Mon fusil d'Infanterie Modèle 1842 T
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St Etienne
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TIR et COLLECTION Armes Règlementaires :: Armes règlementaires à poudre noire :: Armes à poudre noire à percussion
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Mon fusil d'Infanterie Modèle 1842 T
Bonjour à tous, amis du tir et de la collection.
J'ai eu la chance de croiser cette arme début juin et de pouvoir la négocier :
Voici le Fusil d'Infanterie Modèle 1842 T :
Ce fusil a été fabriqué en 1849 par la Manufacture Nationale de St Etienne en tant que fusil de Voltigeur.
Son canon était alors lisse, et tirait une balle ronde de 17,2 mm.
En 1858, selon l'ordre de Sa Majesté l'Empereur Napoléon III, il a subi la transformation T à la Manufacture Impériale de St Etienne.
C'est à dire qu'on a rayé son canon après l'avoir mis au calibre de 18 mm, 17,8 mm au sommet des rayures.
Ses rayures sont au nombre de 4, elles sont plates et larges de 7 mm, hautes de 0,2 mm et le pas est de 2 mètres.
Il tire normalement la cartouche Modèle 1857, vite remplacée par la cartouche Modèle 1863 dont la balle est plus stable sur sa trajectoire. Les balles Modèle 1857 et 1863 sont toujours établies au diamètre de 17,2 mm.
La différence de diamètre avec celui du canon - 0,6 mm - était voulue afin de permettre le chargement malgré l’encrassement du tube. Cette différence était en partie diminuée par l’épaisseur du papier constituant la cartouche.
L'arme devait être en excellent état car rien n'a été remplacé, ni son canon, ni sa monture (hormis une enture, voir plus loin)
Les armes dont les canons étaient à la cote d'usure de 18,5 mm recevaient un canon neuf de stock, bien sûr rayé selon la transformation T.
Le fusil de Voltigeur Modèle 1842 est donc devenu fusil d'Infanterie en 1858.
En effet, la nouvelle organisation de l'Armée, voulue par l'Empereur à la suite de la Campagne d'Italie, se voulait une simplification et une (relative) unicité dans l'armement de l'Infanterie. C'est ainsi qu'il n'existe plus qu'un seul type de fusil (Sauf à la Garde), tous sont mis à la même longueur d'1,41 mètre, soit la taille des anciens fusils de Voltigeurs.
Revenons à notre arme afin de l’examiner en détail.
Commençons par l’élément moteur du fusil, la platine.
Cette photo montre la pièce à l’armé, le chien découvrant le cran de mire et la cheminée coiffée d’une amorce à ailettes.
La platine porte le marquage de la Manufacture Nationale de St Etienne. Remarquons la vis à ergots de fixation arrière de la platine, vis que seul l’armurier de l’unité pouvait retirer à l’aide d’un tournevis à ergots. La platine est retenue par une vis traversant la monture et venant se visser dans une rosette-écrou agissant en contre-platine :
Elle est du modèle 1847. C’est à dire la platine modèle 1840 modifiée par augmentation de l’écartement de ses piliers. En effet, sur la platine 1840, les deux piliers sont trop rapprochés l’un de l’autre. Lors d’un démontage maladroit, le risque est grand que le ressort échappe aux mains de l’opérateur, provoquant le risque de rupture de l’une des deux vis, surtout si elles n’ont été que partiellement dévissées. Sans parler d’un vilain pet aux doigts du maladroit : du sang partout, une scène d’horreur !
Cette vue de la platine à l’armé montre que l’écartement des deux piliers et de l’axe de la gâchette forme un triangle quasi équilatéral, favorisant la bonne tenue de la noix.
Le millésime 1847 est marqué sous le ressort.
Notons que la bride de noix et la gâchette ont un fini jaune obtenu par trempe dans l’huile. Ce traitement, qui existe depuis l’Ancien Régime, assure une protection contre la corrosion.
Les différents poinçons I et V frappés sur les vis, la bride de noix, la gâchette et la plaque de platine sont les marques des compagnons platineurs et d'assemblage final pour le 4 (voir plus loin) :
Cette photo montre la platine chien à la position du demi-armé qui permet de relever légèrement le chien pour qu’il n’appuie pas sur la capsule posée sur la cheminée.
