 20 000 MkII 3* en 1917. Ceux-ci seront délivrés jusqu’à 1918. Cette commande comprend 16 000 MkII 3* ainsi que les 4 000 MkII 4* qui seront convertis en 3* avant la livraison. Ces exemplaires sont commandés avec baïonnettes, manuels, bretelles, munitions et pièces de rechange. Ils seront uniquement utilisés pour l’entraînement. L’intention est de libérer autant de 1903 que possible en vue de l’effort de guerre en France. Cette intention de commande est initialement relayée par l’adjudant-général de la ville de New York. L’état de New-York fera l’acquisition de 10 000 exemplaires issus de cette commande afin d’équiper sa garde civile. Les armes restantes seront récupérées par l’US Army et partagé entre les Camp Sherman, Ohio et Camp Devens, Mass à  hauteur de 5000 exemplaires chacun.
 
Les exemplaires récupérés par la ville de New-York présentent parfois un marquage NY sur la crosse. Les exemplaires acquis par l’US Army ont un marquage distinctif US avec le logo caractéristique de la bombe enflammée situé au-dessus du numéro de série entre le pontet et la poignée pistolet. Les baïonnettes attribuées à L’US Army présentent également les marquages US et bombe enflammée. Il semble que tous ces MkII aient été plus tard équipé de bretelles en toile Kerr.
 
Ces 20 000 MkII seront mis au surplus peu de temps après l’Armistice et seront proposés à la vente aux membres de la RIA via l’ordonnance de l’US Army jusque dans les années 1940 après quoi ils seront lentement écoulés via des revendeurs.

Le Ross rifle Us_mk211Le Ross rifle Ewb-1910
   
UK :
La Grande-Bretagne fera l’acquisition d’un nombre important de MkIII pour un prix unitaire très attractif à l’issu de la guerre. Une partie de ces MkIII sera convertie en MkIIIB pour usage par les corps de troupe principaux mais cet usage ne sera jamais nécessaire après la guerre terminée et ils rejoignaient le reste du stock de MkIII. Cette modification, d’abord prévue sur 100 000 exemplaires, semble n’avoir été effectuée que sur 67 000 exemplaires environ. Parmi cet important stock de MkIII, une majorité sera distribuée durant la deuxième guerre mondiale aux unités de seconde ligne dont notamment les gardes civiles, les gardes d’infrastructures militaires, certains départements de police et de pompiers, les gardes portuaires et plusieurs unités de la Royal Navy.
 
Le stock anglais est celui qui sera dispersé par le monde dans des circonstances diverses et variées. Ci-après une liste non exhaustive et nécessitant parfois confirmation des pays où le Ross a été soit rencontré soit utilisé après la première guerre mondiale :
-        La garde luxembourgeoise du Grand-Ducal fait l’acquisition de MkIII en 1945
-        Le Chili passe commande en 1911 d’un cuirassier qui sera produit à Elwick en Angleterre. La Royal Navy le réquisitionne en 1915 pour la première guerre mondiale et le renomme HMS Canada. Celui-ci ne sera finalement délivré à son commanditaire qu’en 1920. Le navire est renommé Almirante Latorre. A bord se trouve encore les 200 Ross MkIII armant l’équipage anglais. Ils deviennent la propriété de la marine chilienne. Ces MkIII chiliens présentent un marquage caractéristique et très distinct sous la forme d’un DA suivi d’un numéro de série à trois chiffres.

Le Ross rifle Mk3_ch10

-        L’Italie achète un nombre important de MkIII à l’issu de la première guerre mondiale, environ 60 000. On ne sait pas grand-chose sur les raisons ou circonstances de cette acquisition, il n’est pas certain que la commande ait été passée aux anglais ou directement aux canadiens. La meilleure preuve de cette acquisition par l’Italie est le fait que 55 000 de ces MkIII ont été vendus à la Lituanie en 1924.
-        Un nombre inconnu de MkIII est délivré par l’Angleterre à l’Estonie, la Lituanie et la Lettonie.
-        Les MkIII en Estonie sont récupérés par l’Union soviétique lors de l’occupation de 1940. Ces MkIII ressortiront à plusieurs reprises pour armer les groupes révolutionnaires russes lors des crises successives. Des clichés de partisans russes équipés de MkIII peuvent être retracés jusqu’à la révolution socialiste de Lenin en 1919. 
-        En 1924, la Lituanie fait l’acquisition de 55 000 MkIII et 60 millions de cartouches auprès de l’Italie. La Lituanie fait d’ailleurs du MkIII son arme d’infanterie officielle dans un effort de standardiser le 303 British au sein de son armée. IL est spéculé que ces MkIII seront généralement peu appréciés et seront revendus pour acquérir des Mauser de fabrication FN.
-        La Lettonie adopte également le MkIII comme son arme principale de corps de troupes.
-        La Chine entre en possession en 1911 de 500 Ross MkI acquis à des fins d’entraînement. Une autre commande semble avoir été passée en 1925 pour des MkIII mais l’issue en est inconnue. Ces acquisitions ont été arrangées et supervisées par Morris Cohen. Ce sacré personnage est un juif d’origine polonaise, résident canadien puis anglais, aventurier qui deviendra un général dans l’armée révolutionnaire chinoise. Sacré CV!
-        L’Inde reçoit en 1942 un total de 8000 MkIII destiné aux unités de police. Ils seront remplacés par des variantes du Lee-Enfield en 1943.
-        L’organisation paramilitaire israélienne Haganah achète et emploie le Ross MkIII durant la guerre palestinienne de 1947.
-        La Nouvelle-Zélande reçoit 300 MkIII des Anglais pour équiper sa branche de la Royal Navy. Ces MkIII sont employés en 1941 lors de la participation de la Nouvelle-Zélande à la seconde guerre mondiale.
-        Un nombre inconnu de MkIII sont délivrés aux Pays-Bas. Ces mêmes MkIII se retrouveront plus tard à l’inventaire de l’Indonésie.
-        Les nombreux MkIII capturés par les Russes refont surface à plusieurs occasions. Une partie de ces MkIII capturés sont donnés aux forces républicaines espagnoles durant la guerre civile. Les MkIII de prise russe sont marqués de la crois typique sur le tonnerre.
 
Ces MkIII récupérés par les Russes trouveront également une seconde vie plutôt inattendue.



------------------------------------- MTs-17 le "Ross russe" -----------------------------------
 
Une grande partie du propos qui suit est tiré d’un article de Ruslan Chumak et Alexey Belinsky paru dans une édition du magazine "Kalashnikov, arms and equipement".
 
De nombreux Ross MkIII ont fini en Russie soit des suites de l’occupation de l’Estonie et autres nations de la région, soit sous forme d’aide matérielle offerte par les Anglais directement. Ils serviront d’arme de deuxième ligne pour les Russes durant la deuxième guerre mondiale après quoi ils seront considérés obsolètes. Certains seront proposés par la Tula comme armes de chasse mais une majorité reste stockée dans l’inventaire militaire.
 
