Un fusil modèle 1853 Tcar
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TIR et COLLECTION Armes Règlementaires :: Armes règlementaires à poudre noire :: Armes à poudre noire à percussion
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Un fusil modèle 1853 Tcar
Le fusil modèle 1853 Tcar.
Avec une appellation pareille, c'est une arme qui ne pouvait pas ne pas arriver sur ce forum ...
Le même dessiné :
La platine et la hausse :
Le côté gauche :
La hausse réglable inspirée par celle de la carabine :
La sous-garde et le pontet :
La gueule du canon, la bayonnette, le guidon et l'embouchoir :
La bayonnette modèle 1847 du fusil comparée à la bayonnette mle 1822 :
Les poinçons :
Les poinçons que j'ai identifié :
S.1853 = fabrication du fusil à St Etienne
S.1861 = rayage et raccourcissement du fusil à St Etienne
MI = Manufacture Impériale
P : poinçon du contrôleur PRAJALA de 1840 à 1868
d : poinçon du mois d'épreuve du canon : d pour décembre (1853)
G couronné = poinçon du contrôleur GUASSON de 1848 à 1861
Le n° 1102 porté sur le pan gauche : n° de passage en transformation
Sous le canon, les n° des forgerons, maîtres canonniers, monteur en bois ...
Un aperçu historique :
Le fusil modèle 1853 fut adopté pour remplacer les armes du système 1842 alors en service et qui présentaient des signes d’usure.
Extérieurement identique au système 1842, le système 1853 fut conçu en prévision de l’adoption de la rayure dont on avait compris l’intérêt, mais qui était encore en développement. Le canon du fusil 1853 est donc plus étoffé en prévision de son rayage. On lui donna la baïonnette Modèle 1847, amélioration de la baïonnette Mle 1822 alors en service.
Le fusil 1853 lisse tirait un projectile particulier à base creuse et de profil hémisphérique dit “Balle Nessler“ de 17,2 mm de diamètre. Cette balle avait une meilleure précision que la balle ronde. On la chargeait dans le canon avec son enveloppe de papier suiffé. La charge était de 5 grammes de poudre.
Après l’adoption du système 1857, les fusils 1853 furent rayés en 1861 et raccourcis à la longueur du fusil de voltigeur. Ils prennent l'appellation : Mle 1853 T. Ils ont 4 rayures profondes de 0,2 mm au pas de 2 mètres, tournant de gauche à droite. L’arme pèse 4,250 kg, mesure 1,421 m. Le canon mesure 1,029 m et son calibre est de 17,8 mm. Il tire les balles Mle 1857 puis Mle 1863, des ogives de type Delvigne-Minié en plomb pur. La balle Mle 1863 pèse 36 g, la charge est de 4,5 g de poudre, la Vo est de 355 m/s.
En cette période d’innovations rapides, on réfléchissait également aux effets des armes rayées sur la manœuvre de l'infanterie au combat, mais aussi à la question de l’éventuelle adoption d’une hausse réglable pour les armes d’infanterie.
En effet, les fusils d’infanterie étaient alors dotés d’un unique cran de mire fixe (et surtout trop près de l'œil) donnant la hausse pour la distance de 300 pas (100 mètres). Seules, les carabines recevaient une hausse réglable, avec planchette relevable et curseur. Une belle carabine 1853 T est décrite sur ce forum.
L’infanterie pratiquait encore le tir sur 2 rangs, et les dispositifs tactiques assez rigides étaient quasiment les mêmes que ceux de la Grande Armée : la ligne, la colonne et le carré. Or l’adoption du fusil rayé permettait d’effectuer des tirs ajustés à des distances allant jusqu’à 400 mètres, performances jusque là réservées aux carabines. On comprend bien pour quelles raisons les procédés tactiques de l’infanterie devaient évoluer.
En 1861, on préleva environ 2000 fusils Mle 1853 T parmi les plus précis. Une hausse graduée réglable inspirée de celle de la carabine Mle 1859 fut brasée sur le canon. Leur dénomination changea et devint Fusil modèle 1853 T car, l’extension “car“ référant au mot carabine. (A noter que cette modification fut également effectuée sur des fusils 1842 T, appelés 1842 T car.) Ces fusils furent distribués dans les compagnies de plusieurs régiments de zouaves afin de procéder à des essais tactiques en corps de troupe.
L’expérimentation ne sera pas poursuivie. En effet, lors de la Guerre de Sécession Américaine, on a vu l’apparition en grand nombre d’armes à chargement par la culasse (Sharps, Spencer et Henry notamment). En France, des recherches et des expérimentations étaient menées parallèlement sur plusieurs systèmes de chargement par la culasse, et ces travaux ont mis en évidence que, pour obtenir la trajectoire la plus tendue possible à longue portée :
1- la réduction du calibre était incontournable.
2- le chargement par la culasse était le seul moyen d’obtenir un bon rendement balistique.
Par ailleurs, il apparut clairement que le fait de devoir rester debout pour charger son fusil était devenu quasiment suicidaire.
Ces conclusions portaient en elles la condamnation de tout système d’armes de gros calibre et à chargement par la bouche.
En 1863, à l’issue de ces essais, les fusils 1853 T car retournèrent en arsenal, et les zouaves retrouvèrent leurs carabines Modèle 1859 avant de toucher le fusil 1866 Chassepot..
Simple, fiable, solide, puissant et précis, le fusil Mle 1853 T car est à l’apogée de l’arme française d’infanterie à chargement par la bouche.
Depuis 1840, l’armement de l’infanterie française ne cesse de progresser. On passe en moins de 20 années de la mise de feu à silex à la cartouche complète. On passe du canon lisse tirant une bille sphérique à un canon rayé tirant un projectile auto-forcant à des distances plus que quadruplées. On passe du calibre de 18 mm au calibre de 11 mm. On multiplie par deux la vitesse initiale.
Ce fusil est le témoin d’une période passionnante de l’histoire de l’armement, c’est l’un des derniers fusils chargés par la bouche, armes qui, avec différents systèmes de mise de feu, auront été en usage depuis le XVI e siècle.
Mon fusil est en excellent état, et il fait 83/100 en discipline Lamarmora / Camerone il y a 6 semaines.
Avec une appellation pareille, c'est une arme qui ne pouvait pas ne pas arriver sur ce forum ...
Le même dessiné :
La platine et la hausse :
Le côté gauche :
La hausse réglable inspirée par celle de la carabine :
La sous-garde et le pontet :
La gueule du canon, la bayonnette, le guidon et l'embouchoir :
La bayonnette modèle 1847 du fusil comparée à la bayonnette mle 1822 :
Les poinçons :
Les poinçons que j'ai identifié :
S.1853 = fabrication du fusil à St Etienne
S.1861 = rayage et raccourcissement du fusil à St Etienne
MI = Manufacture Impériale
P : poinçon du contrôleur PRAJALA de 1840 à 1868
d : poinçon du mois d'épreuve du canon : d pour décembre (1853)
G couronné = poinçon du contrôleur GUASSON de 1848 à 1861
Le n° 1102 porté sur le pan gauche : n° de passage en transformation
Sous le canon, les n° des forgerons, maîtres canonniers, monteur en bois ...
Un aperçu historique :
Le fusil modèle 1853 fut adopté pour remplacer les armes du système 1842 alors en service et qui présentaient des signes d’usure.
Extérieurement identique au système 1842, le système 1853 fut conçu en prévision de l’adoption de la rayure dont on avait compris l’intérêt, mais qui était encore en développement. Le canon du fusil 1853 est donc plus étoffé en prévision de son rayage. On lui donna la baïonnette Modèle 1847, amélioration de la baïonnette Mle 1822 alors en service.
Le fusil 1853 lisse tirait un projectile particulier à base creuse et de profil hémisphérique dit “Balle Nessler“ de 17,2 mm de diamètre. Cette balle avait une meilleure précision que la balle ronde. On la chargeait dans le canon avec son enveloppe de papier suiffé. La charge était de 5 grammes de poudre.
Après l’adoption du système 1857, les fusils 1853 furent rayés en 1861 et raccourcis à la longueur du fusil de voltigeur. Ils prennent l'appellation : Mle 1853 T. Ils ont 4 rayures profondes de 0,2 mm au pas de 2 mètres, tournant de gauche à droite. L’arme pèse 4,250 kg, mesure 1,421 m. Le canon mesure 1,029 m et son calibre est de 17,8 mm. Il tire les balles Mle 1857 puis Mle 1863, des ogives de type Delvigne-Minié en plomb pur. La balle Mle 1863 pèse 36 g, la charge est de 4,5 g de poudre, la Vo est de 355 m/s.
En cette période d’innovations rapides, on réfléchissait également aux effets des armes rayées sur la manœuvre de l'infanterie au combat, mais aussi à la question de l’éventuelle adoption d’une hausse réglable pour les armes d’infanterie.
En effet, les fusils d’infanterie étaient alors dotés d’un unique cran de mire fixe (et surtout trop près de l'œil) donnant la hausse pour la distance de 300 pas (100 mètres). Seules, les carabines recevaient une hausse réglable, avec planchette relevable et curseur. Une belle carabine 1853 T est décrite sur ce forum.
L’infanterie pratiquait encore le tir sur 2 rangs, et les dispositifs tactiques assez rigides étaient quasiment les mêmes que ceux de la Grande Armée : la ligne, la colonne et le carré. Or l’adoption du fusil rayé permettait d’effectuer des tirs ajustés à des distances allant jusqu’à 400 mètres, performances jusque là réservées aux carabines. On comprend bien pour quelles raisons les procédés tactiques de l’infanterie devaient évoluer.
En 1861, on préleva environ 2000 fusils Mle 1853 T parmi les plus précis. Une hausse graduée réglable inspirée de celle de la carabine Mle 1859 fut brasée sur le canon. Leur dénomination changea et devint Fusil modèle 1853 T car, l’extension “car“ référant au mot carabine. (A noter que cette modification fut également effectuée sur des fusils 1842 T, appelés 1842 T car.) Ces fusils furent distribués dans les compagnies de plusieurs régiments de zouaves afin de procéder à des essais tactiques en corps de troupe.
L’expérimentation ne sera pas poursuivie. En effet, lors de la Guerre de Sécession Américaine, on a vu l’apparition en grand nombre d’armes à chargement par la culasse (Sharps, Spencer et Henry notamment). En France, des recherches et des expérimentations étaient menées parallèlement sur plusieurs systèmes de chargement par la culasse, et ces travaux ont mis en évidence que, pour obtenir la trajectoire la plus tendue possible à longue portée :
1- la réduction du calibre était incontournable.
2- le chargement par la culasse était le seul moyen d’obtenir un bon rendement balistique.
Par ailleurs, il apparut clairement que le fait de devoir rester debout pour charger son fusil était devenu quasiment suicidaire.
Ces conclusions portaient en elles la condamnation de tout système d’armes de gros calibre et à chargement par la bouche.
En 1863, à l’issue de ces essais, les fusils 1853 T car retournèrent en arsenal, et les zouaves retrouvèrent leurs carabines Modèle 1859 avant de toucher le fusil 1866 Chassepot..
Simple, fiable, solide, puissant et précis, le fusil Mle 1853 T car est à l’apogée de l’arme française d’infanterie à chargement par la bouche.
Depuis 1840, l’armement de l’infanterie française ne cesse de progresser. On passe en moins de 20 années de la mise de feu à silex à la cartouche complète. On passe du canon lisse tirant une bille sphérique à un canon rayé tirant un projectile auto-forcant à des distances plus que quadruplées. On passe du calibre de 18 mm au calibre de 11 mm. On multiplie par deux la vitesse initiale.
Ce fusil est le témoin d’une période passionnante de l’histoire de l’armement, c’est l’un des derniers fusils chargés par la bouche, armes qui, avec différents systèmes de mise de feu, auront été en usage depuis le XVI e siècle.
Mon fusil est en excellent état, et il fait 83/100 en discipline Lamarmora / Camerone il y a 6 semaines.
Dernière édition par St Etienne le Mer 08 Oct 2014, 22:49, édité 1 fois
Re: Un fusil modèle 1853 Tcar
Jolie référence au nom du forum et encore une arme magnifique. Merci pour le topo :bravo:
Pocomas- Administrateur
- Nombre de messages : 19447
Age : 69
Date d'inscription : 28/12/2008
Re: Un fusil modèle 1853 Tcar
Fabian23 a écrit:
C'est le même que celui-ci?
Oui. Je te l'avais montré par mail aussi.
Depuis, je l'ai nettoyé, changé la cheminée et donné une baguette.
Re: Un fusil modèle 1853 Tcar
J'étais pas sur si c'était la même personne derrière les deux pseudos , mais il y avait de fortes chances vue de la rareté du fusil et le beau dessin.
1822 Tcar?
J'ai trouvé un fusil aux US avec la désignation 1822 Tcar.