La chaînette reliant la noix au ressort est mise ici en évidence, de même que l’extrémité inférieure du ressort agissant sur la gâchette :
La platine est encastrée dans son emplacement dans la monture.
On voit ici que la vis à ergots reste sur la monture. L’intérieur du logement de la platine est fortement marqué par les différentes matières grasses utilisées lors de l’entretien de larme.
Remarquons, sous le battant de bretelle, l’extrémité de sa goupille de fixation, survivance des vieux systèmes à silex … :
Le canon du fusil est assuré sur la monture par une vis traversant la queue de culasse que l’on voit sur cette vue. Cette pièce reçoit l’inscription du modèle de l’arme, ici Mle 1842 T. On voit que la hausse à cran de mire cache en partie l’inscription. C’est que cette pièce a été posée lors de la transformation T de l’arme en venant se placer en arrière et au dessus de l’ancienne hausse qui sera meulée à l’occasion.
Voici un dessin tiré de la planche 1 du cahier 2 du Boudriot "1833-1861 chargement bouche & percussion" et montrant comment la nouvelle hausse est fixée sur l’ancienne. Le cran de mire est réglé pour la hausse de 300 mètres.
Remarquons aussi comment la queue de culasse se prolonge derrière le filetage du bouchon.
Le pan gauche du canon porte traditionnellement les ponçons des directeurs de la Manufacture.
Ici M majuscule dans un cartouche formant blason et un T en cursive dans un cachet ovale.
Le matricule 444 est frappé sous les poinçons, il a été apposé selon l’ordonnance de 1854 lors de la numérotation générale des armes du corps d’affectation. Ce matricule est répété sur la gauche de la crosse, nous le verrons plus loin. Le registre des matricules de l’armement du corps de troupe est tenu à jour par l’officier armurier. Il permettait de suivre chaque arme : compagnie d’affectation, réparations, mouvements, etc …
Le pan droit du canon porte la masselotte de la cheminée. On y trouve plusieurs marquages.
Le millésime de l’année de fabrication du fusil, ici 1849. La mention MN pour Manufacture Nationale.
Les poinçons des contrôleurs du canon M et C (?) dans des cachets ovales.
Nous verrons plus loin qu’il y a d’autres marquages importants situés sous la monture :
Le canon est assuré sur la monture par trois bracelets ou garnitures.
Cette vue nous montre, de haut en bas, l’embouchoir, la grenadière et la capucine. Leurs ressorts à ergots (embouchoir) ou à épaulement (capucine et grenadière) sont mis en évidence. Chacune de ces pièces est marquée du poinçon d’un contrôleur.
Notons au passage que la monture a été réparée sous l’embouchoir. Nous en reparlerons :
Voici la photo rarement présentée d’une pièce toujours cachée : le ressort de baguette.
Cette pièce en forme de cuiller allongée appuie sur la baguette afin de la retenir dans sa saignée. Elle est posée à l’intérieur de la monture, entre la platine et la capucine, et bloquée en place par une goupille traversant le bois.
La sous-garde et le pontet protègent la détente, renforcent la poignée et retiennent le battant de bretelle.
La vis de maintien de la queue de culasse vient se serrer sur l’écusson, la pièce qui assure le pivotement de la queue de détente.
L’écusson est partiellement caché par la sous-garde.
Cette pièce allongée sous la poignée comporte deux croches permettant d’assurer la prise de la main droite. Elle est fixée à l’arrière par une vis à bois et à l’avant par la queue de l’axe de pivotement du battant de bretelle.
Enfin, le pontet vient protéger la queue de détente. Il est fixé à l’arrière par un crochet venant prendre la sous-garde, et à l’avant par la queue de l’axe de pivotement du battant de bretelle.
Cette dernière pièce traverse et assure le verrouillage du pontet et de la sous-garde via une goupille traversant la monture et cachée par la rosette de contre-platine.
Cette vue permet de voir toutes les pièces ce cet ensemble. Comme toujours, chaque pièce est poinçonnée :
Juste derrière la sous-garde, un marquage est frappé dans le bois. Il s’agit de nom de l’artisan crossier ayant fabriqué la monture.
Ici un certain J. Durand :
La crosse du fusil est destinée à permettre l’épaulé et la mise en joue lors des tirs, mais aussi à protéger la monture par l’intermédiaire de la plaque de couche. Toutes ces pièces portent des marquages qu’il est intéressant de détailler.