Un petit nombre de MkIII trouveront une nouvelle vie intéressante suite à l’engagement de l’URSS aux jeux olympiques en 1951. Parmi les épreuves aux programmes armes longues figurent des concours statiques avec ou sans changements de positions de 50m à 300m. Les russes emploient alors le Vostock MTs-13, une carabine à verrou vaguement dérivée du Mosin-Nagant et chambrant le 7.62x54R. Cette bonne carabine associée au très bon niveau des tireurs soviétiques apportera à la Russie plusieurs records et médailles sur les épreuves statiques. Dont notamment :
-        6 médailles d’or et 6 records à Caracas en 1954
-        Or aux olympiques de Melbourne en 1956
-        Or aux olympiques de Rome en 1960
-        Or aux olympiques de Tokyo en 1964


 Le Ross rifle Mc13-210
Vostock MTs-13


Cette carabine ainsi que son calibre se sont cependant révélés inadaptés pour les épreuves de tir dynamiques.
 
Le Running Deer :
 
L’épreuve du « Running Deer » ou cerf courant apparait au programme des compétitions olympiques 1908. A une distance de 100m, un cible mécanique correspondant à une silhouette de cerf parcours à vitesse constante une distance de 23m en 4 secondes perpendiculairement à la ligne de visée dut tireur. La cible comporte trois cercles concentriques de diamètre croissant. Le cercle le plus petit vaut 4 points, ensuite 3, ensuite 2 et 1 point est accordé tant que la cible est atteinte même hors des cercles. L’épreuve se dispute par équipes de 4 tireurs. Chaque tireur doit effectuer 10 tirs, un par passage du cerf. Le score maximum possible est donc de 40 par tireur et 160 par équipe. Cette épreuve évolue en 1912 avec un cinquième zone plus petite valant 5 points. Une variante « Double-Shot » de l’épreuve apparait en 1920 avec la possibilité de tirer 2 coups par passage de la cible. Le score maximum est désormais de 100 par tireur et 400 par équipe.


Le Ross rifle Rd_tar10
 
Cette épreuve est retirée en 1924 puis à nouveau au programme de 1952 à 1956. Cette épreuve est ajoutée au programme des compétitions mondiales ISSF de 1926 à 1962.
Par rapport aux épreuves de tirs statiques, les caractéristiques recherchées pour cette épreuve sont une vitesse élevée de l’ogive pour diminuer le tir d’anticipation ainsi qu’une action très rapide pour l’épreuve Double-Shot. Un cerf à 100m avançant à 6m/s à toucher 2 fois dans un laps de temps de 4s n’est pas à la portée ni de tous les tireurs, ni de n’importe quelle arme.
 
Le retour au programme de cette épreuve est problématique pour les Russes. D’une part la vitesse initiale du 7.62x54R est jugée trop lente et nécessitant trop d’anticipation en cible et d’autre part l’action du MTs-13 est trop lente à réarmer pour l’épreuve du Double-Shot.
 
Il est demandé à la Tula et plus particulièrement au département TsKIB-14 de concevoir une carabine spécialisée pour cette épreuve du cerf courant. La tâche est confiée à V. F. Trukhachev and M. I. Skvortsov. Il est toujours préférable de partir d’un système déjà existant plutôt que de concevoir une action de zéro et le Ross MkIII, présent en quantité dans l’inventaire russe, est jugé comme une excellente base pour l’exercice. L’action rectiligne extrêmement rapide associée à une bonne  précision mécanique intrinsèque la rend particulièrement intéressante pour l’épreuve du Double-Shot.
 
Le MTs-17-1 est créé de la manière suivante :
-        Le boitier du Ross MkIII est conservé et allégé


Le Ross rifle Mts17_10

-        La culasse est conservée mais munie d’un levier de culasse plus gros et en forme de sphère. La tête de culasse est modifiée pour accepter le bourrelet de la 7.62x54R


Le Ross rifle Mts-1710
Le Ross rifle Mts-1711
Remarquez l'absence de la goupille ajoutée pour éviter le mauvais remontage de la culasse

-        Le chargeur est conservé mais modifié pour accommoder le 7.62x54R
-        Le canon est changé pour un modèle lourd fluté de 750mm. Chose intéressante, le canon est soudé au boitier plutôt que vissé.
-        Les organes de visée sont modifiés par ajout d’un dioptre


Le Ross rifle Mts-1712
Le Ross rifle Mts17_11

-        La crosse est changée pour une version ergonomique.


Le Ross rifle Mts17_12


L’action de MkIII permet de tirer confortablement deux coups dans un laps de temps de 4secondes. Cependant, ni le 7.62x54R ni le 303 British ne propose une vitesse initiale suffisamment élevée pour les besoins du tir au Running Deer au plus haut niveau. Malgré le canon lourd, l’allègement du boitier permet un poids de 4.5kg nettement amélioré par rapport au MkIII standard.
 
Le MTs-17-1 est associé à une version modifiée du 7.62x54R utilisant une ogive très légère en vue d’augmenter la vitesse initiale. Cette cartouche est communément nommée le 7.62 Vostock ou 7.62BO. BO étant une traduction utilisant l’alphabet latin du nom cyrillique 7,62 БО, БО étant l’abréviation de "Бегущий олень" voulant dire "Running Deer". Grâce à une ogive courte de 90gr (5.8g), le 7.62mm BO propose une vitesse initiale de 1035m/s. Ces performances sont adéquates pour le Running Deer :
-        Environ un dixième de seconde entre départ du coup et impact en cible réduisant le besoin de tirer par anticipation.
-        Pratiquement aucune chute de balle
-        Recul réduit aidant à l’exercice du Double-Shot
L’ogive courte nécessite un chambrage spécifique avec des rayures plus proches de la chambre pour réduire le vol libre de l’ogive. Ce chambrage spécifique pose problème car le fait d’introduire une cartouche standard de 7.62x54R dans une arme chambrée en 7.62BO va forcer l’ogive dans les rayures avec à la clé soit une impossibilité de fermer la culasse soit une surpression dangereuse. Afin d’éviter cette occurrence, le magasin est modifié par l’ajout de renfoncements de part et d’autre à l’arrière pour empêcher qu’une 7.62x54R y soit introduite.


Le Ross rifle Mts-1713
On voit ici que la 7.62x54R est trop longue et les renfoncements à l’arrière bloque le bourrelet


La capacité du magasin est limitée à 3 coups dans le cadre de cette conversion.
Marquages sur le tonnerre :
Le Ross rifle 15359610
Ici une version sporterisée d'un MTs-17-1 qui a visiblement été rechambré par la suite vue la référence "-1" au 7.62BO a été effacée.


A noter l’introduction en 1956 d’un modèle MTs-17-2 chambré en 6.5BO. Le 6.5BO est tout simplement une version retreinte du 7.62BO.