Le fusil est une transformation 1822 T classique avec platine "en avant" et masselote sphérique, la date d'origine du canon est 1823. La hausse est réglable jusqu'à 900 pas (ou mètres?)
Je ne pensai pas que la modif "Tcar" était appliqué aux bon vieux 1822...
Le fusil est une transformation 1822 T classique avec platine "en avant" et masselote sphérique, la date d'origine du canon est 1823. La hausse est réglable jusqu'à 900 pas (ou mètres?)
Je ne pensai pas que la modif "Tcar" était appliqué aux bon vieux 1822...
Re: Un fusil modèle 1853 Tcar
Bonsoir Fabian,
Magnifique ! Bonne pioche !
(Mais quel dommage d'être obligé d'aller aux States pour le récupérer.)
La Transformation Carabine a concerné surtout les fusils Mle 1853, mais aussi quelques fusils Mle 1842.
Et un document évoque que des fusils Mle 1822 T ont aussi reçus cette transformation.
Dès que je remets la main dessus, je vous le montre.
La transformation Tcar consistait à braser une hausse à planchette et index mobile et à rayer le canon, normalement 4 rayures au pas de 2 mètres selon une profondeur progressive. Ajoutons que les bayonnettes de ces armes recevaient un grain d'orge brasé sur la douille afin de permettre le tir planchette relevée lorsque la bayonnette est en place.
Est-ce que tu aurais d'autres photos ... ?
Encore bravo !
Magnifique ! Bonne pioche !
(Mais quel dommage d'être obligé d'aller aux States pour le récupérer.)
La Transformation Carabine a concerné surtout les fusils Mle 1853, mais aussi quelques fusils Mle 1842.
Et un document évoque que des fusils Mle 1822 T ont aussi reçus cette transformation.
Dès que je remets la main dessus, je vous le montre.
La transformation Tcar consistait à braser une hausse à planchette et index mobile et à rayer le canon, normalement 4 rayures au pas de 2 mètres selon une profondeur progressive. Ajoutons que les bayonnettes de ces armes recevaient un grain d'orge brasé sur la douille afin de permettre le tir planchette relevée lorsque la bayonnette est en place.
Est-ce que tu aurais d'autres photos ... ?
Encore bravo !
Pas encore
Il n'est pas encore "à moi". Je cherche justement des infos avant de piocher car je ne connaissait pas cette variante. Ta documentation serait le bienvenue
Re: Un fusil modèle 1853 Tcar
Belles photos et texte très instructif comme souvent.... (toujours ?)
manath34- Pilier du forum
- Nombre de messages : 1962
Age : 55
Localisation : 34
Date d'inscription : 18/02/2017
Une classe indegnible
J'adorre les lignes simples mais deja parfaites de ces fusils.
À chaque fois c'est un véritable régal pour les yeux.
Jean louis
À chaque fois c'est un véritable régal pour les yeux.
Jean louis
Jean Louis- Futur pilier
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Age : 72
Localisation : La plus belle ville du Gard
Date d'inscription : 25/07/2010
Re: Un fusil modèle 1853 Tcar
manath34 a écrit:Belles photos et texte très instructif comme souvent.... (toujours ?)
"Laudamus veteres sed nostris utimur annis "
Baccardi- Administrateur
- Nombre de messages : 17843
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Localisation : Canton de l'Ours
Date d'inscription : 20/01/2012
Re: Un fusil modèle 1853 Tcar
Pour compléter ce superbe post très instructif et illustré, je vous donne la vision et l'analyse du capitaine Rayne sur l'évolution des modèles à l'époque de l'adoption du 1853...
De 1842 à 1853, la commission de Vincennes avait surtout eu à tourner son attention du côté des armes rayées : les fusils lisses subirent par suite un temps d’arrêt dans leurs changements. En 1853 seulement fut établi un fusil neuf, dit modèle 1853, mais qui ne différait du modèle 1842 que par les points sur lesquels devait entrainer des modifications ultérieures l’adoption des rayures, qu’on prévoyait déjà devoir être étendue à toutes les armes de l’infanterie. Ainsi le calibre fut réduit de 18 à 17,8 mm. Pour ne pas masquer la ligne de mire par la tête du chien, car on présumait que ce modèle recevrait une hausse mobile, on reporta la masselotte sur la droite de l’axe du canon, en sorte qu’elle faisait saillie sur le pan latéral droit. Enfin, toujours en vue du placement de la hausse mobile, on prolongea de beaucoup le pan supérieur du canon.
Les études faites sur les armes rayées jusqu’alors provoquèrent définitivement leur usage général pour toute l’infanterie. On créa donc le fusil rayé modèle 1857, en même temps qu’on appliqua cette nouvelle transformation aux autres modèles déjà en service. En conséquence, les bases de l’armement de notre infanterie en 1857 étaient constituées de la manière suivante :
1/ fusil rayé Mle 1822 Tbis
2/ fusil rayé Mle 1842 T
3/ fusil rayé Mle 1853 T
4/ fusil rayé Mle 1857.
Les fusils modèle 1840 avaient été entièrement retirés du service et en partie vendus à l’étranger.
D’autre part pour tous les fusils antérieurs à 1857, il existait pour chaque modèle deux types portant le même millésime, mais une dénomination particulière motivée par leurs différences dans la longueur du canon : l’un était dit fusil d’infanterie, l’autre fusil de voltigeurs.
Si à la liste précédente j’ajoute :
1/ l’armement de la garde, pour lequel existaient également 2 variétés, l’une dite fusil de grenadier, l’autre fusil de voltigeur et qui était formé par le :
1/ fusil rayé de la garde Mle 1854
et 2/ l’armement spécial des chasseurs à pied qui de 1857 à 1866 a été formé des modèles suivants :
1/ carabine à tige Mle 1846
2/ carabine à tige Mle 1853
3/ carabine sans tige Mle 1859
4/ carabine sans tige Mle 1846
5/ carabine sans tige Mle 1853
j’aurai présenté le tableau complet des armes à feu portatives sur lesquelles ont dû porter les effets de la transformation au chargement par la culasse, effets qui ont été soit une suppression absolue de quelques-uns de ces modèles, soit l’utilisation de quelques autres après y avoir exécuté des changements de dispositions nécessités par le changement du système de chargement.
Au moment de l’adoption du système percutant et de la création du fusil Mle 1842, on songea à étudier si la position de la lumière avait de l’influence sur l’inflammation de la charge, et par suite à déterminer le point le plus convenable où elle devait déboucher dans l’âme. Ces expériences se firent à l’aide du fusil-pendule. On tira des fusils dont les débouchés de la lumière étaient situés à 2,3 mm – 4,6 mm – 6,9 mm en avant du fond de l’âme. On constat ainsi par la mesure des vitesses initiales une différence très peu sensible à la vérité en faveur de la distance de 6,9 mm. Celle-ci permettait en outre à la crasse de s’agglomérer au fond du canon sans obstruer la lumière. Aussi c’est cette distance qui fut adoptée pour l’établissement du canal de lumière dans le modèle 1842, comme dans les modèles postérieurs.
Logement de la cheminée :
Le centre du logement de la cheminée est déterminé par sa distance à la tranche de la culasse, et par son écartement sur la droite de l’axe du canon, ou du plan de tir. Dans les fusils Mle 1842T, la 1ère distance est égale à 12 mm : la 2em plus importante, puisqu’il y avait à satisfaire à cette condition que la ligne de mire ne fût pas masquée par la tête du chien, est de 7 mm, sans tolérance en moins et avec 0,5 mm de tolérance en plus. De cette manière la masselotte arrose le pan latéral droit.
Dans les fusils Mle 1853T, comme on prévoyait qu’ils seraient rayés prochainement et qu’ils recevraient une hausse mobile, on chercha à démasquer davantage la ligne de mire, en rejetant la masselotte plus encore sur la droite, de telle sorte qu’elle faisait saillie sur le pan latéral droit (fig A).
La même disposition fut maintenue sur les fusils Mle 1857 (fig B).
Pour achever d’assurer la direction de l’axe de la cheminée, il fallait déterminer son inclinaison par rapport au pan supérieur. Cette inclinaison n’était pas indifférente. Il est facile de comprendre que pour une longueur de chien constante OC et une même force d’impulsion MC qui s’exerce suivant la tangente à la circonférence décrite par le chien, le maximum d’effet utile dans la percussion sera obtenu lorsque le plan de percussion OC passera par l’axe de rotation O. s’il passe au dessus, le choc tendra à séparer le canon de la platine : s’il passe au dessous, il tendre à les rapprocher. Les figures ci-contre mettent ces effets en relief. Malheureusement, dans les modèles 1842T, ces principes n’ont pas été respectés car l’inclinaison qui a été adoptée est de 123°, et laisse d’une quantité notable le centre de rotation au dessous du plan de percussion. La hausse fixe de la culasse est une des causes principales d’impossibilité que l’on a trouvées, à incliner davantage la cheminée. Il en résulte un fort tirage sur la vis de culasse, un ébranlement du corps de platine et un porte-à-faux sur la cheminée qui peut se casser.
Les fusils Mle 1853 ayant reçu une masselotte plus à droite, on aurait pu y apporter une amélioration à ce point de vue, en augmentant l’inclinaison de l’axe de la cheminée mais l’ancienne disposition a été conservée.
La cheminée repose dans son logement sur la masselotte par son embase, laquelle préserve les filets en supportant presque entièrement les efforts du chien.
Hausse fixe et guidon :
Les effets du tir d’une arme dépendent en partie des dispositions prises pour mettre le tireur à même de diriger convenablement son arme par rapport au but à atteindre. Pour satisfaire à cette condition on avait fixé la ligne de mire naturelle de l’arme à l’aide de la hausse fixe et du guidon (voir croquis img 8284).
Les anciennes armes à silex n’avaient pas de hausse fixe aussi leur pointage était-il incertain. Des expériences furent faites dès 1828 qui démontrèrent combien l’emploi de ce repère pour la ligne de visée était avantageux. Son adoption n’eut lieu cependant qu’en 1840. Dès cette époque les armes transformées à percussion, par conséquent nos fusils Mle 1822Tbis reçurent une hausse fixe rapportée et encastrée dans la queue de culasse à queue d’aronde.
Dans les modèles 1842, 1853 et 1857, la hausse fixe était d’une seule pièce relevée de forge sur la queue de culasse.
Le 2e point devant déterminer la ligne de mire naturelle était le guidon, autre élévation établie près de la bouche. La ligne de mire devant être invariable de situation par rapport à l’axe du canon, toute disposition permettant une variation quelconque dans les points qui la déterminent devait être radicalement vicieuse. Les anciennes armes à silex par exemple sur lesquelles le guidon était placé sur l’embouchoir, garniture mobile, présentaient cet inconvénient. On y a remédié dans les armes à percussion, en brasant sur le canon lui-même l’embase du guidon.
Quant à la fixation de la hausse fixe sur la queue de culasse, elle était aussi défectueuse car la ligne de mire pouvait être également faussée par le moindre dérangement dans l’ajustage du canon et de la culasse. Il suffisait d’un coup de tourne à gauche un peu violent pour produire ce dérangement. Il semble qu’il eût été bien préférable de placer cette hausse fixe sur le tonnerre en avant de la cheminée, ainsi que cela a été pratiqué pour la hausse mobile de nos carabines.
D’une manière générale on peut dire que les formes et les dimensions du can de mire et du guidon, ainsi que l’intervalle qui les sépare entre eux et de l’œil du tireur sont liés par certains rapports qu’il convient toujours de prendre en considération lors de l’établissement d’une arme nouvelle.
Une des principales difficultés que l’on rencontre à bien viser tient à l’organisation même de notre œil. Cet organe, fonctionnant comme véritable instrument d’optique, a nécessairement en lui-même un moyen d’action qui lui permet de s’accommoder aux diverses distances de l’objet qu’il regarde. Par conséquent, il doit lui être à peu près impossible de bien voir simultanément 3 objets alignés à la suite l’un de l’autre à des distances très différentes. Personne, en ajustant un fusil, ne saurait embrasser nettement, du même coup d’œil, les circonscriptions du cran de mire, du guidon et du but à toucher. Mais cet inconvénient se manifeste d’une manière plus remarquable encore, lorsque le plus rapproché de ces 3 objets, le cran de mire, se trouve en deçà de la portée de la vision distincte qui est de 25 cm pour un œil ordinaire. En général, alors les contours de l’entaille n’apparaissent plus clairement et ils disparaissent tout à fait, dès que l’on fixe le guidon et le point servant de but.
Si au contraire le cran de mire se trouve un peu au delà de la portée de la vue distincte, s’il est par exemple à 30 cm en avant de l’œil qui vise, l’expérience prouve qu’il devient possible à l’œil fixé sur le guidon, de recevoir en même temps des impressions non pas très vives mais du moins suffisamment nettes du but et du cran de mire.