Côté gauche, la crosse porte le matricule que nous avons pu lire sur le pan gauche du canon. La position du matricule, la hauteur des caractères sont précisés par l’ordonnance de Mai 1854 :
La partie droite de la crosse porte une estampille circulaire ou macaron présentant 5 secteurs dans les quels on lit l’année de fabrication, le mois de fabrication, l’initiale du directeur de la manufacture, l’initiale du 1er contrôleur et l’initiale de la manufacture.
AU centre de cette estampille, un tampon de buis est collé dans un trou rond, pourtant les initiales du régime en place : MN, MR ou MI (EF sous le premier Empire)
Ici, tous ces marquages ont disparu, on distingue le début d’une année 18.. Le tampon de buis a été fortement dégradé sans doute par souci “politique“ …
Sous l’estampille, on peut lire St ETIENNE. C’est la manufacture ayant procédé à la transformation T du fusil. Là encore, l’emplacement de ce marquage est apposé selon la réglementation :
Enfin, la plaque de couche, pièce de protection du bois de la crosse et assurant l’épaulé par le tireur. Cette pièce en L est fixée par deux fortes vis à bois qu’il est conseillé de maintenir en bon état, notamment les filetages doivent êtres suiffés ou passés à la cire afin de ne pas rouiller dans le bois.
La plaque porte le n° 12, c’est le numéro du Régiment d’Infanterie attributaire du fusil :
Nous allons pouvoir maintenant démonter sommairement l’arme : séparer le canon de la monture. La monture porte deux réparations, des entures qui sont venues remplacer les parties abîmées. La première enture est une pièce d’environ 43 cm de long, qui va de la grenadière à l’embouchoir. C’était une réparation très courante de cette partie de la monture affaiblie par le passage du canon et la saignée de la baguette. La jointure entre les deux pièces est masquée par la grenadière :
La seconde enture, postérieure à la première est située à l’extrémité de la monture, justement celle qui avait déjà été enturée. Le bois a sans doute éclaté au niveau de l’entrée du canal de baguette, le long du ressort de l’embouchoir. La réparation est visible quand on retourne l’arme :
Nous avons dégagé le canon de la monture afin de détailler les différents détails masqués par le bois.
Sous la masselotte, nous lisons l’inscription S. 1858. Il s’agit de l’initiale de la manufacture ayant effectué la transformation T. Ici S pour St Etienne. Enfin 1858 est la date de cette opération :
Sous la queue de culasse, le numéro 455 et le caractère italique H. Les autres marquages sont ceux des différents ateliers par les quels est passé le canon.
Sous le canon, nous retrouvons le n° 455 H, sans doute un n° d’atelier.
Mais aussi le coup de burin de repère de l’alignement du bouchon de culasse et du canon.
Enfin, notez les poinçon E, 8 et P couronné. Ce sont ceux qui sont apposés lors de l’épreuve du canon, le poinçon E de l’épreuve, le 8 pour le mois de l’épreuve (octobre) et le poinçon du contrôleur chargé de l’épreuve :
À l'arrière du canon, le tonnerre est fermé par un bouchon de culasse vissé.
Cette vue permet de voir la conformation du bouchon et de la queue de culasse prolongée derrière la canon.
Cette pièce porte un grand poinçon 4 que nous avons déjà vu à l’intérieur de la plaque de platine :
Pour en finir avec le canon, cette photo permet de voir son état intérieur.
Les 4 rayures sont un peu usées, les marques laissées par les multiples introductions de la baguette sont évidentes.
Un peu usé, mais pas tant qua ça : la balle calibrée à 18,8 mm entre à frottement doux. Le canon est quasiment resté à son diamètre à neuf.
Et, effectivement, nous verrons que le canon a conservé toutes ses qualités de tir.
La revue de ce fusil ne saurait être complète sans examiner la baïonnette associée.
La baïonnette modèle 1822 est une lame triangulaire longue de 45 cm, fixée sur une douille entaillée en Z et assurée par une virole rotative. L’ensemble mesure 52,5 cm. Le fusil avec sa baïonnette mesure 1,885 mètre.
Enfin, retenons les principales dimensions du fusil Mle 1842 T :
En conclusion, nous venons d'examiner le successeur de feu le fusil Mle 1840.