Le Ross rifle Mts17_13


La vitesse initiale est identique au 7.62BO. La raison de l’existence de cette cartouche est le fait que le blast important généré par le 7.62BO est pénible pour les tireurs lors des phases d’entraînement. Cette cartouche de 6.5 avec son ogive plus légère et sa charge de poudre plus faible produit moins de bruit, moins de recul et un blast réduit permettant d’allonger les périodes d’entraînement.
Si on se cantonne aux résultats en compétitions, ces MTs-17 connaissent le succès lors des jeux olympiques de Melbourne en 1956. Au Running Deer, l’ukrainien V.Romanenko octroie l’or à l’Union soviétique et le russe V. Sevryugin le bronze. Le concours se dispute alors en équipe avec épreuves combinées Single-Shot et Double-Shot.
Dans le même temps, plusieurs défauts sont apparents :
-         Il est noté que l’allègement des boitiers de MkIII est trop poussé et le fait de trop serrer les vis liant le boitier au pontet cause des déformations pouvant empêcher la fermeture de la culasse.
-        Les 1000m/s du 7.62BO causent une érosion prématurée du canon et après 300 coups la précision est jugée insuffisante pour la compétition et l’entraînement. Ce défaut ne peut être attribué au Ross et la Russie continuera d’utiliser les 7.62BO et 6.5BO en compétition et à l’entraînement.
-        La soudure du canon au boitier sensé apporté plus de rigidité a pour conséquence sur certains exemplaires d’amoindrir la trempe du boitier. A l’usage les logements de tenons se déforment parfois suffisamment pour empêcher le verrouillage de la culasse.
-        La difficulté de démontage et remontage de la culasse est citée. Notamment la nécessite de maintenir la tête de culasse en position ouverte lorsque la culasse est introduite dans le boitier. Cette opération sur le MkIII est certainement plus complexe que l’équivalent sur un 91/30 mais ne semble pas insurmontable. On reste loin de la remise en cause existentielle qu’occasionne un remontage de Steyr M95.
-        Le MkIII est équipé d’une sécurité passive dans le bloc détente évitant que la culasse ne rebondisse en arrière par inertie et ne se déverrouille sous l’effet du recul. Afin d’alléger la détente et fluidifié la culasse, certains tireurs ont avoué supprimer cette sécurité. Il semble qu’il y ait eu un cas de déverrouillage et ouverture de culasse pendant une compétition. Celle-ci n’avait toutefois pas assez d’inertie pour blesser le tireur.
Le dernier problème mentionné par l’article d’origine est également le plus grave et est assez étonnant lorsque l’on retrace le parcours militaire du Ross. Il est clairement mentionné que la culasse peut être mal remontée exactement de la même manière que peut l’être la culasse d’un MkIII standard. C’est-à-dire que la tête de culasse ne peut pas se rétracter et engager les logements de tenons lorsqu’elle est en batterie. L’auteur de l’article note 4 occurrences de culasses mal remontées s’étant ouvertes, apparemment sans blessure grave. La culasse sera plus tard modifiée pour empêcher le mauvais remontage mais je n’ai pas trouvé confirmation que cela était fait de la même manière que sur les MkIII militaires avec la goupille. Ce propos par l’auteur de l’article me laisse perplexe à plusieurs égards. Le fait que ce problème ait pu survenir sur des armes destinées aux compétitions internationales préparées par le département compétition de la Tula (certainement pas des amateurs) indique pour moi trois choses :
-        L’ensemble des MkIII récupérés par les russes ne disposaient pas de la modification empêchant le mauvais remontage. Il parait inconcevable que cette modification ait pu passer inaperçu si les Russes disposaient d’exemplaires modifiés. Peut-être que les anglais ont dispersé en priorité les stocks de MkIII non modifiés.
-        Les tireurs n’aient pas noté le mauvais remontage et le fait que la culasse est alors beaucoup plus difficile à actionner. J’ai personnellement beaucoup de mal à y croire à moins que cela soit arrivé à des tireurs utilisant le MTs-17 pour la première fois.
-        Qu’en 1950, les Russes n’aient pas eu connaissance du problème potentiel de remontage erroné de la culasse ainsi que de la modification pratiquée par le Canada et les Anglais.
Quoi qu’il en soit, malgré de bons résultats en compétitions, il y avait un clair manque de confiance des équipes Russes envers ces MTs-17 et celui-ci sera remplacé par le Izmash BO-59 en 1959 (également une action rectiligne mais de conception nouvelle) pour les compétitions dynamiques. Le BO-59 ne pourra jamais être comparé au MTs-17 sur l’épreuve du Running Deer qui est retiré du programme de tir olympique après 1956.


Le Ross rifle 16171810
Izmash BO-59


La Tula a produit le MTs-17 de 1954 à 1970 selon les quantités suivantes :
-        1954-1955 – 19ex
-        1956-1960 – 1484ex
-        1961-1965 – 608ex
-        1966-1970 – 5ex
 
Un total de 2116 exemplaires donc avec de toute évidence une baisse de popularité après son retrait des compétitions par l’Union soviétique. Nombre de ces MTs-17 seront détruits. D’autres seront convertis en carabines de chasse et on peut parfois les trouver en annonce sur les sites de vente russes où elles sont échangées pour des prix très élevés. Le MTs-17 dans sa configuration "Running Deer" est aujourd’hui extrêmement rare et constitue la dernière tentative par un arsenal militaire de mettre à jour le système Ross.


Dernière édition par seschomaru le Dim 06 Fév 2022, 16:51, édité 2 fois
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Le Ross rifle Empty Re: Le Ross rifle

Message  seschomaru Dim 30 Jan 2022, 02:08

--------------------------------------- Armes présentées ------------------------------------


Le Ross rifle Mk2mk310

J’ai le grand plaisir d’être en possession de deux exemplaires de ces belles carabines. Un MkIII et un MkII *3 c’est-à-dire les deux variantes les plus communes du Ross. Toute variante de Ross est très rare à rencontrer en France malgré des quantités produites relativement importantes. Le MkII *3 n’a pas vu les terres françaises mais le MkIII y a été déployé à grande échelle et abandonné en masse  par les soldats canadiens entre 1915 et 1916. Cela devrait pour moi indiquer une relative présence dans les greniers et pourtant on n’en voit pas souvent. Il est probable que les abandons aient plutôt eut lieu sur les fronts belges car on les rencontre un peu plus souvent là-bas. Quoi qu’il en soit, ces deux armes présentées sont des imports hors de l’union européenne.

Ross MkII *3 :


Le Ross rifle Mk2mk311

J’ai récemment acquis ce MkII. Il s‘agit d’une arme importée des Etats-Unis. Il est en configuration d’origine avec sa complexe hausse Sutherland MkII. Toutes les pièces correspondent à la variante 3*. Les bois sont en superbe état avec très peu de traces de chocs, pas de fêlures et un léger motif flammé pas du tout désagréable à l’œil. Le bronzage a largement disparu de manière uniforme du boitier jusqu’au canon et passant par les grenadières et la plaque de couche. Le canon est en superbe état, miroir avec des rayures parfaitement nettes à la bouche. Celle-ci sont un peu plus effacé du côté de la chambre ce qui est quasi inévitable avec des armes militaires de ces époques ayant le tiré le 303 British à la Cordite. Je l’ai reçu avec une baïonnette qui malheureusement est du deuxième type pour MkIII et ne se monte donc pas sur un MkII. L’arme m’a aussi été livrée équipée d’une bretelle en toile Kerr visiblement d’époque.

Le Ross rifle Mk2_ha10

Cette hausse est une merveille de finesse et de complexité. Plus on l’examine plus on se demande comment autant d’efforts et d’opérations d’usinage ont pu être jugé approprié pour un organe de visée d’une arme de corps de troupe. Les graduations et le pas des vis de réglages ont une finesse attendue d’une hausse de précision Parker Hale. Les texturages sur les molettes sont extrêmement fins. Par exemple, la longue vis au pas délicat permettant d’ajuster le curseur en élévation est logé dans une gorge pratiquée dans l’épaisseur de la hausse. N’importe quelle autre hausse l’aurait mise à l’extérieur pour simplifier la fabrication. La hausse du 1903A1, pourtant déjà une des plus complexes employée sur une arme réglementaire parait rudimentaire à côté.
 