Un homme de taille moyenne doit, pour bien coucher en joue sans se gêner, c’est-à-dire sans trop pencher ou tourner la tête, pouvoir placer son œil à la bonne distance du cran de mire, qui est d’environ 30 cm. Pour cela il est nécessaire que le cran de mire soit à environ 52 cm de la crosse, ou à environ 10 cm de l’extrémité postérieure du canon. Telle est en effet la position qu’on lui a généralement donnée sur les meilleurs modèles d’armes modernes, du moins pour celles sur lesquelles on a établi des hausses mobiles, telles que les carabines de chasseurs.
Car au contraire pour les fusils d’infanterie se chargeant par la bouche, on s’est écarté des principes que je viens d’exposer la position de la hausse fixe sur la culasse jointe à ce que la monture pêche par défaut de longueur, amenait le cran de mire beaucoup trop près de l’œil.
Autant que possible le guidon ne doit offrir au regard qu’une face terne ou du moins sans reflets, et pour cela il faut que sa face postérieure tombe sur le canon perpendiculairement à l’axe. Sur nos armes antérieures à 1866, on avait donné à cette pièce la forme en dos de puce ou demi lune, et l’on ne saurait ne pas critiquer cette disposition ; elle offrait en effet à l’œil du tireur un point lumineux qui rendait très difficile le tir à guidon fin, et ne permettait guère que le tir à guidon découvert, c’est-à-dire le tir incertain (img 8286) à la vérité ces contours arrondis favorisaient la conservation du guidon en l’exposant moins aux mutilations accidentelles. Au point de vue de la commodité et de l’exactitude du pointage, il eût été préférable d’employer la forme d’un triangle dont l’angle supérieur serait tronqué par une ligne droite ou par un petit arc. Ce perfectionnement a été appliqué dans notre fusil Mle 1866.
Quant au cran de mire, sur les fusils du modèle 1822Tbis, elle était celle d’un V, sur les fusils Mle 1842T et ceux postérieurs, d’après l’expérience, on fut conduit à préférer la forme arrondie.
En outre, on abattit les angles extérieurs et supérieurs de cette hausse fixe pour ne pas gêner le passage du chien.
La hauteur relative du guidon et du cran de mire de la hausse fixe, au dessus du canon, fut réglée de telle sorte que, pour toutes les distances comprises dans les limites ordinaires du combat (200 mètres), le soldat n’eût qu’à viser un point quelconque du but pour l’atteindre. Cette hauteur relative tenait donc aux propriétés balistiques de l’arme, aussi était-elle variable sur les modèles divers successivement ou simultanément en service.
Cette condition d’assurer à l’arme un but de blanc à 200 mètres imposa des modifications aux hauteurs de hausses fixes encastrées à queue d’aronde dans les fusils Mle 1822Tbis, un accroissement dans les hauteurs et épaisseurs de la hausse fixe pour les fusils Mle 1842T. Pour ces derniers la hauteur fut portée à 11 mm au dessus de la queue de culasse, mesure prise par derrière, du fond du cran de mire, sans tolérance en dessous, c’est-à-dire augmentée de 4 mm, pour cela on avait placé sur l’arme derrière la hausse fixe existante une pièce en fer de hauteur et d’épaisseur convenables. Elle y était maintenue par 2 rivets noyés dans le corps de l’ancienne hausse. Les 2 corps furent raccordés en faisant disparaître l’ancien cran de mire.
Sur les fusils Mle 1854 de la Garde, la hausse fixe avait été établie d’une seule pièce, relevée de forge sur la queue de culasse et d’une hauteur de 11 mm également, pour le même but en blanc à 200 mètres.
Hausse à curseur mobile, ou à échelle :
Sur les carabines dont la portée était plus considérable, on avait disposé sur le canon même, en avant du tonnerre, une hausse du genre appelé à curseur mobile. Elle se composait d’un pied en fer brasé sur le canon, et d’une planche mobile en acier sur laquelle glissait le curseur en acier, dans lequel était pratiqué un cran de mire. Un ressort encastré dans le pied de la hausse assurait la fixité de la planche. Sur le côté gauche de la planche étaient marqués, en centaines de mètres des traits indicateurs du tir. Sur le côté droit se trouvait une graduation en millimètres et dont le but était de faciliter le règlement des hausses, dont les valeurs variaient avec les saisons et les circonstances atmosphériques, comme avec l’état du m…. une petite vis sans fente, nommée arrêtoir, se trouvait fixée à l’extrémité de la planche pour limiter le mouvement du curseur mobile.
Cette hausse fournissait 4 lignes de mire fixes en principe :
1/ à 175 m – planche couchée, cran du talon
2/ à 275 m – planche relevée, cran inférieur
3/ à 390 m – planche relevée, curseur abaissé le plus possible
4/ à 1100 m – planche relevée, cran supérieur de la planche.
Lorsque les carabines à tige furent transformées sans tige, on du modifier cette hausse : néanmoins on conserva la même planche et on se borna à effacer les anciens traits pour en graver de nouveaux correspondants aux portées de la nouvelle balle.
Principaux appareils de hausse :
Comme appareils mobiles servant à mesurer les hausses, on a imaginé et appliqué soit en France soit à l’étranger bien des dispositifs divers. Quels qu’ils soient, ils doivent satisfaire à des conditions générales que je résumerai ainsi :
Une grande solidité, une construction simple, un entretien commode, des réparations faciles, aucune gêne pour le maniement de l’arme, un emploi facile, sûr, et n’offrant aucune chance d’erreur, un mouvement du cran de mire rapide, continu, impossibilité pour ce curseur de se déplacer autrement qu’à la volonté du tireur.
Hausses à lamettes :
Les hausses à lamettes se composent de lames portant chacune à la partie supérieure un cran de mire : l’une de ces lames est fixe de position et correspond au 1er but en blanc de l’arme : les autres, partant du même pied, sont réunis à l’aide de charnières et d’une goupille. Elles correspondent à divers buts en blanc artificiels. Le pied de cet ensemble de hausses est encastré à queue d’aronde dans le fer du canon.
Ce genre de hausses a été d’un usage fréquent dans les armes des puissances étrangères : en France elles n’ont été réglementairement employées que pour le fusil de rempart Mle 1831.
Un 1er inconvénient de ce système est de multiplier outre mesure le nombre des lamettes, lorsque les distances de tir sont un peu nombreuses et d’exposer ainsi le soldat à commettre facilement des erreurs en prenant une lamette pour une autre.
Un 2e inconvénient, c’est le manque de fixité : avec l’usage les lamettes finissent par tourner gaiement autour de leurs charnières, et dès lors, avant de s’en servir, e soldat doit s’assurer que la direction de la hausse qu’il emploie est bien perpendiculaire à l’axe du canon.
Hausse à trous :
La hausse à trous est une simplification et une amélioration des hausses à lamettes. Elles furent appliquées en France sur les armes rayées de 1842, carabines et fusil de rempart. Le nombre de lamettes est réduit à 2, l’une fixe, l’autre mobile : mais pour remédier au manque de fixité de cette dernière, son pied porte un talon sur lequel vient s’appuyer un ressort fixé à la lamette elle-même. Lorsqu’on la relève, le ressort passant par dessus le talon, presse contre celui-ci et assure l’immobilité de la lame.
Les 2 lamettes sont juxtaposées et portent chacune un cran de mire à leur partie supérieure. Mais pour suppléer aux lamettes qui ont été supprimées, elles portent en outre un certain nombre de trous à crans de mire qui servent à viser suivant les distances.
Les carabines mle 1842 avaient à chaque lame un cran de mire et un trou à cran, ce qui donnait 4 lignes de mire, les fusils de rempart en avaient 5, à savoir un trou et un cran de mire à la lame fixe, 2 trous et un cran de mire à la lame mobile.
Ce genre de hausse présente, comme le genre à lamettes, l’inconvénient de ne pouvoir servir que pour un nombre restreint de distances de tir : les soldats sont encore exposés à commettre facilement des erreurs, et de plus quand l’objet à atteindre est très mobile, il est difficile de le suivre par les trous de mire.
Canon
Intérieur :
Avant d’être rayée, l’âme des canons de fusil d’infanterie présentait la forme simple d’un cylindre uni : sa longueur et son diamètre étaient dès lors les seuls éléments à considérer. Or j’ai indiqué précédemment les nombres qui avaient été successivement adoptés pour la 1ère de ces dimensions, ainsi que les raisons qui avaient servi de bases à leur détermination (p.17).
Je vais établir maintenant l’historique des variations du calibre de nos armes, de celui des projectiles employés d’où découlera le tableau des variations du vent admis avec chacune d’elles. Je jetterai un coup d’œil sur les diverses charges dont il a été fait usage et sur les résultats pratiques que l’on obtint, au point de vue du tir, avec de tels éléments. C’est en recherchant à quelles causes devront être attribués les effets médiocres fournis par ces armes, que je serais conduit à étudier les moyens à l’aide desquels ont été réalisés des progrès si considérables dans la puissance de nos fusils, à savoir l’adoption des rayures, la réduction du calibre, le chargement par la culasse.
Historique des variations
1/du calibre des fusils d’infanterie :
Le calibre du canon des fusils d’infanterie n’a pas varié depuis 1777 jusqu’en 1842. Pendant cette période il est resté fixé à 17,48 mm.
Au moment de l’adoption des armes à percussion, en 1842, il fut porté à 18 mm. On voulut de cette manière se placer dans des conditions telles qu’il fût possible, dans tel cas donné, d’utiliser dans les armes françaises les munitions des puissances étrangères qui, telles que l’Angleterre, l’Espagne, la Suède, avaient un projectile de 17,5 mm de diamètre.
En 1853, les études sur les armes rayées étaient déjà assez avancées pour qu’il fût permis de prévoir l’adoption prochaine des rayures pour l’armement général de l’infanterie : en conséquence les armes neuves établies à partir de cette époque furent ramenées au calibre de 17,8 mm.
2/ du diamètre des balles, du vent et des charges employées :
Quant au diamètre des balles qui furent conservées sphériques jusqu’en 1857 pour les fusils d’infanterie, de 1777 à 1792, il fut fixé à 16,54 mm (18 à la livre), ce qui donnait un vent égal à (17,48-16,54) 0,94 mm. Cette balle avait un poids de 27,2 gr.
En 1792 on fut obligé à une réduction dans le diamètre des balles par suite à une augmentation du vent, par la mauvaise fabrication des armes, la maladresse des faiseurs de cartouches, les dénonciations de ceux qui voyaient partout des crimes de haute trahison. On eut alors des balles de 15,98 mm (2à à la livre), ce qui donnait un vent égal à (17,48-15,98) 1,50 mm. Le poids de ces balles allégées était de 24,2 gr.
Mais on reconnut bien vite qu’on avait ainsi perdu sans nécessité une partie de la justesse des armes. La succession rapide des évènements qui s’accomplissaient alors s’opposa à une amélioration immédiate, et ce ne fut que sous la Restauration qu’on put se livrer à de nouvelles études qui conduisirent à de nombreux perfectionnements.
Ainsi en 1827 on adopta une balle de 16,35 mm (19 à la livre) ce qui réduisait le vent à (17,48-16,35) 1,13 mm, et le poids de la balle se trouva porté à 25,6 gr.
Cette dernière balle resta en usage jusqu’en 1842, époque à laquelle son diamètre fut porté à 17,5 mm ce qui ne laissait pour le vent que (18 – 17,5) 5 mm. Le poids de la balle arriva à 29,3 gr.
Un nouveau changement eut lieu dans le calibre de la balle en 1848. On diminua son calibre de 0,3 mm, lequel devint alors 16,7 mm. Le vent se trouva par suite élevé à (18-16,7) 1,3 mm. Ce fût là une mesure des plus fâcheuses et il convient de constater que cette décision ministérielle fut prise en dehors du Comité d’artillerie. On ne saurait s’expliquer cette modification étrange, que par les préoccupations et les craintes d’une guerre européenne qui pouvait surgir à cette époque. Car les motifs invoqués d’une façon explicite dans la circulaire relative à ce changement sont loin d’être suffisamment sérieux pour compenser les mauvaises conséquences qui s’en suivirent au point de vue du tir. On avait remarqué, disait-on, à l’Armée d’Afrique, que l’encrassement rendait impossible le service de l’arme au bout d’un petit nombre de coups. Or pour une arme qui s’encrasserait de 1 mm après quelques coups, l’encrassement n’arriverai-il pas aussi vite à remplir 1,3 mm. D’autre part 0,3 mm enlevés au calibre de la balle diminuent la masse de celle-ci, augmentent le vent de l’arme et doivent altérer la justesse du tir, en même temps que diminue la portée et l’effet utile du projectile.