Nous avons vu que la transformation T consistant à rayer son canon a été l'occasion de plusieurs marquages : T après le millésime de la queue de culasse, St Etienne marqué à la crosse et S. 1859 sous la masselotte du canon.
Fabriqué en 1849 et aussitôt mis en service, il a été rayé exactement 10 ans plus tard à l’issue de la campagne d’Italie. Il prendra sa retraite certainement un peu avant la guerre franco-allemande de 1870, ce qui l’ai mis à l’abri des hasards de la guerre.
Je précise que j'ai nettoyé sa monture qui était totalement noircie (crasse et diverses coulures de graisses et de rouille).
Dégraissage à l'acétone puis deux passes d'acide oxalique, puis rinçage. Huile de lin puis encaustique incolore puis astiquage.
Voici le fusil avant nettoyage du bois :
Dans son état, je n’ai pas hésité à l’apporter au pas de tir à 50 mètres pour voir ce dont il était capable.
Après avoir mesuré son calibre, j’ai préparé les balles les plus compatibles : la balle Mle 1854 dont j’ai fait faire le moule il ya 12 ans en 18,85 mm. J’ai recalibré/graissé la balle à 18,8 mm.
Question charges, je me suis inspiré de celles du 1853 TCar : entre 3,8 et 3,5 g de PNF1.
Après quelques essais, j’ai choisi la charge de 3,7 grammes de PNF1.
L’ensemble fusil 1842T + balle 1854 + 3,7 g de PNF1 produit ce carton, sachant qu’il faut pointer …. 10 cm SOUS le carton !
Si certains on les compétences permettant de reconnaître les hommes derrière leurs poinçon, je les remercie de leur participation.
Pour ma part, une arme passionnante, tant du point de vue technique qu'historique. Et qui ne laisse personne indifférent au pas de tir.
Bonne soirée à tous et à bientôt !
J'ai eu la chance de croiser cette arme début juin et de pouvoir la négocier :
Voici le Fusil d'Infanterie Modèle 1842 T :
Ce fusil a été fabriqué en 1849 par la Manufacture Nationale de St Etienne en tant que fusil de Voltigeur.
Son canon était alors lisse, et tirait une balle ronde de 17,2 mm.
En 1858, selon l'ordre de Sa Majesté l'Empereur Napoléon III, il a subi la transformation T à la Manufacture Impériale de St Etienne.
C'est à dire qu'on a rayé son canon après l'avoir mis au calibre de 18 mm, 17,8 mm au sommet des rayures.
Ses rayures sont au nombre de 4, elles sont plates et larges de 7 mm, hautes de 0,2 mm et le pas est de 2 mètres.
Il tire normalement la cartouche Modèle 1857, vite remplacée par la cartouche Modèle 1863 dont la balle est plus stable sur sa trajectoire. Les balles Modèle 1857 et 1863 sont toujours établies au diamètre de 17,2 mm.
La différence de diamètre avec celui du canon - 0,6 mm - était voulue afin de permettre le chargement malgré l’encrassement du tube. Cette différence était en partie diminuée par l’épaisseur du papier constituant la cartouche.
L'arme devait être en excellent état car rien n'a été remplacé, ni son canon, ni sa monture (hormis une enture, voir plus loin)
Les armes dont les canons étaient à la cote d'usure de 18,5 mm recevaient un canon neuf de stock, bien sûr rayé selon la transformation T.
Le fusil de Voltigeur Modèle 1842 est donc devenu fusil d'Infanterie en 1858.
En effet, la nouvelle organisation de l'Armée, voulue par l'Empereur à la suite de la Campagne d'Italie, se voulait une simplification et une (relative) unicité dans l'armement de l'Infanterie. C'est ainsi qu'il n'existe plus qu'un seul type de fusil (Sauf à la Garde), tous sont mis à la même longueur d'1,41 mètre, soit la taille des anciens fusils de Voltigeurs.
Revenons à notre arme afin de l’examiner en détail.
Commençons par l’élément moteur du fusil, la platine.
Cette photo montre la pièce à l’armé, le chien découvrant le cran de mire et la cheminée coiffée d’une amorce à ailettes.