Le tonnerre présente un marquage LC indiquant une chambre élargie pour les munitions anglaises. Le marquage LC semble assez grossier et ne pas correspondre à la police utilisée pour la modification en arsenal.

Le Ross rifle Mk2_lc10

J’ai eu l’occasion de confirmer au tir que la chambre avait bien été modifiée. La déformation est massive et je ne donne pas cher de la durée de vie de mes précieux étuis Remington…

Il n’y a aucun marquage de numéro de série sur le tonnerre. Les marquages de la crosse sont très effacés. On voit à peine le cartouche Québécois et il est difficile d’identifier le numéro de bloc, l’année de fabrication et le lettrage du bloc de série :
-        II
-        *2
-        233 (?)
-        1908
-        A (?) C 

Le Ross rifle Mk2_ma11

Cette numérotation suggérerait qu’il s’agit du 26 259ème Ross produit sous contrat militaire. Ceci est difficile à confirmer car autant les conversions en 3* ont eu lieu entre 1910 et 1912, autant elles ont été faites sur des variantes précédentes du MkIII. Celui-ci étant de 1908, on peut décemment penser qu’il s’agissait d’un des derniers MkII * avant qu’il en soit converti au 3*.
 
A mon grand regret on ne peut plus identifier les multiples numéros et lettrage barrés sur le haut de la crosse. Ceux-ci aurait sans nul doute permis de connaitre une partie de la vie de ce 3* lors qu’il était encore un *. A quel canton canadien il était affecté? Dans quel type d’unité? A-t-il connut la Milice? Et parmi ces informations illisibles figurent peut-être les mêmes renseignements relatifs à son service une fois converti en 3*. Il n’y a pas à dire ce principe de marquages sur la crosse a ses défauts. Un numéro est par contre clairement présent entre le pontet et la poignée pistolet. Ce numéro 12197 est d’ailleurs celui renseigné sur le cerfa. Quel que soit la lecture faite des marquages de crosse, ce numéro 12197 ne peut pas correspondre à la numérotation chronologique Ross à cause du double lettrage. 12197 correspondrait à 209L et une année de fabrication plus proche de 1906.

Le Ross rifle Mk2_ma10

Tout porte à croire qu’il s’agit tout simplement d’un des 20 000 exemplaires achetés par les USA en 1917 et 12197 serait simplement le numéro plaçant cette arme dans le total de la commande. La provenance géographique, la bretelle Kerr, la configuration 3*, le numéro sous la poignée pistolet sont autant d’indices. L’absence de marquages US avec la bombe enflammée suggère alors qu’il s’agit d’un des 10 000 exemplaires acquis par la garde New-Yorkaise. Il y a fort à parier que parmi ces lignes de caractères et numéros barrés sur la crosse figure un NY quelques part. 
 
Impressions au tir :

J’estime avoir touché à quasiment tout en termes de mécanisme à réarmement manuel depuis le Dreyse jusqu’au FRF2 en passant par de nombreuses variantes de carabines à levier. Je pratique régulièrement des systèmes ésotériques réputés pour leur fluidité comme le Winchester Lee-Navy, Mannlicher hollandais 1895, Krags danois et norvégiens et un de mes préférés le Steyr 1888/90. Le Ross MkII est mon système à réarmement manuel préféré. La fluidité de la culasse est tout simplement inégalée! Même un ZFK55 sensé représenté le top du système Schmidt-Rubin vous fait distinguer clairement une résistance à la rotation de la tête de culasse. Cette résistance est à peine perceptible sur le MkII. La culasse s’actionne littéralement avec un doigt. Le guidage de la culasse est aussi admirable de précision avec très peu de mouvement possible en position ouverte grâce à un guidage précis tout le long du boitier. Si on peut au début associer cette fluidité à une supposée fragilité comme sur le Krag, il suffit de se souvenir que cette variante du Ross a été chambré en 280 Ross, à peu près équivalent en violence au 7mm RM. Le 303 British ne va pas l’inquiéter plus que ça.
 
L’arme est surprenante de légèreté grâce à son canon au profil plutôt fin. Notablement plus légère qu’un SMLE. Très bien équilibré avec un centre de gravité au niveau du magasin. La poignée demi-pistolet est un peu superficielle mais tombe assez bien sous la main. Dans la grande tradition des armes de match de vitesse. La fermeture de la culasse positionne la main idéalement pour trouver la détente avec l’index ou le majeur.
La détente a un contour bien concave de telle sorte que le doigt y trouvera toujours la même position. La détente traduit la conception pensée pour la compétition. On est au même niveau de qualité et de sensation qu’un Schmidt-Rubin avec une course assez longue mais dénuée de résistance aboutissant à une bossette nette et un départ de coup sans aucune course supplémentaire perceptible. La pression à déployée pour faire partir le coup est un tant soit peu plus importante que pour un K31.
 
La sécurité n’est pas des plus pratiques à utiliser et est plutôt rétive sur mon exemplaire.
 
Je le redis, la hausse est une merveille de précision et respire la solidité malgré sa complexité. La position repliée avec le cran de la visée de combat est rapide et facile à utiliser mais donne un zéro à 400m environ donc inutilisable la plupart du temps. La position dépliée vous donne un œilleton de faible diamètre permettant une visée sur cible à 6h très lisible. Cet œilleton est cependant associé à un guidon assez large et la prise de visée résultante est très encombrée. Pour moi (droitier, œil gauche dominant), le fait que cette hausse soit en avant du tonnerre pose des problèmes de netteté et la stabilité en cible n’est pas optimale à cause de la ligne de visée plutôt courte. On comprends facilement la volonté de mettre une hausse à l’arrière du boitier comme sur le MkII 2*, plus tard sur le MkIII ou encore sur les MkII modifiés pour la compétition.
 
Cela dit même dans cette configuration avec ligne de visée courte et pour moi des difficultés de netteté, la précision en cible offerte par cette arme est plus qu’honorable. Avec ma recette fonctionnant sur 7 armes différente en 303Brit :
-        Ogive 174-180gr
-        38.6-39.0gr de N140
-        CCI200
J’obtiens des résultats en cibles équivalents à mon N°4 Mk2. L’excellent état du canon permet d’utilise des ogives à profil fuyant. Le top est de lui donner des SMK 174gr bien sûr mais c’est un peu luxueux à mon goût pour une arme à visée ouverte et il se satisfait bien de S&B 180gr. Il est toutefois un peu sensible à une variation de charge de poudre. Il me faut ajuster de +ou-0.2gr selon la période de l’année et la température extérieure. La faute sans doute au canon au profil léger qui doit avoir pas mal de débattement lors du tir.
 