Car il importe de remarquer que si l’emploi d’un petit calibre est avantageux pour les projectiles allongés, il est au contraire un inconvénient avec des balles sphériques, attendu que celles-ci ressentent d’autant moins les effets de la résistance de l’air que leur poids ou masse, et portant leur diamètre, est plus grand, à égalité de vitesse initiale.
(voir calculs img 8297)
L’influence retardatrice de la résistance de l’air sur la vitesse sera plus sensible sur la vitesse de la petite balle que sur celle de la balle de plus gros calibre.
On comprend dès lors que la réduction qui fut établie sur le calibre de la balle sphérique en 1848 était une modification des plus malheureuses, et ce qui le confirme, c’est que le but en blanc de l’arme tomba de 150 à 109 mètres.
On remédia à ces conséquences fâcheuses d’abord par l’emploi de la cartouche graissée, ce qui permit de réduire le vent dans des proportions considérables en employant une balle d’une forme particulière dite balle Nessler pour armes lisses, dont le diamètre était égal à 17,2, le vent n’était plus dès lors que de (18-17,2) 0,8 mm.
Les fusils lisses d’infanterie se trouvèrent ainsi dotés d’un perfectionnement très sensible.
3/ des charges employées :
Un fait remarquable consiste dans la coïncidence constante entre les diminutions des charges et les accroissements du vent, ou inversement des augmentations des premières et la réduction du second. Ainsi de 1777 à 1828 la charge avait été fixée invariablement à 1/40 de livre, c’est-à-dire à 12,24 gr, amorce comprise. On s’était dans cette détermination arrêté à la limite supérieure du recul, que le tireur pouvait supporter, tout en cherchant à donner au projectile la plus grande vitesse initiale possible.
En 1827, la balle ayant été augmentée de 2 gr environ par suite le vent ayant été diminué de 0,37 mm, d’autre part les calibres étant devenus plus exacts par suite des progrès de la fabrication des armes et enfin la poudre à canon ayant été remplacée par la poudre à mousquet, on ne tarda pas à se plaindre de la violence presque intolérable du recul. On eut donc à rechercher quelle était la charge la plus convenable pour la balle de 16,3 m. La Commission de 1828 fut ainsi amenée à adopter 9,5 gr, charge avec laquelle le recul était moindre et la portée plus grande qu’antérieurement, grâce à la diminution du vent et à l’emploi d’une poudre plus puissante, on ajoutait 1 gr pour l’amorce, dans la confection de la cartouche.
Le poids réglementaire de la charge resta tel jusqu’en 1840, époque à laquelle on le réduisit à 9 gr, l’adoption du système à percussion ayant déterminé une augmentation notable du recul de l’arme, par suite de l’inflammation plus rapide de la charge et de la suppression presque absolue des pertes de gaz par la lumière.
En 1842 l’augmentation de poids du projectile et la diminution du vent obligèrent à diminuer la charge pour ne pas exagérer le recul : elle fût fixée à 8 gr.
En 1848, pour compenser la réduction apportée dans le diamètre de la balle, la charge fut portée de nouveau à 9 gr.
Enfin, l’emploi de balles Nessler pour armes lisses, avec laquelle le vent n’était plus que de 0,8 mm, permit de diminuer la charge au point de la ramener à 6 gr.
L’ensemble de toutes ces variations est résumé dans le tableau suivant :
1777 : calibre du canon : 17,48 – diamètre de la balle : 16,54 – vent : 0,94 – poids balle : 27,2 – poids charge : 12,24 – PT : 39,44
1792 : calibre du canon : 17,48 – 15,98 – 1,50 – 24 ?5 – 12,24 – 36,74
1827 : calibre du canon : 17,48 – 16,35 – 1,13 – 25,6 – 12,24 – 37,84
1828 : calibre du canon : 17,48 – 16,35 – 1,13 – 25,6 – 10,50 – 36,10
1840 : calibre du canon : 17,48 – 16,35 – 1,13 – 25,6 – 9,00 – 34,60
1842 : calibre du canon : 18,00 – 17,00 – 1,00 – 29,3 – 8,00 – 37,30
1848 : calibre du canon : 18,00 – 16,70 – 1,30 – 27,7 – 9,00 – 36,70
Balle Nessler : calibre du canon : 18,00 – 17,20 – 0,80 – 30,0 – 6,00 – 36,00
(tableau img 8298).
Le vent fut avec raison considéré, surtout avec les armes lisses, comme un des éléments balistiques les plus importants : pour sa détermination on se trouvait toujours en présence de 2 conditions opposées. D’une part il importait que dans toutes les circonstances du service, le soldat pût charger son arme avec promptitude et facilité : mais d’autre part on ne devait pas perdre de vue qu’une exagération dans ce sens altérerait gravement les effets du tir. A l’approche des grandes guerres, il y a toujours eu tendance à augmenter le vent, peut-être parce que les magasins de l’Etat ne pouvaient fournir un nombre suffisant de cartouches, et que leur confection était négligée, ou bien encore parce que par ce moyen l’approvisionnement était plus grand sous le même volume.
Résultats obtenus avec les fusils et les balles sphériques au point de vue de la portée, de la justesse et de la pénétration :
Le mode le plus récent de nos fusils lisses est le fusil Mle 1853. J’ai indiqué après quelles modifications successives se trouvèrent fixés les éléments balistiques de cette arme : il me reste à considérer les résultats qui furent obtenus aux divers points de vue de la portée, de la justesse et de la pénétration.
Comme portée, les fusils lisses tirant la balle sphérique mis en expérience en 1850 et en 1854, soit dans le modèle 1842 avec la balle de 17 mm, soit dans le modèle 1853 avec la balle de 16,7 mm, cessèrent toujours de donner des résultats relevables, à partir de 400 mètres.
Comme justesse les 2 tableaux suivants, extraits des rapports officiels établis à la suite de ces 2 séries d’expériences, donnent des renseignements précis.
Tir d’expérience exécuté en 1850 dans 4 régiments d’infanterie avec le fusil lisse Mle 1842 et la balle sphérique de 17,0 mm (nombre de coups tirés : 82532) :
Distances :
150 m – but (2m sur 0,50 m) - % : 17,78
200 m – but (id) - % : 8,59
225 m – but (id) - % : 5,93
250 m – but (2m sur 1m) - % : 9,33
275 m – but (id) – % : 6,67
300 m - but (id) - % : 6,56
325 m – but (2m sur 1,50) - % : 7,22
350 m – but (id) - % : 6,36
400 m – but (id) - % 4,61
Tir d’expérience exécuté en 1854 dans 3 régiments d’infanterie avec le fusil lisse Mle 1853 et la balle sphérique de 16,7 mm (nombre de coups tirés 3288) :
Distances :
50 m – but (2x0,50) - % : 17,41
200 m – but (id) - % : 9,87
250 m – but (2x1) - % : 7,48
300 m – but (id) - % : 3,50
350 m – but (2x1,50) - % : 3,93
400 m – but (id) - % : 2,49
Quant aux effets de pénétration obtenus avec les armes lisses et les balles sphériques, on peut en avoir une idée à l’aide de cet extrait du compte-rendu des expériences officielles de 1842, qui avaient pour but la comparaison des 2 Mles 1840 et 1842.
A 400 mètres, entre 1 et 9 % des balles atteignent de plein fouet ou par ricochet le 1er panneau et seulement 2 et 5 % des balles respectivement de 16,3 et 17,0 ont atteint le second panneau.
De tels résultats étaient assurément médiocres mais avant de montrer comment on arriva à améliorer ces faibles effets de nos anciennes armes portatives, il est naturel d’étudier les causes auxquels ils devaient être attribués : l’indication du remède ne saurait résulter que d’une connaissance exacte du mal.
Causes d’irrégularités du tir des balles sphériques dans les fusils lisses :
Supposons que B représente une balle reposant au fon d du canon au moment où elle reçoit l’action de la force motrice. Si le diamètre de cette balle était exactement le même que celui du canon, si de plus le projectile était exactement sphérique et homogène, le centre de gravité coïncidant parfaitement avec le centre de figure, le frottement qu’éprouveraient les points de la circonférence de contact serait la même pour chacun d’eux, et comme la force motrice agit symétriquement sur tous les points de l’hémisphère postérieur, aucune cause ne pourrait retarder certains points de la balle par rapport aux autres, ni par conséquent produire de mouvement de rotation. Cette balle n’aurait donc au sortir du canon qu’un mouvement de translation suivant la ligne de tir. Après la sortie du projectile de l’âme, la résistance de l’air se répartirait également sur chacun des points de sa masse, et agissant symétriquement sur chacun des points de son hémisphère antérieur, elle ne produisait d’autre effet que de retarder sa marche.
Dans de telles conditions donc les déviations du projectile dues à son mouvement seraient nulles. Mais en pratique il est loin d’être ainsi : la nécessité de pouvoir charger l’arme facilement, même lorsqu’elle est encrassée par un tir plus ou moins prolongé, fait que l’on est obligé de laisser entre son calibre et celui de la balle une certaine différence, un certain vent. En outre une foule de circonstances, telles que le coulage, le transport, etc font que les balles ne sont ni parfaitement sphériques, ni parfaitement homogènes, et par conséquent que le centre de gravité ne coïncide jamais exactement avec le centre de figure...
De 1842 à 1853, la commission de Vincennes avait surtout eu à tourner son attention du côté des armes rayées : les fusils lisses subirent par suite un temps d’arrêt dans leurs changements. En 1853 seulement fut établi un fusil neuf, dit modèle 1853, mais qui ne différait du modèle 1842 que par les points sur lesquels devait entrainer des modifications ultérieures l’adoption des rayures, qu’on prévoyait déjà devoir être étendue à toutes les armes de l’infanterie. Ainsi le calibre fut réduit de 18 à 17,8 mm. Pour ne pas masquer la ligne de mire par la tête du chien, car on présumait que ce modèle recevrait une hausse mobile, on reporta la masselotte sur la droite de l’axe du canon, en sorte qu’elle faisait saillie sur le pan latéral droit. Enfin, toujours en vue du placement de la hausse mobile, on prolongea de beaucoup le pan supérieur du canon.
Les études faites sur les armes rayées jusqu’alors provoquèrent définitivement leur usage général pour toute l’infanterie. On créa donc le fusil rayé modèle 1857, en même temps qu’on appliqua cette nouvelle transformation aux autres modèles déjà en service. En conséquence, les bases de l’armement de notre infanterie en 1857 étaient constituées de la manière suivante :
1/ fusil rayé Mle 1822 Tbis
2/ fusil rayé Mle 1842 T
3/ fusil rayé Mle 1853 T
4/ fusil rayé Mle 1857.
Les fusils modèle 1840 avaient été entièrement retirés du service et en partie vendus à l’étranger.
D’autre part pour tous les fusils antérieurs à 1857, il existait pour chaque modèle deux types portant le même millésime, mais une dénomination particulière motivée par leurs différences dans la longueur du canon : l’un était dit fusil d’infanterie, l’autre fusil de voltigeurs.
Si à la liste précédente j’ajoute :
1/ l’armement de la garde, pour lequel existaient également 2 variétés, l’une dite fusil de grenadier, l’autre fusil de voltigeur et qui était formé par le :
1/ fusil rayé de la garde Mle 1854
et 2/ l’armement spécial des chasseurs à pied qui de 1857 à 1866 a été formé des modèles suivants :
1/ carabine à tige Mle 1846
2/ carabine à tige Mle 1853
3/ carabine sans tige Mle 1859
4/ carabine sans tige Mle 1846
5/ carabine sans tige Mle 1853
j’aurai présenté le tableau complet des armes à feu portatives sur lesquelles ont dû porter les effets de la transformation au chargement par la culasse, effets qui ont été soit une suppression absolue de quelques-uns de ces modèles, soit l’utilisation de quelques autres après y avoir exécuté des changements de dispositions nécessités par le changement du système de chargement.
Au moment de l’adoption du système percutant et de la création du fusil Mle 1842, on songea à étudier si la position de la lumière avait de l’influence sur l’inflammation de la charge, et par suite à déterminer le point le plus convenable où elle devait déboucher dans l’âme. Ces expériences se firent à l’aide du fusil-pendule. On tira des fusils dont les débouchés de la lumière étaient situés à 2,3 mm – 4,6 mm – 6,9 mm en avant du fond de l’âme. On constat ainsi par la mesure des vitesses initiales une différence très peu sensible à la vérité en faveur de la distance de 6,9 mm. Celle-ci permettait en outre à la crasse de s’agglomérer au fond du canon sans obstruer la lumière. Aussi c’est cette distance qui fut adoptée pour l’établissement du canal de lumière dans le modèle 1842, comme dans les modèles postérieurs.