La platine porte le marquage de la Manufacture Nationale de St Etienne. Remarquons la vis à ergots de fixation arrière de la platine, vis que seul l’armurier de l’unité pouvait retirer à l’aide d’un tournevis à ergots. La platine est retenue par une vis traversant la monture et venant se visser dans une rosette-écrou agissant en contre-platine :
Elle est du modèle 1847. C’est à dire la platine modèle 1840 modifiée par augmentation de l’écartement de ses piliers. En effet, sur la platine 1840, les deux piliers sont trop rapprochés l’un de l’autre. Lors d’un démontage maladroit, le risque est grand que le ressort échappe aux mains de l’opérateur, provoquant le risque de rupture de l’une des deux vis, surtout si elles n’ont été que partiellement dévissées. Sans parler d’un vilain pet aux doigts du maladroit : du sang partout, une scène d’horreur !
Cette vue de la platine à l’armé montre que l’écartement des deux piliers et de l’axe de la gâchette forme un triangle quasi équilatéral, favorisant la bonne tenue de la noix.
Le millésime 1847 est marqué sous le ressort.
Notons que la bride de noix et la gâchette ont un fini jaune obtenu par trempe dans l’huile. Ce traitement, qui existe depuis l’Ancien Régime, assure une protection contre la corrosion.
Les différents poinçons I et V frappés sur les vis, la bride de noix, la gâchette et la plaque de platine sont les marques des compagnons platineurs et d'assemblage final pour le 4 (voir plus loin) :
Cette photo montre la platine chien à la position du demi-armé qui permet de relever légèrement le chien pour qu’il n’appuie pas sur la capsule posée sur la cheminée.
La chaînette reliant la noix au ressort est mise ici en évidence, de même que l’extrémité inférieure du ressort agissant sur la gâchette :
La platine est encastrée dans son emplacement dans la monture.
On voit ici que la vis à ergots reste sur la monture. L’intérieur du logement de la platine est fortement marqué par les différentes matières grasses utilisées lors de l’entretien de larme.
Remarquons, sous le battant de bretelle, l’extrémité de sa goupille de fixation, survivance des vieux systèmes à silex … :
Le canon du fusil est assuré sur la monture par une vis traversant la queue de culasse que l’on voit sur cette vue. Cette pièce reçoit l’inscription du modèle de l’arme, ici Mle 1842 T. On voit que la hausse à cran de mire cache en partie l’inscription. C’est que cette pièce a été posée lors de la transformation T de l’arme en venant se placer en arrière et au dessus de l’ancienne hausse qui sera meulée à l’occasion.
Voici un dessin tiré de la planche 1 du cahier 2 du Boudriot "1833-1861 chargement bouche & percussion" et montrant comment la nouvelle hausse est fixée sur l’ancienne. Le cran de mire est réglé pour la hausse de 300 mètres.
Remarquons aussi comment la queue de culasse se prolonge derrière le filetage du bouchon.
Le pan gauche du canon porte traditionnellement les ponçons des directeurs de la Manufacture.
Ici M majuscule dans un cartouche formant blason et un T en cursive dans un cachet ovale.
Le matricule 444 est frappé sous les poinçons, il a été apposé selon l’ordonnance de 1854 lors de la numérotation générale des armes du corps d’affectation. Ce matricule est répété sur la gauche de la crosse, nous le verrons plus loin. Le registre des matricules de l’armement du corps de troupe est tenu à jour par l’officier armurier. Il permettait de suivre chaque arme : compagnie d’affectation, réparations, mouvements, etc …
Le pan droit du canon porte la masselotte de la cheminée. On y trouve plusieurs marquages.
Le millésime de l’année de fabrication du fusil, ici 1849. La mention MN pour Manufacture Nationale.
Les poinçons des contrôleurs du canon M et C (?) dans des cachets ovales.
Nous verrons plus loin qu’il y a d’autres marquages importants situés sous la monture :
Le canon est assuré sur la monture par trois bracelets ou garnitures.
Cette vue nous montre, de haut en bas, l’embouchoir, la grenadière et la capucine. Leurs ressorts à ergots (embouchoir) ou à épaulement (capucine et grenadière) sont mis en évidence. Chacune de ces pièces est marquée du poinçon d’un contrôleur.
Notons au passage que la monture a été réparée sous l’embouchoir. Nous en reparlerons :
Voici la photo rarement présentée d’une pièce toujours cachée : le ressort de baguette.
Cette pièce en forme de cuiller allongée appuie sur la baguette afin de la retenir dans sa saignée. Elle est posée à l’intérieur de la monture, entre la platine et la capucine, et bloquée en place par une goupille traversant le bois.