Le chargeur à élévateur contrôle Harris est un évènement à chaque rechargement. Tellement atypique et on est surpris à chaque fois que cela fonctionne. Pour rappel, il n’y a pas de guide pour lame chargeur et pas non plus de nécessité de placer les cartouches une par une. Vous avez deux solutions :
-        Vous déposez 2 ou 3 cartouches sur l’élévateur puis vous actionnez brièvement l’élévateur avec la main faible pour le faire descendre. Les cartouches vont s’empiler d’elles même sans mauvais recouvrement des bourrelets et se mettre en pression contre les lèvres du magasin. Vous répétez l’opération une nouvelle fois pour compléter vos 5 cartouches. Avec l’élévateur en position haute on ne peut pas en mettre plus que 3 à la fois, sinon elles tombent sur les côtés du boitier.
-        Ou alors la méthode marrante. Vous prenez l’arme par le dessous avec la main faible et agrippez le bouton de l’élévateur pour le bloquer en position basse. Le magasin grand ouvert vous prenez une poignée de 5 cartouche que vous jetez sans cérémonie à l’intérieur. Jouez avec le bouton de l’élévateur une ou deux fois et tout se met en place prêt pour continuer le tir.
 
C’est très amusant, totalement dépaysant, ça attire les foules sur le pas de tir et ça permet d’envisager un feu continu très soutenu. Moyennant que vous attrapiez bien la poigné de 5 cartouches ça peut aller aussi vite qu’une lame chargeur bien huilée sur Lee-Enfield.
 
L’éjection ne souffre aucun défaut de fiabilité et est très régulière. Les étuis sont systématiquement envoyés vers l’arrière sur droite et déposés gentiment sur un petit tas de 1m à 2m de diamètre.
 
Mon rechargement à 39.0grs est plutôt soft pour du 303 British et le recul n’engendre pas de fatigue. Je suis monté à 41.0grs et là ça commence à taper un peu. Bien que je sois attiré par la balistique du 280 Ross, je pense que la légèreté de cette carabine rendrait l’expérience rapidement pénible surtout en position couchée.
 
Je pense ne pas trop m’avancer en disant qu’un MkII 2* avec sa hausse à l’arrière du boitier a le potentiel pour se placer tout au sommet des compétitions du TAR. C’est sûr que ça changerait de la monotonie des 1903A3 et US17…
 
Ross MkIII :


Le Ross rifle Mk3_co10

Ce MkIII a été importé d’Angleterre. Il ne possédait pas cette optique Warner&Swasey que j’ai fait monter par après. Il est complet en configuration d’origine. Les bois et le bronzage sont exceptionnellement bien conservés au point de trahir une arme n’ayant sans doute pas vue le terrain. Curieusement, le canon a lui par contre vu de meilleurs jours et traduit un usage intense. Les rayures sont émoussées, le fond de rayures est gris et les rayures ne sont pas visibles à la bouche.

Le Ross rifle Toner_10

Les marquages sur le tonnerre M-1910 trahissent un boitier de fabrication précoce. Les divers autres poinçons visibles proviennent des bancs d’épreuve anglais. La crosse est vierge de tout marquage ou numéro. Jusque-là rien de très anormal puisque bon nombre de MkIII se sont retrouvés en Angleterre après la guerre et sont dépourvus de marquages sur la crosse. Ce qui m’a vraiment laissé perplexe en recevant cette arme c’est l’absence totale de numérotation où que ce soit. Aucun numéro de série. J’ai fait cette importation à titre privé avec récupération à Orly. Lors de mes échanges avec l’exportateur anglais, le matricule de l’arme était signalé comme XE8. Je n’y ai pas fait plus attention que ça, pensant à une erreur que je corrigerais une fois l’arme en France. Sauf qu’en effet un discret marquage XE8 sur le levier de culasse est tout ce qui permet de numéroter cette arme.

Le Ross rifle Ex810

J’étais alors totalement ignorant de la signification de ce numéro. J’ai pensé à un matricule pour arme expérimentale. EX, pourquoi pas? Mais après démontage complet, absolument rien ne semblait distinguer cet exemplaire de tout autre MkIII standard. C’est par hasard en lisant l’ouvrage de Jonathan Ferguson sur la série des bullpups anglais «  Thoneycroft to SA80 » que j’ai appris que ce type de marquage de râtelier distingue une arme destinée à des campagnes de tests. A chaque commande d’arme les anglais réservent un lot de quelques dizaines d’exemplaires qui ne reçoivent pas de matricule et sont conservés à titre de référence et plus généralement pour des tests de compatibilité de munitions. Il s’agirait donc d’une arme qui n’a jamais quitté les réserves de l’ordonnance anglaise (ce qui explique son état extérieur immaculé) et ayant servi à de nombreux tests de munitions (ce qui explique l’usure du canon).
 
A l’instar de la Sutherland Mk2 de mon Ross MkII *3, cette hausse Ross Battle Aperture a tout d’une visée de haute précision. L’usinage de la vis de réglage en élévation est superbe. Le corps de hausse a cette curieuse forme en escalier pour pouvoir être rabattue atour du portique pour lame chargeur.

Le Ross rifle Mk3_ha10Le Ross rifle Mk3_ha11

Le chargeur simple pile de cet exemplaire présente pas mal de jeu.
 
Mon intention à l’achat de ce MkIII était dès le départ de le monter en MkIII Warner&Swasey. J’étais en possession de la lunette et de la reproduction du rail de montage avant de prendre possession de ce Ross et la perspective de pouvoir réaliser cette très rare configuration était proprement irrésistible pour un amateur de matériel de tireur d’élite première guerre mondiale. En ce qui me concerne, l’absence de toute histoire de service de cet exemplaire, qui n’a jamais été attribué à  un soldat, était préférable en vue d’un tel montage modifiant de manière irréversible une arme aussi rare.
 
Avant de me lancer dans ce montage je suis passé par une phase prolongée de test pour m’assurer du potentiel restant de précision de cette arme en dépit de son canon usé. Sans trop de surprises les ogives à profil fuyant type Sierra 174gr Match King en .311 donnent des résultats mitigés. La surface de contact de l’ogive ne parvenant pas à suffisamment engager les rayures superficielles. Par chance, la solution dans ces circonstances est d’utiliser des ogives à profil cylindriques pour tenter d’augmenter la surface de contact avec les rayures. Dans mon cas des Sierra 180gr Game King en .311 ont fait l’affaire et m’ont donné une excellente précision légitimant la conversion en MkIII de tireur d’élite.
 
Le montage a été réalisé par armurier sur la base de documentations sporadiques que je suis parvenu à trouver. La reproduction de rail s’est avérée assez aléatoires dans ses cotes et le montage n’a pas été simple. Il a fallu notamment étendre les supports du rail qui étaient trop courts au point de rendre le montage de la lunette impossible. Visuellement cette reproduction de rail faite par un petit armurier anglais prend beaucoup de liberté avec le design original. L’œil même à peine averti devinera sans difficultés une reproduction.