Logement de la cheminée :
Le centre du logement de la cheminée est déterminé par sa distance à la tranche de la culasse, et par son écartement sur la droite de l’axe du canon, ou du plan de tir. Dans les fusils Mle 1842T, la 1ère distance est égale à 12 mm : la 2em plus importante, puisqu’il y avait à satisfaire à cette condition que la ligne de mire ne fût pas masquée par la tête du chien, est de 7 mm, sans tolérance en moins et avec 0,5 mm de tolérance en plus. De cette manière la masselotte arrose le pan latéral droit.
Dans les fusils Mle 1853T, comme on prévoyait qu’ils seraient rayés prochainement et qu’ils recevraient une hausse mobile, on chercha à démasquer davantage la ligne de mire, en rejetant la masselotte plus encore sur la droite, de telle sorte qu’elle faisait saillie sur le pan latéral droit (fig A).
La même disposition fut maintenue sur les fusils Mle 1857 (fig B).
Pour achever d’assurer la direction de l’axe de la cheminée, il fallait déterminer son inclinaison par rapport au pan supérieur. Cette inclinaison n’était pas indifférente. Il est facile de comprendre que pour une longueur de chien constante OC et une même force d’impulsion MC qui s’exerce suivant la tangente à la circonférence décrite par le chien, le maximum d’effet utile dans la percussion sera obtenu lorsque le plan de percussion OC passera par l’axe de rotation O. s’il passe au dessus, le choc tendra à séparer le canon de la platine : s’il passe au dessous, il tendre à les rapprocher. Les figures ci-contre mettent ces effets en relief. Malheureusement, dans les modèles 1842T, ces principes n’ont pas été respectés car l’inclinaison qui a été adoptée est de 123°, et laisse d’une quantité notable le centre de rotation au dessous du plan de percussion. La hausse fixe de la culasse est une des causes principales d’impossibilité que l’on a trouvées, à incliner davantage la cheminée. Il en résulte un fort tirage sur la vis de culasse, un ébranlement du corps de platine et un porte-à-faux sur la cheminée qui peut se casser.
Les fusils Mle 1853 ayant reçu une masselotte plus à droite, on aurait pu y apporter une amélioration à ce point de vue, en augmentant l’inclinaison de l’axe de la cheminée mais l’ancienne disposition a été conservée.
La cheminée repose dans son logement sur la masselotte par son embase, laquelle préserve les filets en supportant presque entièrement les efforts du chien.
Hausse fixe et guidon :
Les effets du tir d’une arme dépendent en partie des dispositions prises pour mettre le tireur à même de diriger convenablement son arme par rapport au but à atteindre. Pour satisfaire à cette condition on avait fixé la ligne de mire naturelle de l’arme à l’aide de la hausse fixe et du guidon (voir croquis img 8284).
Les anciennes armes à silex n’avaient pas de hausse fixe aussi leur pointage était-il incertain. Des expériences furent faites dès 1828 qui démontrèrent combien l’emploi de ce repère pour la ligne de visée était avantageux. Son adoption n’eut lieu cependant qu’en 1840. Dès cette époque les armes transformées à percussion, par conséquent nos fusils Mle 1822Tbis reçurent une hausse fixe rapportée et encastrée dans la queue de culasse à queue d’aronde.
Dans les modèles 1842, 1853 et 1857, la hausse fixe était d’une seule pièce relevée de forge sur la queue de culasse.
Le 2e point devant déterminer la ligne de mire naturelle était le guidon, autre élévation établie près de la bouche. La ligne de mire devant être invariable de situation par rapport à l’axe du canon, toute disposition permettant une variation quelconque dans les points qui la déterminent devait être radicalement vicieuse. Les anciennes armes à silex par exemple sur lesquelles le guidon était placé sur l’embouchoir, garniture mobile, présentaient cet inconvénient. On y a remédié dans les armes à percussion, en brasant sur le canon lui-même l’embase du guidon.
Quant à la fixation de la hausse fixe sur la queue de culasse, elle était aussi défectueuse car la ligne de mire pouvait être également faussée par le moindre dérangement dans l’ajustage du canon et de la culasse. Il suffisait d’un coup de tourne à gauche un peu violent pour produire ce dérangement. Il semble qu’il eût été bien préférable de placer cette hausse fixe sur le tonnerre en avant de la cheminée, ainsi que cela a été pratiqué pour la hausse mobile de nos carabines.
D’une manière générale on peut dire que les formes et les dimensions du can de mire et du guidon, ainsi que l’intervalle qui les sépare entre eux et de l’œil du tireur sont liés par certains rapports qu’il convient toujours de prendre en considération lors de l’établissement d’une arme nouvelle.
Une des principales difficultés que l’on rencontre à bien viser tient à l’organisation même de notre œil. Cet organe, fonctionnant comme véritable instrument d’optique, a nécessairement en lui-même un moyen d’action qui lui permet de s’accommoder aux diverses distances de l’objet qu’il regarde. Par conséquent, il doit lui être à peu près impossible de bien voir simultanément 3 objets alignés à la suite l’un de l’autre à des distances très différentes. Personne, en ajustant un fusil, ne saurait embrasser nettement, du même coup d’œil, les circonscriptions du cran de mire, du guidon et du but à toucher. Mais cet inconvénient se manifeste d’une manière plus remarquable encore, lorsque le plus rapproché de ces 3 objets, le cran de mire, se trouve en deçà de la portée de la vision distincte qui est de 25 cm pour un œil ordinaire. En général, alors les contours de l’entaille n’apparaissent plus clairement et ils disparaissent tout à fait, dès que l’on fixe le guidon et le point servant de but.
Si au contraire le cran de mire se trouve un peu au delà de la portée de la vue distincte, s’il est par exemple à 30 cm en avant de l’œil qui vise, l’expérience prouve qu’il devient possible à l’œil fixé sur le guidon, de recevoir en même temps des impressions non pas très vives mais du moins suffisamment nettes du but et du cran de mire.
Un homme de taille moyenne doit, pour bien coucher en joue sans se gêner, c’est-à-dire sans trop pencher ou tourner la tête, pouvoir placer son œil à la bonne distance du cran de mire, qui est d’environ 30 cm. Pour cela il est nécessaire que le cran de mire soit à environ 52 cm de la crosse, ou à environ 10 cm de l’extrémité postérieure du canon. Telle est en effet la position qu’on lui a généralement donnée sur les meilleurs modèles d’armes modernes, du moins pour celles sur lesquelles on a établi des hausses mobiles, telles que les carabines de chasseurs.
Car au contraire pour les fusils d’infanterie se chargeant par la bouche, on s’est écarté des principes que je viens d’exposer la position de la hausse fixe sur la culasse jointe à ce que la monture pêche par défaut de longueur, amenait le cran de mire beaucoup trop près de l’œil.
Autant que possible le guidon ne doit offrir au regard qu’une face terne ou du moins sans reflets, et pour cela il faut que sa face postérieure tombe sur le canon perpendiculairement à l’axe. Sur nos armes antérieures à 1866, on avait donné à cette pièce la forme en dos de puce ou demi lune, et l’on ne saurait ne pas critiquer cette disposition ; elle offrait en effet à l’œil du tireur un point lumineux qui rendait très difficile le tir à guidon fin, et ne permettait guère que le tir à guidon découvert, c’est-à-dire le tir incertain (img 8286) à la vérité ces contours arrondis favorisaient la conservation du guidon en l’exposant moins aux mutilations accidentelles. Au point de vue de la commodité et de l’exactitude du pointage, il eût été préférable d’employer la forme d’un triangle dont l’angle supérieur serait tronqué par une ligne droite ou par un petit arc. Ce perfectionnement a été appliqué dans notre fusil Mle 1866.
Quant au cran de mire, sur les fusils du modèle 1822Tbis, elle était celle d’un V, sur les fusils Mle 1842T et ceux postérieurs, d’après l’expérience, on fut conduit à préférer la forme arrondie.
En outre, on abattit les angles extérieurs et supérieurs de cette hausse fixe pour ne pas gêner le passage du chien.
La hauteur relative du guidon et du cran de mire de la hausse fixe, au dessus du canon, fut réglée de telle sorte que, pour toutes les distances comprises dans les limites ordinaires du combat (200 mètres), le soldat n’eût qu’à viser un point quelconque du but pour l’atteindre. Cette hauteur relative tenait donc aux propriétés balistiques de l’arme, aussi était-elle variable sur les modèles divers successivement ou simultanément en service.
Cette condition d’assurer à l’arme un but de blanc à 200 mètres imposa des modifications aux hauteurs de hausses fixes encastrées à queue d’aronde dans les fusils Mle 1822Tbis, un accroissement dans les hauteurs et épaisseurs de la hausse fixe pour les fusils Mle 1842T. Pour ces derniers la hauteur fut portée à 11 mm au dessus de la queue de culasse, mesure prise par derrière, du fond du cran de mire, sans tolérance en dessous, c’est-à-dire augmentée de 4 mm, pour cela on avait placé sur l’arme derrière la hausse fixe existante une pièce en fer de hauteur et d’épaisseur convenables. Elle y était maintenue par 2 rivets noyés dans le corps de l’ancienne hausse. Les 2 corps furent raccordés en faisant disparaître l’ancien cran de mire.
Sur les fusils Mle 1854 de la Garde, la hausse fixe avait été établie d’une seule pièce, relevée de forge sur la queue de culasse et d’une hauteur de 11 mm également, pour le même but en blanc à 200 mètres.
Hausse à curseur mobile, ou à échelle :
Sur les carabines dont la portée était plus considérable, on avait disposé sur le canon même, en avant du tonnerre, une hausse du genre appelé à curseur mobile. Elle se composait d’un pied en fer brasé sur le canon, et d’une planche mobile en acier sur laquelle glissait le curseur en acier, dans lequel était pratiqué un cran de mire. Un ressort encastré dans le pied de la hausse assurait la fixité de la planche. Sur le côté gauche de la planche étaient marqués, en centaines de mètres des traits indicateurs du tir. Sur le côté droit se trouvait une graduation en millimètres et dont le but était de faciliter le règlement des hausses, dont les valeurs variaient avec les saisons et les circonstances atmosphériques, comme avec l’état du m…. une petite vis sans fente, nommée arrêtoir, se trouvait fixée à l’extrémité de la planche pour limiter le mouvement du curseur mobile.
Cette hausse fournissait 4 lignes de mire fixes en principe :
1/ à 175 m – planche couchée, cran du talon
2/ à 275 m – planche relevée, cran inférieur
3/ à 390 m – planche relevée, curseur abaissé le plus possible
4/ à 1100 m – planche relevée, cran supérieur de la planche.
Lorsque les carabines à tige furent transformées sans tige, on du modifier cette hausse : néanmoins on conserva la même planche et on se borna à effacer les anciens traits pour en graver de nouveaux correspondants aux portées de la nouvelle balle.
Principaux appareils de hausse :
Comme appareils mobiles servant à mesurer les hausses, on a imaginé et appliqué soit en France soit à l’étranger bien des dispositifs divers. Quels qu’ils soient, ils doivent satisfaire à des conditions générales que je résumerai ainsi :
Une grande solidité, une construction simple, un entretien commode, des réparations faciles, aucune gêne pour le maniement de l’arme, un emploi facile, sûr, et n’offrant aucune chance d’erreur, un mouvement du cran de mire rapide, continu, impossibilité pour ce curseur de se déplacer autrement qu’à la volonté du tireur.
Hausses à lamettes :
Les hausses à lamettes se composent de lames portant chacune à la partie supérieure un cran de mire : l’une de ces lames est fixe de position et correspond au 1er but en blanc de l’arme : les autres, partant du même pied, sont réunis à l’aide de charnières et d’une goupille. Elles correspondent à divers buts en blanc artificiels. Le pied de cet ensemble de hausses est encastré à queue d’aronde dans le fer du canon.
Ce genre de hausses a été d’un usage fréquent dans les armes des puissances étrangères : en France elles n’ont été réglementairement employées que pour le fusil de rempart Mle 1831.
Un 1er inconvénient de ce système est de multiplier outre mesure le nombre des lamettes, lorsque les distances de tir sont un peu nombreuses et d’exposer ainsi le soldat à commettre facilement des erreurs en prenant une lamette pour une autre.
Un 2e inconvénient, c’est le manque de fixité : avec l’usage les lamettes finissent par tourner gaiement autour de leurs charnières, et dès lors, avant de s’en servir, e soldat doit s’assurer que la direction de la hausse qu’il emploie est bien perpendiculaire à l’axe du canon.
Hausse à trous :
La hausse à trous est une simplification et une amélioration des hausses à lamettes. Elles furent appliquées en France sur les armes rayées de 1842, carabines et fusil de rempart. Le nombre de lamettes est réduit à 2, l’une fixe, l’autre mobile : mais pour remédier au manque de fixité de cette dernière, son pied porte un talon sur lequel vient s’appuyer un ressort fixé à la lamette elle-même. Lorsqu’on la relève, le ressort passant par dessus le talon, presse contre celui-ci et assure l’immobilité de la lame.