La sous-garde et le pontet protègent la détente, renforcent la poignée et retiennent le battant de bretelle.
La vis de maintien de la queue de culasse vient se serrer sur l’écusson, la pièce qui assure le pivotement de la queue de détente.
L’écusson est partiellement caché par la sous-garde.
Cette pièce allongée sous la poignée comporte deux croches permettant d’assurer la prise de la main droite. Elle est fixée à l’arrière par une vis à bois et à l’avant par la queue de l’axe de pivotement du battant de bretelle.
Enfin, le pontet vient protéger la queue de détente. Il est fixé à l’arrière par un crochet venant prendre la sous-garde, et à l’avant par la queue de l’axe de pivotement du battant de bretelle.
Cette dernière pièce traverse et assure le verrouillage du pontet et de la sous-garde via une goupille traversant la monture et cachée par la rosette de contre-platine.
Cette vue permet de voir toutes les pièces ce cet ensemble. Comme toujours, chaque pièce est poinçonnée :
Juste derrière la sous-garde, un marquage est frappé dans le bois. Il s’agit de nom de l’artisan crossier ayant fabriqué la monture.
Ici un certain J. Durand :
La crosse du fusil est destinée à permettre l’épaulé et la mise en joue lors des tirs, mais aussi à protéger la monture par l’intermédiaire de la plaque de couche. Toutes ces pièces portent des marquages qu’il est intéressant de détailler.
Côté gauche, la crosse porte le matricule que nous avons pu lire sur le pan gauche du canon. La position du matricule, la hauteur des caractères sont précisés par l’ordonnance de Mai 1854 :
La partie droite de la crosse porte une estampille circulaire ou macaron présentant 5 secteurs dans les quels on lit l’année de fabrication, le mois de fabrication, l’initiale du directeur de la manufacture, l’initiale du 1er contrôleur et l’initiale de la manufacture.
AU centre de cette estampille, un tampon de buis est collé dans un trou rond, pourtant les initiales du régime en place : MN, MR ou MI (EF sous le premier Empire)
Ici, tous ces marquages ont disparu, on distingue le début d’une année 18.. Le tampon de buis a été fortement dégradé sans doute par souci “politique“ …
Sous l’estampille, on peut lire St ETIENNE. C’est la manufacture ayant procédé à la transformation T du fusil. Là encore, l’emplacement de ce marquage est apposé selon la réglementation :
Enfin, la plaque de couche, pièce de protection du bois de la crosse et assurant l’épaulé par le tireur. Cette pièce en L est fixée par deux fortes vis à bois qu’il est conseillé de maintenir en bon état, notamment les filetages doivent êtres suiffés ou passés à la cire afin de ne pas rouiller dans le bois.
La plaque porte le n° 12, c’est le numéro du Régiment d’Infanterie attributaire du fusil :
Nous allons pouvoir maintenant démonter sommairement l’arme : séparer le canon de la monture. La monture porte deux réparations, des entures qui sont venues remplacer les parties abîmées. La première enture est une pièce d’environ 43 cm de long, qui va de la grenadière à l’embouchoir. C’était une réparation très courante de cette partie de la monture affaiblie par le passage du canon et la saignée de la baguette. La jointure entre les deux pièces est masquée par la grenadière :
La seconde enture, postérieure à la première est située à l’extrémité de la monture, justement celle qui avait déjà été enturée. Le bois a sans doute éclaté au niveau de l’entrée du canal de baguette, le long du ressort de l’embouchoir. La réparation est visible quand on retourne l’arme :
Nous avons dégagé le canon de la monture afin de détailler les différents détails masqués par le bois.
Sous la masselotte, nous lisons l’inscription S. 1858. Il s’agit de l’initiale de la manufacture ayant effectué la transformation T. Ici S pour St Etienne. Enfin 1858 est la date de cette opération :
Sous la queue de culasse, le numéro 455 et le caractère italique H. Les autres marquages sont ceux des différents ateliers par les quels est passé le canon.
Sous le canon, nous retrouvons le n° 455 H, sans doute un n° d’atelier.
Mais aussi le coup de burin de repère de l’alignement du bouchon de culasse et du canon.