Le Ross rifle Mk3_ra10
On devine les cales qui ont dû être ajoutés pour étendre les supports du rail

La lunette est un modèle 1913 grossissement x5.2 avec molette graduée et table balistique pour 30-06. Elle n’est pas attribuée à une arme et porte simplement le numéro 5455 ce qui en fait une des toutes dernières de la commande de 5730 modèles 1913. Elle n’a ainsi sans doute jamais été montée sur un 1903 et a été vendu au surplus aux USAs d’où mon vendeur l’a sans doute fait importer. Elle est parfaitement fonctionnelle avec de belles lentilles bien claires malgré les poussières quasi inévitables sur ces Warner&Swasey. Je peux confirmer qu’on a beau les enlever du mieux possible, à la séance de tir suivante il y en de nouveaux. A force, on apprend à faire avec et à tirer avec de multiples débris dans le champ de vision. La bonnette est une reproduction qui était fabriquée aux Etats-Unis pendant quelques années. Son caoutchouc est bien plus souple qu’une bonnette d’époque et il est possible de la retirer. La bonnette ne gêne pas le trajet de la culasse. La molette graduée pour réglage de la dérive est malheureusement manquante mais le réglage reste possible sans les graduations en référence. La plaque balistique est bien présente. Compte tenu du fait que cette lunette n’a à priori jamais été utilisée au combat, la présence de la  modification par vis de pression permettant de sécuriser le montage me laisse un peu perplexe. Peut-être cette lunette a-t-elle quand même servie dans un conflit lors duquel elle a reçu cet ajout mais je suis bien incapable d’en retracer les circonstances. En tout cas, cette vis à l’effet escompté et permet de convenablement brider les mouvements de la lunette sur le rail.

Le Ross rifle Ws_mk310Le Ross rifle Plaque10

Je peux confirmer que le cut-off/arrêtoir de culasse ne peut pas être changé de position avec la lunette en place. Je peux également confirmer que le corps, de la lunette empêche de lever ou baisser la hausse. J’ai opté de la laisser dépliée pour pouvoir utiliser au choix soit la lunette soit la hausse. L’ensemble est très compacté et il ne manque pas grand-chose pour que la hausse bloque le réglage de lunette et vice et versa. Mais ça fonctionne.

Le Ross rifle Hausse11

Un problème qui me reste à résoudre avec ce montage est le fait que le rail de montage s’est avéré plus incorrect encore que je l’avais anticipé. En l’état, avec tous les réglages d’élévation au minimum (molette et écrou de zérotage) je tape en cible à 50m environ 30cm au-dessus du point visé. Il faudra trouver une solution pour incliner le rail de quelques millimètres afin de compenser.
 
A noter que même avec la lunette en place il reste possible d’utiliser les lames chargeur. Cependant, et la plupart des rapports d’époque confirment ce fait, le chargement par lame est d’une grande pénibilité. Dans mon cas je n’ai jamais réussi à le faire sans sortir les deux dernières cartouches de la lame pour les insérer manuellement. En pratique je ne recharge plus que par approvisionnement individuel des cartouches.

Le Ross rifle Lame_m10


Impressions au tir :

Le MkIII est l’arme de réglementaire de compétition par excellence. Une action rapide finement usinée et rapide comme l’éclair, une détente qui tombe sous l’index à la fermeture de culasse, une crosse à poignée demi-pistolet, un canon lourd, une hausse de précision à œilleton et une ligne de visée interminable, n’en jetez plus! Même avant que je monte la Warner&Swasey je ne pouvais m’empêcher de penser aux dégâts dont ce MkIII serait capable au TAR avec un canon en bon état.
 
Contrairement au MkII, le MkIII est lourd, très lourd, un bon kilo de plus qu’un SMLE. Le boitier ne s’alourdi pas tant que ça par rapport au MkII, le poids vient du canon et ça a pour effet de déplacer le centre de gravité quasiment 20 centimètres en avant du magasin. Que ce soit debout ou sur les coudes, le bras faible fatigue vite. Sur appui avant ce poids absorbe le recul qui devient quasi négligeable et la stabilité est appréciée.
 
Il est long également. Ce qui a pour avantage de tirer le maximum de sa hausse de précision dont l’œilleton est au plus près de l’œil et d’un diamètre réduit par rapport à la hausse Sutherland Mk2. La prise de visée est parfaite même pour mon œil faible. Cette hausse n’est pas aussi impressionnante de complexité que celle du MkII mais on ne perd rien en précision. Les ajustements fins n’ont rien à envier aux meilleurs dioptres de compétition Parker Hale PH5, PH9 ou autre. La seule autre arme réglementaire qui approche ce niveau de qualité de visée à ma connaissance est le 1903A3 qui est néanmoins en retrait en termes de ligne de visée et de finesse de réglage.

Le Ross rifle Mk3mk210 Différence sensible de ligne de visée entre MkIII et MkII

La culasse perd un peu en fluidité par rapport au MkII. On se situe toujours plusieurs crans au-dessus d’un K31 et si vous mettez un MkIII dans les mains de n’importe quel tireur aux armes réglementaires il reconnaitra sans doute qu’il s’agit du système le plus fluide. Sauf s’il a essayé le MkII. Un léger défaut de cette culasse est que la bossette a tendance à faire basculer l’arrière de la culasse vers le bas en position ouverte. Cela a pour effet de ne plus tout à fait l’aligner avec les rails de guidage du boitier et diminue la fluidité du geste à la fermeture.

Le Ross rifle Culass11

Le magasin ne fonctionne pas très bien et est en net retrait par rapport au MkII. L’approvisionnement en simple pile est assez pénible car il faut passer outre plusieurs lèvres de chargeurs. Il convient aussi ne caler les cartouches vers l’arrière à l’insertion pour éviter la mauvaise superposition des bourrelets. Sur mon exemplaire, le chargeur est aussi mal calé. Il peut bouger verticalement de 5mm environ. Avec les 4 premières cartouches cela ne pose pas de problèmes mais le chargeur se retrouve en position basse à la 5ème cartouche et la culasse ne parvient pas toujours à l’attraper. Il faut replacer le chargeur vers le haut pour corriger. Je ne sais pas si c’est un défaut courant mais mon expérience corrobore certains rapports du terrain. Le chargement par lame chargeur est à oublier. Déjà l’élévateur est assez dur mais en plus les cartouches sont introduites avec un angle d’attaque et il y a environ 10mm entre la cartouche du bas et l’élévateur. Cette distance fait qu’en sortant de la lame chargeur, la cartouche a tendance à aller un peu où elle veut et c’est souvent pas dans le chargeur. Je n’ai jamais réussi à alimenter une lame chargeur complète dans ce magasin.
 
La sécurité est très facile à utiliser.
 
L’éjection est comparable à celle du MkII. Douce, fiable et régulière.
 
La détente est le meilleur non modifiée dont j’ai fait l’expérience sur arme réglementaire. Même sensation que le MkII mais avec un départ plus léger et encore plus net.
 
La précision est au rendez-vous malgré le canon franchement usé. J’ajuste ici ma recette comme suit :
-        Ogive 180gr Sierra Game King à base plate
-        39.0gr de N140
-        CCI 200
Il est envisageable d’utiliser des ogives Hornady Interlock 150gr en .312 car elles ont également ce profil cylindrique recherché. Je vais m’y mettre prochainement pour essayer d’économiser un peu par rapport aux Sierra que je ne trouve pas en dessous de 52€ les 100 ! En visée ouverte sur appui à 50m on égale le bon groupement d’un K31, tous les impacts se touchent. Contrairement au MkII, le groupement varie beaucoup moins en fonction de la charge de poudre. Les résultats sont très bons de 38.5gr à 39.5gr. Je suspecte que le profil lourd du canon contribue à réduire son débattement lors du tir et atténue les aléas de la mise en bois.
 