Les 2 lamettes sont juxtaposées et portent chacune un cran de mire à leur partie supérieure. Mais pour suppléer aux lamettes qui ont été supprimées, elles portent en outre un certain nombre de trous à crans de mire qui servent à viser suivant les distances.
Les carabines mle 1842 avaient à chaque lame un cran de mire et un trou à cran, ce qui donnait 4 lignes de mire, les fusils de rempart en avaient 5, à savoir un trou et un cran de mire à la lame fixe, 2 trous et un cran de mire à la lame mobile.
Ce genre de hausse présente, comme le genre à lamettes, l’inconvénient de ne pouvoir servir que pour un nombre restreint de distances de tir : les soldats sont encore exposés à commettre facilement des erreurs, et de plus quand l’objet à atteindre est très mobile, il est difficile de le suivre par les trous de mire.
Canon
Intérieur :
Avant d’être rayée, l’âme des canons de fusil d’infanterie présentait la forme simple d’un cylindre uni : sa longueur et son diamètre étaient dès lors les seuls éléments à considérer. Or j’ai indiqué précédemment les nombres qui avaient été successivement adoptés pour la 1ère de ces dimensions, ainsi que les raisons qui avaient servi de bases à leur détermination (p.17).
Je vais établir maintenant l’historique des variations du calibre de nos armes, de celui des projectiles employés d’où découlera le tableau des variations du vent admis avec chacune d’elles. Je jetterai un coup d’œil sur les diverses charges dont il a été fait usage et sur les résultats pratiques que l’on obtint, au point de vue du tir, avec de tels éléments. C’est en recherchant à quelles causes devront être attribués les effets médiocres fournis par ces armes, que je serais conduit à étudier les moyens à l’aide desquels ont été réalisés des progrès si considérables dans la puissance de nos fusils, à savoir l’adoption des rayures, la réduction du calibre, le chargement par la culasse.
Historique des variations
1/du calibre des fusils d’infanterie :
Le calibre du canon des fusils d’infanterie n’a pas varié depuis 1777 jusqu’en 1842. Pendant cette période il est resté fixé à 17,48 mm.
Au moment de l’adoption des armes à percussion, en 1842, il fut porté à 18 mm. On voulut de cette manière se placer dans des conditions telles qu’il fût possible, dans tel cas donné, d’utiliser dans les armes françaises les munitions des puissances étrangères qui, telles que l’Angleterre, l’Espagne, la Suède, avaient un projectile de 17,5 mm de diamètre.
En 1853, les études sur les armes rayées étaient déjà assez avancées pour qu’il fût permis de prévoir l’adoption prochaine des rayures pour l’armement général de l’infanterie : en conséquence les armes neuves établies à partir de cette époque furent ramenées au calibre de 17,8 mm.
2/ du diamètre des balles, du vent et des charges employées :
Quant au diamètre des balles qui furent conservées sphériques jusqu’en 1857 pour les fusils d’infanterie, de 1777 à 1792, il fut fixé à 16,54 mm (18 à la livre), ce qui donnait un vent égal à (17,48-16,54) 0,94 mm. Cette balle avait un poids de 27,2 gr.
En 1792 on fut obligé à une réduction dans le diamètre des balles par suite à une augmentation du vent, par la mauvaise fabrication des armes, la maladresse des faiseurs de cartouches, les dénonciations de ceux qui voyaient partout des crimes de haute trahison. On eut alors des balles de 15,98 mm (2à à la livre), ce qui donnait un vent égal à (17,48-15,98) 1,50 mm. Le poids de ces balles allégées était de 24,2 gr.
Mais on reconnut bien vite qu’on avait ainsi perdu sans nécessité une partie de la justesse des armes. La succession rapide des évènements qui s’accomplissaient alors s’opposa à une amélioration immédiate, et ce ne fut que sous la Restauration qu’on put se livrer à de nouvelles études qui conduisirent à de nombreux perfectionnements.
Ainsi en 1827 on adopta une balle de 16,35 mm (19 à la livre) ce qui réduisait le vent à (17,48-16,35) 1,13 mm, et le poids de la balle se trouva porté à 25,6 gr.
Cette dernière balle resta en usage jusqu’en 1842, époque à laquelle son diamètre fut porté à 17,5 mm ce qui ne laissait pour le vent que (18 – 17,5) 5 mm. Le poids de la balle arriva à 29,3 gr.
Un nouveau changement eut lieu dans le calibre de la balle en 1848. On diminua son calibre de 0,3 mm, lequel devint alors 16,7 mm. Le vent se trouva par suite élevé à (18-16,7) 1,3 mm. Ce fût là une mesure des plus fâcheuses et il convient de constater que cette décision ministérielle fut prise en dehors du Comité d’artillerie. On ne saurait s’expliquer cette modification étrange, que par les préoccupations et les craintes d’une guerre européenne qui pouvait surgir à cette époque. Car les motifs invoqués d’une façon explicite dans la circulaire relative à ce changement sont loin d’être suffisamment sérieux pour compenser les mauvaises conséquences qui s’en suivirent au point de vue du tir. On avait remarqué, disait-on, à l’Armée d’Afrique, que l’encrassement rendait impossible le service de l’arme au bout d’un petit nombre de coups. Or pour une arme qui s’encrasserait de 1 mm après quelques coups, l’encrassement n’arriverai-il pas aussi vite à remplir 1,3 mm. D’autre part 0,3 mm enlevés au calibre de la balle diminuent la masse de celle-ci, augmentent le vent de l’arme et doivent altérer la justesse du tir, en même temps que diminue la portée et l’effet utile du projectile.
Car il importe de remarquer que si l’emploi d’un petit calibre est avantageux pour les projectiles allongés, il est au contraire un inconvénient avec des balles sphériques, attendu que celles-ci ressentent d’autant moins les effets de la résistance de l’air que leur poids ou masse, et portant leur diamètre, est plus grand, à égalité de vitesse initiale.
(voir calculs img 8297)
L’influence retardatrice de la résistance de l’air sur la vitesse sera plus sensible sur la vitesse de la petite balle que sur celle de la balle de plus gros calibre.
On comprend dès lors que la réduction qui fut établie sur le calibre de la balle sphérique en 1848 était une modification des plus malheureuses, et ce qui le confirme, c’est que le but en blanc de l’arme tomba de 150 à 109 mètres.
On remédia à ces conséquences fâcheuses d’abord par l’emploi de la cartouche graissée, ce qui permit de réduire le vent dans des proportions considérables en employant une balle d’une forme particulière dite balle Nessler pour armes lisses, dont le diamètre était égal à 17,2, le vent n’était plus dès lors que de (18-17,2) 0,8 mm.
Les fusils lisses d’infanterie se trouvèrent ainsi dotés d’un perfectionnement très sensible.
3/ des charges employées :
Un fait remarquable consiste dans la coïncidence constante entre les diminutions des charges et les accroissements du vent, ou inversement des augmentations des premières et la réduction du second. Ainsi de 1777 à 1828 la charge avait été fixée invariablement à 1/40 de livre, c’est-à-dire à 12,24 gr, amorce comprise. On s’était dans cette détermination arrêté à la limite supérieure du recul, que le tireur pouvait supporter, tout en cherchant à donner au projectile la plus grande vitesse initiale possible.
En 1827, la balle ayant été augmentée de 2 gr environ par suite le vent ayant été diminué de 0,37 mm, d’autre part les calibres étant devenus plus exacts par suite des progrès de la fabrication des armes et enfin la poudre à canon ayant été remplacée par la poudre à mousquet, on ne tarda pas à se plaindre de la violence presque intolérable du recul. On eut donc à rechercher quelle était la charge la plus convenable pour la balle de 16,3 m. La Commission de 1828 fut ainsi amenée à adopter 9,5 gr, charge avec laquelle le recul était moindre et la portée plus grande qu’antérieurement, grâce à la diminution du vent et à l’emploi d’une poudre plus puissante, on ajoutait 1 gr pour l’amorce, dans la confection de la cartouche.
Le poids réglementaire de la charge resta tel jusqu’en 1840, époque à laquelle on le réduisit à 9 gr, l’adoption du système à percussion ayant déterminé une augmentation notable du recul de l’arme, par suite de l’inflammation plus rapide de la charge et de la suppression presque absolue des pertes de gaz par la lumière.
En 1842 l’augmentation de poids du projectile et la diminution du vent obligèrent à diminuer la charge pour ne pas exagérer le recul : elle fût fixée à 8 gr.
En 1848, pour compenser la réduction apportée dans le diamètre de la balle, la charge fut portée de nouveau à 9 gr.
Enfin, l’emploi de balles Nessler pour armes lisses, avec laquelle le vent n’était plus que de 0,8 mm, permit de diminuer la charge au point de la ramener à 6 gr.
L’ensemble de toutes ces variations est résumé dans le tableau suivant :
1777 : calibre du canon : 17,48 – diamètre de la balle : 16,54 – vent : 0,94 – poids balle : 27,2 – poids charge : 12,24 – PT : 39,44
1792 : calibre du canon : 17,48 – 15,98 – 1,50 – 24 ?5 – 12,24 – 36,74
1827 : calibre du canon : 17,48 – 16,35 – 1,13 – 25,6 – 12,24 – 37,84
1828 : calibre du canon : 17,48 – 16,35 – 1,13 – 25,6 – 10,50 – 36,10
1840 : calibre du canon : 17,48 – 16,35 – 1,13 – 25,6 – 9,00 – 34,60
1842 : calibre du canon : 18,00 – 17,00 – 1,00 – 29,3 – 8,00 – 37,30
1848 : calibre du canon : 18,00 – 16,70 – 1,30 – 27,7 – 9,00 – 36,70
Balle Nessler : calibre du canon : 18,00 – 17,20 – 0,80 – 30,0 – 6,00 – 36,00
(tableau img 8298).
Le vent fut avec raison considéré, surtout avec les armes lisses, comme un des éléments balistiques les plus importants : pour sa détermination on se trouvait toujours en présence de 2 conditions opposées. D’une part il importait que dans toutes les circonstances du service, le soldat pût charger son arme avec promptitude et facilité : mais d’autre part on ne devait pas perdre de vue qu’une exagération dans ce sens altérerait gravement les effets du tir. A l’approche des grandes guerres, il y a toujours eu tendance à augmenter le vent, peut-être parce que les magasins de l’Etat ne pouvaient fournir un nombre suffisant de cartouches, et que leur confection était négligée, ou bien encore parce que par ce moyen l’approvisionnement était plus grand sous le même volume.
Résultats obtenus avec les fusils et les balles sphériques au point de vue de la portée, de la justesse et de la pénétration :
Le mode le plus récent de nos fusils lisses est le fusil Mle 1853. J’ai indiqué après quelles modifications successives se trouvèrent fixés les éléments balistiques de cette arme : il me reste à considérer les résultats qui furent obtenus aux divers points de vue de la portée, de la justesse et de la pénétration.
Comme portée, les fusils lisses tirant la balle sphérique mis en expérience en 1850 et en 1854, soit dans le modèle 1842 avec la balle de 17 mm, soit dans le modèle 1853 avec la balle de 16,7 mm, cessèrent toujours de donner des résultats relevables, à partir de 400 mètres.
Comme justesse les 2 tableaux suivants, extraits des rapports officiels établis à la suite de ces 2 séries d’expériences, donnent des renseignements précis.
Tir d’expérience exécuté en 1850 dans 4 régiments d’infanterie avec le fusil lisse Mle 1842 et la balle sphérique de 17,0 mm (nombre de coups tirés : 82532) :
Distances :
150 m – but (2m sur 0,50 m) - % : 17,78
200 m – but (id) - % : 8,59
225 m – but (id) - % : 5,93
250 m – but (2m sur 1m) - % : 9,33
275 m – but (id) – % : 6,67
300 m - but (id) - % : 6,56
325 m – but (2m sur 1,50) - % : 7,22
350 m – but (id) - % : 6,36
400 m – but (id) - % 4,61
Tir d’expérience exécuté en 1854 dans 3 régiments d’infanterie avec le fusil lisse Mle 1853 et la balle sphérique de 16,7 mm (nombre de coups tirés 3288) :
Distances :
50 m – but (2x0,50) - % : 17,41
200 m – but (id) - % : 9,87
250 m – but (2x1) - % : 7,48
300 m – but (id) - % : 3,50
350 m – but (2x1,50) - % : 3,93
400 m – but (id) - % : 2,49
Quant aux effets de pénétration obtenus avec les armes lisses et les balles sphériques, on peut en avoir une idée à l’aide de cet extrait du compte-rendu des expériences officielles de 1842, qui avaient pour but la comparaison des 2 Mles 1840 et 1842.
A 400 mètres, entre 1 et 9 % des balles atteignent de plein fouet ou par ricochet le 1er panneau et seulement 2 et 5 % des balles respectivement de 16,3 et 17,0 ont atteint le second panneau.