Enfin, notez les poinçon E, 8 et P couronné. Ce sont ceux qui sont apposés lors de l’épreuve du canon, le poinçon E de l’épreuve, le 8 pour le mois de l’épreuve (octobre) et le poinçon du contrôleur chargé de l’épreuve :
À l'arrière du canon, le tonnerre est fermé par un bouchon de culasse vissé.
Cette vue permet de voir la conformation du bouchon et de la queue de culasse prolongée derrière la canon.
Cette pièce porte un grand poinçon 4 que nous avons déjà vu à l’intérieur de la plaque de platine :
Pour en finir avec le canon, cette photo permet de voir son état intérieur.
Les 4 rayures sont un peu usées, les marques laissées par les multiples introductions de la baguette sont évidentes.
Un peu usé, mais pas tant qua ça : la balle calibrée à 18,8 mm entre à frottement doux. Le canon est quasiment resté à son diamètre à neuf.
Et, effectivement, nous verrons que le canon a conservé toutes ses qualités de tir.
La revue de ce fusil ne saurait être complète sans examiner la baïonnette associée.
La baïonnette modèle 1822 est une lame triangulaire longue de 45 cm, fixée sur une douille entaillée en Z et assurée par une virole rotative. L’ensemble mesure 52,5 cm. Le fusil avec sa baïonnette mesure 1,885 mètre.
Enfin, retenons les principales dimensions du fusil Mle 1842 T :
En conclusion, nous venons d'examiner le successeur de feu le fusil Mle 1840.
Nous avons vu que la transformation T consistant à rayer son canon a été l'occasion de plusieurs marquages : T après le millésime de la queue de culasse, St Etienne marqué à la crosse et S. 1859 sous la masselotte du canon.
Fabriqué en 1849 et aussitôt mis en service, il a été rayé exactement 10 ans plus tard à l’issue de la campagne d’Italie. Il prendra sa retraite certainement un peu avant la guerre franco-allemande de 1870, ce qui l’ai mis à l’abri des hasards de la guerre.
Je précise que j'ai nettoyé sa monture qui était totalement noircie (crasse et diverses coulures de graisses et de rouille).
Dégraissage à l'acétone puis deux passes d'acide oxalique, puis rinçage. Huile de lin puis encaustique incolore puis astiquage.
Voici le fusil avant nettoyage du bois :
Dans son état, je n’ai pas hésité à l’apporter au pas de tir à 50 mètres pour voir ce dont il était capable.
Après avoir mesuré son calibre, j’ai préparé les balles les plus compatibles : la balle Mle 1854 dont j’ai fait faire le moule il ya 12 ans en 18,85 mm. J’ai recalibré/graissé la balle à 18,8 mm.
Question charges, je me suis inspiré de celles du 1853 TCar : entre 3,8 et 3,5 g de PNF1.
Après quelques essais, j’ai choisi la charge de 3,7 grammes de PNF1.
L’ensemble fusil 1842T + balle 1854 + 3,7 g de PNF1 produit ce carton, sachant qu’il faut pointer …. 10 cm SOUS le carton !
Si certains on les compétences permettant de reconnaître les hommes derrière leurs poinçon, je les remercie de leur participation.
Pour ma part, une arme passionnante, tant du point de vue technique qu'historique. Et qui ne laisse personne indifférent au pas de tir.
Bonne soirée à tous et à bientôt !
Dernière édition par St Etienne le Mar 10 Oct 2023 - 17:58, édité 1 fois
La nation : le dernier bien des pauvres.
Jean Jaurès
Re: Mon fusil d'Infanterie Modèle 1842 T
EXTRA ORDINAIRE et digne de figurer sur le "FLAG" du forum ,
mais pas assez US sans doute ? disent de nombreux amis ..
un fusil Savoyard ....peut être ??
mais pas assez US sans doute ? disent de nombreux amis ..
un fusil Savoyard ....peut être ??
Dernière édition par 3008nato le Lun 2 Oct 2023 - 11:58, édité 1 fois
3008nato- Pilier du forum
- Nombre de messages : 5624
Age : 80
Date d'inscription : 28/12/2012
Re: Mon fusil d'Infanterie Modèle 1842 T
très beau reportage!!!