Ça c’était pour la visée ouverte, maintenant le tir à la Warner&Swasey!
Déjà, quelle gueule ! Cet ensemble improbable semblant sortir tout droit d’une fantaisie victorienne attire forcément l’attention à chaque sortie au stand. Je peux confirmer la plupart des défauts qui sont attribués à cette optique et que j’ai listé précédemment. L’arme est encore alourdie d’1kg mais le poids est recentré au niveau du magasin. Cela dit avec un ensemble de presque 6kg, équilibré au pas, le tir debout ou à bras franc devient très limité dans ses applications.
 
L’ergonomie est désastreuse. L’arme essaye constamment de basculer vers la gauche, impossible de trouver un appui-joue correct en visant avec l’œil droit et le recul vient impacter la lèvre si on essaye de viser avec l’œil gauche. On se retrouve à chercher un vague repère physique avec le menton contre la crosse et la tête n’est pas supportée. Je n’utilise pas la bonnette pour le tir. Lorsqu’elle est en place, la seule solution pour avoir une bonne vue sur le réticule est de coller le visage contre. Bien que le caoutchouc soit relativement souple sur cette reproduction, il reste trop dur et produit des chocs désagréables sur l’arcade sourcilière et sur l’arête nasale. C’est accentué par le fait que cette bonnette soit conique avec un bourrelet périphérique épais et rigide. Elle ne s’adapte pas à la forme du visage et le choc est concentré en deux points plutôt que réparti sur la périphérie de la bonnette. A retirer dès que possible comme le faisait une majorité d’utilisateurs de l’époque.
 
La prise de visée au travers de cette lunette est un bond dans le passé. Les bords de la lentille produisent une légère déformation périphérique de l’image. Le réticule en croix fine est un peu flou par endroit, les lentilles sont légèrement nuageuses et de petits débris noirs constellent le champ de vision. Cependant, le champ de vision est vraiment excellent pour une lunette de cette époque et permet de garder une bonne conscience de ce qui se passe autour de la cible. Le grossissement de x5.2 est appréciable aussi. Conjugué à l’action rectiligne et malgré une ergonomie douteuse il est effectivement possible de maintenir une vue sur la cible au travers de la lunette entre les tirs et ainsi voire où sont les impacts.
 
Mon montage a présentement un problème de zérotage. Le réglage mini amène mes impacts environ 30cm au-dessus du point visé ce qui impose une grosse contre visée. Ça reste gérable grâce à la croix fine qui permet de maintenir un repère d’alignement droite-gauche mais ce n’est tout de même pas idéal pour correctement se placer en élévation. J’ai pris le parti de faire comme beaucoup d’utilisateurs de l’époque et j’ai réglé la lunette en dérive pour que l’axe de visée soit parallèle à l’axe du canon. En pratique la compensation de 80mm est assez facile à appliquer.
 
Aux distances où je tire, 50m à 200m. Cette lunette ne présente aucun intérêt par rapport à la visée ouverte. L’ergonomie est largement amoindrie et le réticule n’est pas assez précis pour permettre une visée claire et aussi régulière que l’excellente hausse. Il est probable que la lunette redevienne intéressante quand les cibles deviennent difficiles à distinguer à 500m et plus. La luminosité de la lunette est sans doute appréciable dans ces circonstances mais je n’ai pas eu l’occasion de tester à ces distances. A cause aussi de la contre visée, mes résultats en cible sont meilleurs avec la visée ouverte. Mais pas mauvais tout de même, je produis facilement un groupement de 3cm en extrême à 50m sur appui avec la lunette. Une combine que j’apprécie beaucoup est de tirer avec la hausse depuis l’œil droit puis d’utiliser l’œil gauche pour vérifier mes impacts en cible à travers la lunette. Une longue vue intégrée quoi.
 
Conclusions :

J’adore le Ross, les deux. Je ne peux pas choisir! Je n’ai pas encore rencontré de système à réarmement manuel que j’apprécie plus au tir. Si j’étends mon avis aux semi-autos je préfère peut-être quand même le RSC1917. Pour ne rien gâcher, les deux sont pour moi de superbes pièces de collection qu’on ne voit quasiment jamais et qui invitent à la conversation avec connaisseurs ou néophytes. Le MkIII monté avec Warner&Swasey, même s’il s’agit d’une copie est un objet absolument exceptionnel et rare, même parmi les armes de tireur d’élite première guerre mondiale où déjà rien n’est courant.
 
Le modèle idéal serait une configuration un peu entre les deux avec un canon plus lourd que le MkII mais plus léger que le MkIII, le chargeur Harris, la culasse du MkII et la ligne de visée du MkIII.
Donc en fait, un Ross MkII *2 avec hausse Sutherland MkII sur portique à l’arrière du boitier.

L'inspiration originelle du Steyr M95, la plate-forme de développement du MkII et l'évolution finale du MkIII :

Le Ross rifle Culass12Le Ross rifle M95mk210


Dernière édition par seschomaru le Lun 31 Jan 2022, 21:32, édité 2 fois
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Message  seschomaru Dim 30 Jan 2022, 02:15

----------------------------------- Album photos d’époque ---------------------------------
 
Je partage ici en vrac quelques images glanées sur le net du Ross photographié avec les hommes qu’il a accompagné pour le meilleur et surtout pour le pire.

Le Ross rifle 5d8e3110
Manufacture Ross Québec. Un sacré paquet de MkII, apparemment en attente de leurs hausses et garde-mains.

Le Ross rifle 1712
Milicien canadien avec son MkII avec hausse Mk3

Le Ross rifle 1913Milice canadienne "division sénior" à l'entraînement à la baïonnette avec leurs MkIII

Le Ross rifle 2513
La première Division canadienne peu après leur arrivée en Europe  avec leurs beaux MkIII flambant neufs. Si ils savaient l'enfer que va leur faire vitre cette arme!

Le Ross rifle 2013
Peut-être ma préférée. Socialistes léninistes inspectant un lot de Mk3 durant la révolution russe de 1919

Le Ross rifle 2612
A gauche : Ah non pas lui! A droite : Probablement des membres de la milice à l'entraînement

Le Ross rifle 2912
Le MkIII dans son environnement naturel pour lequel il a été imaginé

Le Ross rifle 3212
42ème régiment de la Marin Royale canadienne photographiée en Août 1914 avec ce qui semble être soit des MkII avec hausse Mk3 ou plus vraisemblablement des MkII 2*
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Message  seschomaru Dim 30 Jan 2022, 02:16

-------------------------- Médias d’intérêts sur le Ross et ses variantes --------------------
 
La plupart des vidéos et articles consultables tirent leurs informations soit de la culture courante du Ross pour les généralités, soit de l’unique ouvrage sur le sujet pour les informations plus détaillées.
Les ouvrages :
« The Ross Rifle Story » par R Phillips, F Dupuis et UJ Chadwick. La référence, malheureusement quasi introuvable
« Sir Charles Ross and his rifles » par R Phillips et J J Knap
« A Question of Confidence » par Colonel A F Duguid et édité par Clive M Law
« Without Warning - Canadian Sniper Equipment of the 20th Century » par Clive M Law
 