De tels résultats étaient assurément médiocres mais avant de montrer comment on arriva à améliorer ces faibles effets de nos anciennes armes portatives, il est naturel d’étudier les causes auxquels ils devaient être attribués : l’indication du remède ne saurait résulter que d’une connaissance exacte du mal.
Causes d’irrégularités du tir des balles sphériques dans les fusils lisses :
Supposons que B représente une balle reposant au fon d du canon au moment où elle reçoit l’action de la force motrice. Si le diamètre de cette balle était exactement le même que celui du canon, si de plus le projectile était exactement sphérique et homogène, le centre de gravité coïncidant parfaitement avec le centre de figure, le frottement qu’éprouveraient les points de la circonférence de contact serait la même pour chacun d’eux, et comme la force motrice agit symétriquement sur tous les points de l’hémisphère postérieur, aucune cause ne pourrait retarder certains points de la balle par rapport aux autres, ni par conséquent produire de mouvement de rotation. Cette balle n’aurait donc au sortir du canon qu’un mouvement de translation suivant la ligne de tir. Après la sortie du projectile de l’âme, la résistance de l’air se répartirait également sur chacun des points de sa masse, et agissant symétriquement sur chacun des points de son hémisphère antérieur, elle ne produisait d’autre effet que de retarder sa marche.
Dans de telles conditions donc les déviations du projectile dues à son mouvement seraient nulles. Mais en pratique il est loin d’être ainsi : la nécessité de pouvoir charger l’arme facilement, même lorsqu’elle est encrassée par un tir plus ou moins prolongé, fait que l’on est obligé de laisser entre son calibre et celui de la balle une certaine différence, un certain vent. En outre une foule de circonstances, telles que le coulage, le transport, etc font que les balles ne sont ni parfaitement sphériques, ni parfaitement homogènes, et par conséquent que le centre de gravité ne coïncide jamais exactement avec le centre de figure...
Conservateur- Futur pilier
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Re: Un fusil modèle 1853 Tcar
Conservateur a écrit:Pour compléter ce superbe post très instructif et illustré, je vous donne la vision et l'analyse du capitaine Rayne sur l'évolution des modèles à l'époque de l'adoption du 1853...
Cher Conservateur, votre intervention et le texte que vous nous communiquez sont des éléments essentiels pour comprendre l'évolution de notre armement.
Pour ma part, je dois confesser les co ... ries que j'énonçais dans ce poste, surtout à propos "d'essais faits après 1861, sur 2000 fusil 1853 "parmi les plus précis", etc, etc ..." J'ai dû prendre pour argent comptant le passage mal retenu d'un bouquin ou d'une revue oubliés depuis longtemps.
De même il n'a pas été rayé en 1860. Il a juste reçu une nouvelle baguette et une modification de la platine.
Bref.
J'avais ouvert un autre post pour corriger ces calembredaines :
https://www.tircollection.com/t7989-le-fusil-1853-t-car-retrouver-sa-trace
Il n'empêche que - à ce jour - je n'ai pas trouvé le moindre élément probant expliquant ce qui nous a conduit à produire le fusil 1853 T car.
Je sais seulement qu'une photo en montre un en 1855 à Sebastopol et qu'il est (sommairement) décrit dans l'Aide-Mémoire de 1856. J'ai également noté que les quelques exemplaires de ce fusil que j'ai pu observer (en ligne) ont tous été transformés à la Manufacture Impériale de St Etienne.
Et c'est tout.
Par penchant naturel, je suis enclin à explorer les "mines abandonnées" tout comme je m'intéresse souvent aux thèmes délaissés par "les gens". De sorte que, ayant par pur accident, pu mettre la main sur ce "vilain petit canard", me j'attache mordicus à reconstituer son histoire.
D'autant plus que l'arme est non seulement intéressante à utiliser, mais elle possède un vrai potentiel au tir.
A bientôt
Re: Un fusil modèle 1853 Tcar
Si je peux vous aider à reconstituer l'historique véritable de cette arme, je le ferais avec plaisir ! Je vais regarder dans quelques documents et dossiers que j'ai non loin, peut-être aurais-je quelques pistes à vous livrer !
J'ai un vague souvenir de dossiers conséquents et presque vierges de lecture au SHAT à Vincennes concernant les décisions et les expériences réalisées entre 1850 et 1860. Je crois me souvenir en avoir photographié un certain nombre mais je ne peux y remettre la main dessus. Tout cela pour dire qu'il existe des documents officiels relatant cette histoire.
Au plaisir de poursuivre ces échanges à propos de ce sujet.
J'ai un vague souvenir de dossiers conséquents et presque vierges de lecture au SHAT à Vincennes concernant les décisions et les expériences réalisées entre 1850 et 1860. Je crois me souvenir en avoir photographié un certain nombre mais je ne peux y remettre la main dessus. Tout cela pour dire qu'il existe des documents officiels relatant cette histoire.
Au plaisir de poursuivre ces échanges à propos de ce sujet.
Conservateur- Futur pilier
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Re: Un fusil modèle 1853 Tcar
Posts très intéressants !
J'ai une question surement un peu bête en tant que possesseur d'un fusil de la garde 1854.
Pourquoi ce fusil a-t-il été créé ? Qu'est-ce qui explique l'existence parallèle de ces fusils et des modèles 1853 (puis 1857) ?
J'ai une question surement un peu bête en tant que possesseur d'un fusil de la garde 1854.
Pourquoi ce fusil a-t-il été créé ? Qu'est-ce qui explique l'existence parallèle de ces fusils et des modèles 1853 (puis 1857) ?
jpmfalco- Membre confirmé
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Re: Un fusil modèle 1853 Tcar
Bonjour, je vous invite à lire ce qui suit :jpmfalco a écrit:Posts très intéressants !
J'ai une question surement un peu bête en tant que possesseur d'un fusil de la garde 1854.
Pourquoi ce fusil a-t-il été créé ? Qu'est-ce qui explique l'existence parallèle de ces fusils et des modèles 1853 (puis 1857) ?
En 1844, parut le système Delvigne et les expériences de 1845 amenèrent son application à une nouvelle carabine, le modèle 1846 ; en même temps s’introduisait le premier usage d’un projectile d’une forme différente essentiellement de la forme sphérique à laquelle on s’était montré trop longtemps attaché, de la balle allongée, de la balle oblongue avec cannelures, due à Mr Minié.
Les brillants résultats obtenus avec cette carabine modifiée suivant les propositions Thouvenin et Minié firent enfin songer à armer toutes les troupes d’armes rayées. On transforma d’abord le mousqueton d’artillerie à tige et on le raya en 1847 : on commença ensuite l’étude du fusil rayé à tige en employant la même balle que pour la carabine. C’est à la suite de ces expériences qui se poursuivirent jusqu’en 1850 que son adoption fut décidée, mais en la restreignant encore à une partie de l’infanterie, aux régiments de zouaves qui s’en servirent pendant la guerre d’Orient.
Evidemment, les 2 systèmes Delvigne et Thouvenin, à l’aide desquels le forcement du projectile s’opère par le choc même de la baguette au moyen doit d’une chambre soit d’une tige, ont, au point de vue historique, le mérite d’avoir pratiquement démontrés, pour la première fois, la possibilité de se soustraire à la sujétion du chargement des armes rayées, fondé sur l’emploi d’un calepin et d’un maillet.
Mais combien plus important fut le pas fait dans la voie du progrès quand l’ingénieuse invention de la balle à culot, de Mr Minié, vint en 1849, provoquer l’abandon de tout artifice entrainant avec lui une complication de l’arme, comme sont ceux que Delvigne et Thouvenin avaient imaginé pour remplacer la complication du service à laquelle on avait reconnus avant eux. Le forcement du projectile par l’action même des gaz de la poudre fit juger jusqu’alors possible l’extension complète de la rayure au fusil d’infanterie : car par suite du retour à l’emploi de l’ancienne culasse, il suffisait dès lors de joindre à cette simple modification de l’âme une construction appropriée du projectile et d’adapter au canon une hausse nouvelle qui permît de régulariser le tir aux grandes distances. Dans de telles circonstances, les fusils existants pouvaient être transformés en armes de précision, presque sans frais, et sans qu’il fût nécessaire d’user d’une grande sévérité dans la vérification du calibre.
On créa donc le fusil rayé sans tige modèle 1854 qui fut affecté à l’armement de la garde et devait tirer la balle évidée mais sans culot, du même modèle. Là encore on semble avoir eu horreur de la simplicité puisque l’on créa 2 types de ce même modèle, l’un destiné aux Grenadiers, l’autre plus court destiné aux Voltigeurs. La même faute du reste avait régulièrement été commise dans l’établissement des modèles précédents de fusils lisses pour l’infanterie en 1822, 1842 et 1853.
On était dès lors bien décidé à ne plus priver l’infanterie d’une arme dont le système de construction lui avait conquis une supériorité considérable à tous égards puisque l’on venait de créer un modèle nouveau, le modèle 1853, dont le calibre avait été réduit de 18 à 17,8 mm, précisément en prévision d’un rayage ultérieur. Mais on hésitait encore dans le choix définitif du projectile : la balle à culot et la balle sans culot présentaient respectivement des avantages et des inconvénients qui se contrebalançaient, et toute incertitude ne pouvait cesser qu’après l’achèvement des expériences qui se pratiquaient sur une vaste échelle.
Enfin, en 1857, l’armement de nos régiments acquis le perfectionnement si désiré, en même temps l’uniformité des calibres et des munitions pour les corps divers de notre armée, une amélioration notable. Les travaux de la Commission de Vincennes conduisirent à l’adoption du fusil d’infanterie Mle 1857, rayé, sans tige, pour lequel Mr Nessler présenta et fit accepter la balle à évidemment triangulaire dite modèle 1857.
La même année la tige fut rasée dans les mousquetons d’artillerie, ce qui permit d’affecter au tir de cette arme la même balle qui venait d’être admise pour l’infanterie. Le principe de l’unité des munitions approchait de sa réalisation, puisque ce même projectile était donné également aux fusils de dragons modèle 1857, aux mousquetons de Gie Mle 1857 et aux pistolets de cavalerie Mle 1822 Tbis.
Conservateur- Futur pilier
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Re: Un fusil modèle 1853 Tcar
Et ceci :
Ce n’est qu’en 1857 que l’application des rayures aux armes portatives en service en France est devenue générale en s’étendant à tous les fusils d’infanterie qui prirent dès lors la dénomination de modèle 1857.
Jusque là des expériences multipliées s’étaient succédé et tout en démontrant la réalité du perfectionnement obtenu par cette disposition particulière de l’âme, les résultats n’avaient pas jusqu’à cette époque été assez favorables quant aux efforts constatés dans le tir pour que l’on se pressât de transformer le million de fusils que possédaient nos régiments, ou que contenaient nos arsenaux, avant d’être assurés de trouver une compensation à la dépense, qui devait s’en suivre, dans un progrès considérable. Il y aurait injustice à condamner une aussi sage circonspection, surtout quand on songe à la richesse énorme que constituait pour l’Etat l’approvisionnement alors existant en armes portatives. Les faits, du reste, prouvent qu’une telle manière d’agir a été légitimée par le succès. Car si les rayures sont reconnues assez avantageuses pour que l’on songe à armer des corps spéciaux avec la carabine de munition modèle 1840 et le fusil de rempart allégé, il était d’autre part inadmissible de donner à toute l’infanterie le fusil rayé que reçurent les zouaves en 1850 puisque la cartouche avait un poids formidable, 52,50 grammes. La mise en pratique du chargement Delvigne améliorait bien le tir de la balle sphérique, de même que l’invention Thouvenin jointe à l’invention de la balle oblongue ajoutait encore à cette amélioration de la portée et de la justesse du fusil comme de la carabine, mais le recul de ces armes et le poids excessif des munitions qui les accompagnaient devaient les faire rejeter pour l’armement universel de l’infanterie. On attendit mieux et l’on eut raison car grâce à l’invention des balles expansives, le fusil modèle 1854 de la garde est aussi supérieur au fusil des zouaves modèle 1850, que le fusil modèle 1857 l’emporte sur le fusil de la garde.
Les carabines devaient rester toujours des armes exceptionnelles et interdites par conséquent à cause de leur poids et de celui de leur cartouche, à l’infanterie, jusqu’à ce que d’améliorations en améliorations on en vînt, comme cela a eu lieu, à créer pour l’infanterie un modèle plus maniable que la carabine des chasseurs et jouissant de qualités balistiques bien plus puissantes. Aussi ces bataillons spéciaux ne présentent-ils plus aujourd’hui avec les bataillons de l’infanterie que des différences dans leur organisation administrative et à d’autres points de vue qu’il ne conviendrait pas de signaler ici.