Comme toujours
Comme toujours
turbine- Pilier du forum
- Nombre de messages : 1014
Age : 54
Localisation : pas de calais
Date d'inscription : 22/12/2011
Re: Mon fusil d'Infanterie Modèle 1842 T
Belle étude detaillée de cette arme en très bon état ,la profondeur des marquages et leurs netteté montrent qu'elle n'a pa subie un gros replissage .
Kerax- Membre confirmé
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Re: Mon fusil d'Infanterie Modèle 1842 T
Belle presentation comme d'habitude
austerlitz81- Membre
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Re: Mon fusil d'Infanterie Modèle 1842 T
Superbe !
Je vais reprendre le mien et faire une comparaison point par point, j'ai sûrement loupé des trucs...
Je vais reprendre le mien et faire une comparaison point par point, j'ai sûrement loupé des trucs...
Joel_- Pilier du forum
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Re: Mon fusil d'Infanterie Modèle 1842 T
Joel_ a écrit:Superbe !
Je vais reprendre le mien et faire une comparaison point par point, j'ai sûrement loupé des trucs...
Merci !
Et qu'est-ce qu'il donne au pas de tir ?
À bientôt !
La nation : le dernier bien des pauvres.
Jean Jaurès
Re: Mon fusil d'Infanterie Modèle 1842 T
J’ai le bonheur d’avoir un 1842 avec la platine de 1847. Cette très intéressante présentation m’incite, moi aussi, à le ressortir. À mon souvenir, il a également une réparation du fût par une enture dissimulée sous une boucle métallique. J’ai sauvé la baïonnette d’une destruction
Merci pour ce descriptif très détaillé et les photos illustrant bien les propos.
Je n’ai jamais tiré avec …
Merci pour ce descriptif très détaillé et les photos illustrant bien les propos.
Je n’ai jamais tiré avec …
obaneck- Pilier du forum
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Re: Mon fusil d'Infanterie Modèle 1842 T
Aucune idée, jamais tiré avec et le 50m de mon stand ne tolère que les .22 LR.St Etienne a écrit:Joel_ a écrit:Superbe !
Je vais reprendre le mien et faire une comparaison point par point, j'ai sûrement loupé des trucs...
Merci !
Et qu'est-ce qu'il donne au pas de tir ?
À bientôt !
Joel_- Pilier du forum
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Re: Mon fusil d'Infanterie Modèle 1842 T
C’est vrai que faire tousser un #1842 à côté de .22LR, ça fait désordre…
obaneck- Pilier du forum
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Localisation : Près de la Grande Bleue
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Re: Mon fusil d'Infanterie Modèle 1842 T
À une époque, on pouvait tirer sur ce pas avec "un peu ce qu'on voulait" et ça m'est arrivé de faire éructer ma carabine Smith en .50...obaneck a écrit:C’est vrai que faire tousser un #1842 à côté de .22LR, ça fait désordre…
Joel_- Pilier du forum
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Date d'inscription : 08/01/2016
Re: Mon fusil d'Infanterie Modèle 1842 T
Bonjour,
Belle présentation comme toujours
Belle présentation comme toujours
Tico- Pilier du forum
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Date d'inscription : 13/12/2016
3008nato- Pilier du forum
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Re: Mon fusil d'Infanterie Modèle 1842 T
Merci pour cette fantastique présentation et pour le carton sur C50!
C'est vraiment pas banal de voire des tireurs s'essayer sérieusement contre une cible avec une arme originale aussi ancienne!
Le diamètre des trous
C'est vraiment pas banal de voire des tireurs s'essayer sérieusement contre une cible avec une arme originale aussi ancienne!
Le diamètre des trous
vince24- Pilier du forum
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Localisation : Canberra
Date d'inscription : 04/04/2015
Re: Mon fusil d'Infanterie Modèle 1842 T
Bonjour.
Superbe et passionnante présentation de ce très beau exemplaire dans un magnifique état !!
Merci pour ce partage.
Salutations.
Olivier.
Superbe et passionnante présentation de ce très beau exemplaire dans un magnifique état !!
Merci pour ce partage.
Salutations.
Olivier.
Omahabeach- Membre confirmé
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Age : 63
Date d'inscription : 08/04/2018
Re: Mon fusil d'Infanterie Modèle 1842 T
Très belle présentation !
Ça va m'inciter à "éplucher" le mien
Merci
Ça va m'inciter à "éplucher" le mien
Merci
SMU- Membre expert
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Date d'inscription : 09/05/2013
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