Les liens :
https://captainstevens.com/military/weapons/snipers/ross-sniper-rifles/ Excellente source sur le Ross et ses variantes sniper
https://www.thecanadianencyclopedia.ca/en/article/ross-rifle
https://military-history.fandom.com/wiki/Ross_rifle
https://collections.royalarmouries.org/first-world-war/type/rac-narrative-163.html
http://samilitaryhistory.org/vol155tw.html
https://gunsmagazine.com/our-experts/the-elegant-ross-sporter/
https://legionmagazine.com/en/2016/02/the-ross-rifle/

Forgotten Weapons présente une formidable série de vidéos sur la quasi-totalité des variantes du Ross. Monsieur McCollum a visiblement eu accès à une superbe collection incluant les très rares variantes Mk1 :
https://www.youtube.com/watch?v=UCPWWgnOQCc
https://www.youtube.com/watch?v=NqCpOsu5Am4
https://www.youtube.com/watch?v=qb1jjz7TMFk
https://www.youtube.com/watch?v=KvuDXlN2bvY
https://www.youtube.com/watch?v=QR30Ox-bcrI
https://www.youtube.com/watch?v=89wAHMSik9o
https://www.youtube.com/watch?v=suvMo1MrY60

Vidéo assez ancienne mais ô combien importante expliquant comment la culasse peut être mal remontée et les conséquences réelles pour le tireur avec démonstration :
https://www.youtube.com/watch?v=EaSui_UqDX8

Comme à son habitude, C&Rsenal a produit une excellente vidéo sur le MkIII :
https://www.youtube.com/watch?v=2uGYSQ_-FJU

Plusieurs vidéos de la chaîne Britishmuzzleloaders par son toujours sympathique auteur :
https://www.youtube.com/watch?v=q-25nLWAbCA
https://www.youtube.com/watch?v=7fN_aQtMS5k
https://www.youtube.com/watch?v=_ONF4z-ukd0

Très agréables vidéos présentant très simplement des démonstrations de tir démontrant la vitesse de manipulation de l’action et le système de chargeur Hall par la chaîne PhoenixPhart :
https://www.youtube.com/watch?v=GnFoHTb-FLQ
https://www.youtube.com/watch?v=r9ODj0GOX_8
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Message  seschomaru Dim 30 Jan 2022, 02:20

--------------------------------------------------------------Fin--------------------------------------------------------

Je vous remercie d’avoir lu totalement ou en partie ce gros pavé. Celui-ci a été particulièrement douloureux à rédiger, j’espère qu’il vous permettra de mieux apprécier cette arme fascinante et méconnue. Selon moi la meilleur arme militaire à réarmement linéaire, à même de donner des sueurs froides à un 1903A3 au TAR si seulement elle n'était pas sir rare.

Il va sans dire que toutes les informations données dans cet article peuvent être utilisées à votre guise. Au l'ère de l'Internet, la notion de propriété de l'information est une vue de l'esprit de toute façon.

 Les informations de rechargement sont données en partant du principe que toute personne lisant cet article est un adulte responsable ou un trompe-la-mort qui prend ses responsabilités.

S’il y a des photos, des schémas ou des documents référencés que vous souhaitez obtenir, faites-moi un PM et je vous les communiquerai dans la mesure de mes capacités.

salut
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Message  Verchère Dim 30 Jan 2022, 04:55

Eh ben...
Je gage que s'il n'y a pas eu plus de réactions immédiates, c'est que les lecteurs en sont tombés sur le cul et ne s'en s'ont pas encore relevés !

Deux petites remarques si l'auteur veut parfaire la perfection :
- relire à froid, il y a quelques fautes (certes, au total pas plus que dans 2 lignes d'un "d'jeun"),
- la photo d'éclaté de culasse de Mannlicher M.95 (si je ne me trompe, et figurant là pour l'exemple), mériterait à être mieux indiquée comme telle. Le texte le sous-entend, les possesseurs de M.95 la reconnaissent, mais pour les autres ce n'est pas forcément évident.

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Petite collection de documents anciens et récents : http://p.lacour.malvaux.free.fr/Arquebuses.htm

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Message  CLOSDELIF Dim 30 Jan 2022, 08:12

Pas de réaction immédiate simplement parce que c'est long à lire en entier!
C'est un travail remarquable , comme j'en ai rarement rencontré: un immense bravo ! Le Ross rifle 3361380237 Le Ross rifle 3361380237 Le Ross rifle 3361380237
Une seule chose me gène cependant: c'est l'emploi systématique du mot "toner" qui signifie "encre en poudre pour imprimantes" à la place du mot "tonnerre" qui qualifie la partie d'une arme considérée dans l'article.
salut

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Message  HELIX Dim 30 Jan 2022, 08:26

Le Ross rifle 72113

En un mot : SUPERBE !

Franchement, c'est probablement l'un des plus beaux sujets produits sur TCAR.
Très bien développé, documenté et illustré, c'est avec un très grand plaisir que j'ai pris le temps de le lire en détail, etant d'autant plus intéressé que je possède un MKIII.

C'est d'autant plus remarquable que je pense que beaucoup de membres du forum n'imaginent pas le temps passé à la préparation puis à la mise en ligne.

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Message  LP Dim 30 Jan 2022, 09:18

Probablement le meilleur et plus complet article rédigé sur Tcar au sujet d'une arme, et pourtant il y en a de très bons.

Sa place est dans le Tcarpédia.

L'absence de réactions témoigne du respect des lecteurs pour la qualité du travail et de la volonté de ne pas le polluer avant la fin (sans aucune critique pour Airforce 1 qui a apporté des précisions).

Nous pouvons tous maintenant remercier Seschomaru pour son remarquable article salut Le Ross rifle 2863987946 digne d'une publication professionnelle.

On ne trouve cela que sur TCAR!
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Message  winch 95 Dim 30 Jan 2022, 09:25

Magnifique travail qui rassemble à la fois l'histoire, la conception, les différentes versions et modifications du Ross.

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Message  lolo577 Dim 30 Jan 2022, 10:07

HELIX a écrit:Le Ross rifle 72113

En un mot : SUPERBE !

Franchement, c'est probablement l'un des plus beaux sujets produits sur TCAR.
Très bien développé, documenté et illustré, c'est avec un très grand plaisir que j'ai pris le temps de le lire en détail, étant d'autant plus intéressé que je possède un MKIII.

C'est d'autant plus remarquable que je pense que beaucoup de membres du forum n'imaginent pas le temps passé à la préparation puis à la mise en ligne.
 

Je n'ai rien à ajouter !

Ayant par le passé développé des sujets au long cours, je mesure pleinement la somme de travail nécessaire pour rédiger, illustrer et mettre en ligne un article d'une telle densité. Je suis donc admiratif !

Félicitations et respect à Seschomaru. salut salut salut salut

------------------------

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Message  Joedu29 Dim 30 Jan 2022, 10:15

Je voue une admiration sans bornes à celles et ceux capables de condenser un vaste champ de connaissances en une histoire digeste pour le commun des mortels Shocked Je te tire mon chapeau  salut

Je suis moi-même possesseur d'un MkIII; le canon est en relativement bon état, mais la molette de dérive "tourne dans le vide" et la détente n'est pas fiable à 100%. c'est bien dommage, sinon je m'en servirais bien plus souvent, car, effectivement, la fluidité de l'action doit être vécue pour être crue! Il a d'ailleurs quelques poinçons étranges que je n'ai pas réussi à identifier.

Je suis également en train d'importer un MkII 3* des États-Unis, avec des marquages US.
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