Ce n’est qu’en 1857 que l’application des rayures aux armes portatives en service en France est devenue générale en s’étendant à tous les fusils d’infanterie qui prirent dès lors la dénomination de modèle 1857.
Jusque là des expériences multipliées s’étaient succédé et tout en démontrant la réalité du perfectionnement obtenu par cette disposition particulière de l’âme, les résultats n’avaient pas jusqu’à cette époque été assez favorables quant aux efforts constatés dans le tir pour que l’on se pressât de transformer le million de fusils que possédaient nos régiments, ou que contenaient nos arsenaux, avant d’être assurés de trouver une compensation à la dépense, qui devait s’en suivre, dans un progrès considérable. Il y aurait injustice à condamner une aussi sage circonspection, surtout quand on songe à la richesse énorme que constituait pour l’Etat l’approvisionnement alors existant en armes portatives. Les faits, du reste, prouvent qu’une telle manière d’agir a été légitimée par le succès. Car si les rayures sont reconnues assez avantageuses pour que l’on songe à armer des corps spéciaux avec la carabine de munition modèle 1840 et le fusil de rempart allégé, il était d’autre part inadmissible de donner à toute l’infanterie le fusil rayé que reçurent les zouaves en 1850 puisque la cartouche avait un poids formidable, 52,50 grammes. La mise en pratique du chargement Delvigne améliorait bien le tir de la balle sphérique, de même que l’invention Thouvenin jointe à l’invention de la balle oblongue ajoutait encore à cette amélioration de la portée et de la justesse du fusil comme de la carabine, mais le recul de ces armes et le poids excessif des munitions qui les accompagnaient devaient les faire rejeter pour l’armement universel de l’infanterie. On attendit mieux et l’on eut raison car grâce à l’invention des balles expansives, le fusil modèle 1854 de la garde est aussi supérieur au fusil des zouaves modèle 1850, que le fusil modèle 1857 l’emporte sur le fusil de la garde.
Les carabines devaient rester toujours des armes exceptionnelles et interdites par conséquent à cause de leur poids et de celui de leur cartouche, à l’infanterie, jusqu’à ce que d’améliorations en améliorations on en vînt, comme cela a eu lieu, à créer pour l’infanterie un modèle plus maniable que la carabine des chasseurs et jouissant de qualités balistiques bien plus puissantes. Aussi ces bataillons spéciaux ne présentent-ils plus aujourd’hui avec les bataillons de l’infanterie que des différences dans leur organisation administrative et à d’autres points de vue qu’il ne conviendrait pas de signaler ici.
Conservateur- Futur pilier
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Re: Un fusil modèle 1853 Tcar
Merci au Conservateur, vous me facilitez la tâche.
Et vous l'éclairez davantage encore.
Concernant la question sur le POURQUOI les armes de la Garde Impériale de Napoléon III (LN-III).
Il faut absolument garder en mémoire que LN-III voulait se rapprocher le plus possible des réalisations de son oncle.
Il a donc mis sur pied une Garde Impériale constituant un véritable Corps d'Armée composé d'Infanterie (Grenadiers, Voltigeurs et Chasseurs) d'Artillerie, de Cavalerie, et de Gendarmerie.
Comme son oncle, LN-III a fait adopter des tenues inspirées de celles de la Vieille Grade, notamment le bonnet à poils, l'Ourson.
Comme son oncle, il a doté l'Infanterie de sa Garde d'un armement spécifique. Au moins pour l'Infanterie : grenadiers et voltigeurs. (Mais aussi pour les Sous-Officiers et leur Sabre 1854)
Rappelons-nous aussi qu'il a été Officier d'Artillerie de l'armée Suisse et qu'il s'est toujours tenu informé de tous les progrès réalisés en matière d'armement, armes légères et artillerie notamment. (Mais aussi pour la Marine et c'est lui qui a fait réaliser les Batteries Flottantes de Kinburn, véritables cuirassés à vapeur 12 ans avant les bateaux US et CSA de la guerre de Sécession.)
LN-III connaissait parfaitement les expériences sur les balles à jupe de Minié et ogivales de Thouvenin.
Il a imposé un armement qui soit au meilleur des connaissances du temps afin que sa Garde soit au meilleur des tactiques.
Il a imposé à Minié de tracer une balle pour les fusils de sa Garde qui devaient êtres rayés.
En ce temps-là (1853-1854) il faut bien se dire que le rayage des canons ne se faisait que sur nos carabines, au canon très épais et plus court que celui des canons d'infanterie. (Hormis les fusils à tige 1848)
De plus, par crainte (justifiée par les essais) de voir les canons éclater sous le double effet d'une charge mal assurée et d'un affaiblissement de ses parois, on avait choisi de rayer, mais .... pas trop.
On avait donc adopté un rayage de profondeur progressive, plus profond à la culasse (0,5 mm) et moins profond à la bouche (0,2 mm) ce qui donnait un canon d'épaisseur dégressive.
Notons que, suite aux campagnes de Crimée et d'Italie, on allait se rendre compte que la rayure n'affaiblissait pas les canons. On y a renoncé sur les fusils 1857.
Pour en terminer sur la rayures progressive : il faut préciser qu'elle avait été adoptée partout en Europe, notamment par l'Angleterre sur ses Enfield P53.
Par ailleurs, et tant qu'à faire une arme meilleure tactiquement, les fusils de la Garde ont tous reçus une monture en noyer sélectionné avec soin. Le mien est en magnifique noyer blond de Grenoble.
Les armes de ce temps sont un sujet incroyablement passionnant tant les expériences, les innovations et les progrès n'ont jamais cessé.
A bientôt
Et vous l'éclairez davantage encore.
Concernant la question sur le POURQUOI les armes de la Garde Impériale de Napoléon III (LN-III).
Il faut absolument garder en mémoire que LN-III voulait se rapprocher le plus possible des réalisations de son oncle.
Il a donc mis sur pied une Garde Impériale constituant un véritable Corps d'Armée composé d'Infanterie (Grenadiers, Voltigeurs et Chasseurs) d'Artillerie, de Cavalerie, et de Gendarmerie.
Comme son oncle, LN-III a fait adopter des tenues inspirées de celles de la Vieille Grade, notamment le bonnet à poils, l'Ourson.
Comme son oncle, il a doté l'Infanterie de sa Garde d'un armement spécifique. Au moins pour l'Infanterie : grenadiers et voltigeurs. (Mais aussi pour les Sous-Officiers et leur Sabre 1854)
Rappelons-nous aussi qu'il a été Officier d'Artillerie de l'armée Suisse et qu'il s'est toujours tenu informé de tous les progrès réalisés en matière d'armement, armes légères et artillerie notamment. (Mais aussi pour la Marine et c'est lui qui a fait réaliser les Batteries Flottantes de Kinburn, véritables cuirassés à vapeur 12 ans avant les bateaux US et CSA de la guerre de Sécession.)
LN-III connaissait parfaitement les expériences sur les balles à jupe de Minié et ogivales de Thouvenin.
Il a imposé un armement qui soit au meilleur des connaissances du temps afin que sa Garde soit au meilleur des tactiques.
Il a imposé à Minié de tracer une balle pour les fusils de sa Garde qui devaient êtres rayés.
En ce temps-là (1853-1854) il faut bien se dire que le rayage des canons ne se faisait que sur nos carabines, au canon très épais et plus court que celui des canons d'infanterie. (Hormis les fusils à tige 1848)
De plus, par crainte (justifiée par les essais) de voir les canons éclater sous le double effet d'une charge mal assurée et d'un affaiblissement de ses parois, on avait choisi de rayer, mais .... pas trop.
On avait donc adopté un rayage de profondeur progressive, plus profond à la culasse (0,5 mm) et moins profond à la bouche (0,2 mm) ce qui donnait un canon d'épaisseur dégressive.
Notons que, suite aux campagnes de Crimée et d'Italie, on allait se rendre compte que la rayure n'affaiblissait pas les canons. On y a renoncé sur les fusils 1857.
Pour en terminer sur la rayures progressive : il faut préciser qu'elle avait été adoptée partout en Europe, notamment par l'Angleterre sur ses Enfield P53.
Par ailleurs, et tant qu'à faire une arme meilleure tactiquement, les fusils de la Garde ont tous reçus une monture en noyer sélectionné avec soin. Le mien est en magnifique noyer blond de Grenoble.
Les armes de ce temps sont un sujet incroyablement passionnant tant les expériences, les innovations et les progrès n'ont jamais cessé.
A bientôt
Re: Un fusil modèle 1853 Tcar
Merci à tout deux pour ces explications techniques et "psychologiques".
Je comprend mieux la chronologie des développements d'une part et la volonté de doter la garde d'un armement spécifique de l'autre.
Je comprend mieux la chronologie des développements d'une part et la volonté de doter la garde d'un armement spécifique de l'autre.
jpmfalco- Membre confirmé
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Re: Un fusil modèle 1853 Tcar
Conservateur a écrit:
Ce n’est qu’en 1857 que l’application des rayures aux armes portatives en service en France est devenue générale en s’étendant à tous les fusils d’infanterie qui prirent dès lors la dénomination de modèle 1857.
(...)
Bonsoir,
Merci à Conservateur et St Etienne, pour ce très bon poste enrichissant.
Quelques remarques qui me viennent à l'esprit en lisant ceci :
1) Contrairement à ce que l'on peut penser, la l'Armée Française n'est pas bonne dernière à donner un fusil rayé à toute l'infanterie.
Si la Grande-Bretagne a adopté une balle "minié" dès 1851, la plupart des pays ont étendu la rayure à l'ensemble de leurs armées entre 1854 et 1860.
-Empire d'Autriche en 1854
-Etats Unis d'Amérique en 1855
-Empire Russe en 1856
-Württemberg, Hesse, Bade en 1857
-Bavière en 1858
-Espagne et Suisse en 1859
-Royaume de Piémont-Sardaigne en 1860
Il est à noter que la Prusse n'ayant pas assez de Dreyse m-1841 a rayé en 1855, ses anciens fusils à percussion modèle 1839 et 1809 UM.
2) En revanche la France est restée à la traine sur 2 points :
-Hausse fixe
-Non réduction du calibre, resté à 17,8 mm. Dans la liste ci-dessus, seul le Piémont-Sardaigne n'a pas réduit son calibre pour ses fusils (la Suisse l'ayant réduit en 1863)
Meilleures salutations
Cordialement
Joseph de Cacqueray- Membre averti
- Nombre de messages : 130
Age : 40
Localisation : Bärenland - la partie plate
Date d'inscription : 15/08/2015
Re: Un fusil modèle 1853 Tcar
Bonsoir,
Simplement pour fusionner sans que les réponses soient directement apportées
Un clic ici pour retrouver le sujet initial
Simplement pour fusionner sans que les réponses soient directement apportées
Joseph de Cacqueray a écrit:En feuilletant le forum et d'autres sites, je ne suis pas arrivé à me faire une idée précise sur tout les calibre des fusils et carabines à percussion français.
1) J'ai un problème pour le fusil 1853, tirant la balle "nessler":
Calibre : 17.2mm ou 17.5mm ou 17.8mm ? -> j'ai lu 2 variantes 17.5mm et 17.8mm + le fait que la munition Nessler fait entre 17.2mm et 17.5mm.
Je sais que la balle n'a pas le même diamètre que celui canon rayures à rayures.
2) Est-ce qu'à partir de la carabine 1846, toutes les armes d'épaules rayées (carabines 1846 / 1853 / 1859 et fusils 1854 et 1857) sont de calibre 17.8mm ?
3) les carabines 1837 et 1842 avaient pour calibre :.....?
4) Les conversions en modèles 1867 (Tabatières) étaient-elles toutes au calibre de 17.8mm où les modèle 1822T Bis / 1840T /1842T ont gardé leur canon de 18mm ? (18.1mm) ?
Un clic ici pour retrouver le sujet initial
Conservateur a écrit:L’ensemble de toutes ces variations est résumé dans le tableau suivant :
1777 : calibre du canon : 17,48 – diamètre de la balle : 16,54 – vent : 0,94 – poids balle : 27,2 – poids charge : 12,24 – PT : 39,44
1792 : calibre du canon : 17,48 – 15,98 – 1,50 – 24 ?5 – 12,24 – 36,74
1827 : calibre du canon : 17,48 – 16,35 – 1,13 – 25,6 – 12,24 – 37,84
1828 : calibre du canon : 17,48 – 16,35 – 1,13 – 25,6 – 10,50 – 36,10
1840 : calibre du canon : 17,48 – 16,35 – 1,13 – 25,6 – 9,00 – 34,60
1842 : calibre du canon : 18,00 – 17,00 – 1,00 – 29,3 – 8,00 – 37,30
1848 : calibre du canon : 18,00 – 16,70 – 1,30 – 27,7 – 9,00 – 36,70
Balle Nessler : calibre du canon : 18,00 – 17,20 – 0,80 – 30,0 – 6,00 – 36,00
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