Vieux truc de la manuf de Maubeuge
+4
obaneck
walker33
Tico
Fabian23
8 participants
TIR et COLLECTION Armes Règlementaires :: Armes règlementaires à poudre noire :: Armes à poudre noire à percussion
Page 1 sur 1
Vieux truc de la manuf de Maubeuge
Il y à trois semaine un copain armurier au Tessin m'appel en disant qu'il venait de recevoir un vieux pêtoir à percussion de la manufacture de maubeuge et qu'il m'enverrai quelques photos. Je m'attendais à un 1822tBis. Deux semaine plus tard les photos arrivent sur Whatsapp (j'avais oublié mais c'est rapide pour le Tessin ), bref disons que mon virement était en route après la première photo de la platine! Le vieux machin est en effet une magnifique carabine de tirailleur mle1837 dans un état proche de neuf et numéro 80! Les poinçoins témoignent qu'il fut assemblé à la manufacture de Châtellerault malgré le marquage sur la platine car c'est en effet Châtellerault qui hérite la fabrication suite à la cloture de Maubeuge.
Le canon est miroir et je vais naturellement le tester au stand une fois que j'aurais fabriqué quelques sabots.
Place aux photos:
Première et dernière (1837 et 1859)
Le fut en noyer est assez fin.
La carabine emploie une culasse avec chambre rétreinte qu'on retrouve sur le pistolet mle1833. La seule différence ce trouve au niveau de la munition car la balle ronde est chargée sur un sabot de bois pour garantir une expansion plus régulière. Ceci complique naturellement la confection des cartouches en papier réglementaires et les éclats de sabots quittants le canon peuvent blesser ses camarades.
Contraire à ce qu'on lit souvent, le rempart autour de la cheminée n'est pas pour guider les doigts du tireur lors du placement de l'amorce. L'intention initial était de loger l'amorce dans un disque ou éventuellement dans la base du sabot pour que le tireur puisse amorcer simplement en appuyant la cartouche sur la cheminée avant de charger. Le rempart sert donc de guide pour la cartouche, c'est pour ça que l'interieur est parfaitement circulaire. J'ai bien l'intention de recréer ce type de cartouche
Notez que les vis se visent dans la contre platine, donc dans le sens opposé que d'habitude.
Quelqu'un connait ce poinçon B x M?
Baguette lourde pour mater la balle contre le sabot de bois.
Le canon est miroir et je vais naturellement le tester au stand une fois que j'aurais fabriqué quelques sabots.
Place aux photos:
Première et dernière (1837 et 1859)
Le fut en noyer est assez fin.
La carabine emploie une culasse avec chambre rétreinte qu'on retrouve sur le pistolet mle1833. La seule différence ce trouve au niveau de la munition car la balle ronde est chargée sur un sabot de bois pour garantir une expansion plus régulière. Ceci complique naturellement la confection des cartouches en papier réglementaires et les éclats de sabots quittants le canon peuvent blesser ses camarades.
Contraire à ce qu'on lit souvent, le rempart autour de la cheminée n'est pas pour guider les doigts du tireur lors du placement de l'amorce. L'intention initial était de loger l'amorce dans un disque ou éventuellement dans la base du sabot pour que le tireur puisse amorcer simplement en appuyant la cartouche sur la cheminée avant de charger. Le rempart sert donc de guide pour la cartouche, c'est pour ça que l'interieur est parfaitement circulaire. J'ai bien l'intention de recréer ce type de cartouche
Notez que les vis se visent dans la contre platine, donc dans le sens opposé que d'habitude.
Quelqu'un connait ce poinçon B x M?
Baguette lourde pour mater la balle contre le sabot de bois.
Re: Vieux truc de la manuf de Maubeuge
Félicitations
Tico- Pilier du forum
- Nombre de messages : 2242
Age : 44
Date d'inscription : 13/12/2016
Re: Vieux truc de la manuf de Maubeuge
Splendide! Pour les sabots, ça ne serait pas plus simple de les mouler en résine ?
walker33- Futur pilier
- Nombre de messages : 960
Age : 61
Date d'inscription : 08/11/2012
Re: Vieux truc de la manuf de Maubeuge
Je pense que je vais utiliser du MDF, facile à découper et usiner. À mon avis c'est important que le matériau ne doit pas être trop fragile au risque de briser lors du martellement de la balle. J'ai déjà testé des sabots de bois pour le Dreyse et ils ont bien tendance à voler en éclats et même brûler dans le canon . Avec un épais disque de feutre derrière ils survivent mieux. Le sabot pour le 1837 était bien prévu d'une rondelle en feutre ou cuir.
Dernière édition par Fabian23 le Ven 03 Juin 2022, 14:41, édité 1 fois
Re: Vieux truc de la manuf de Maubeuge
Je n’ai pas de mots
Félicitations pour cet achat , dommage qu’il n’y ai pas eu la baïonnette et sa poignée avec
Mais cette carabine me suffirait largement
Félicitations pour cet achat , dommage qu’il n’y ai pas eu la baïonnette et sa poignée avec
Mais cette carabine me suffirait largement
Invité- Invité
Re: Vieux truc de la manuf de Maubeuge
Allobroges a écrit:Je n’ai pas de mots
Félicitations pour cet achat , dommage qu’il n’y ai pas eu la baïonnette et sa poignée avec
Mais cette carabine me suffirait largement
Les rares baïonnettes que j'ai vu coûtent au moins 2x ce que j'ai payé la carabine
Re: Vieux truc de la manuf de Maubeuge
Merci de nous avoir présenté cette merveille ! Il est beau comme l’antique
La hausse et le petit cran pour 150 mètres sont mémorables (et le reste aussi !)
Bravo
La hausse et le petit cran pour 150 mètres sont mémorables (et le reste aussi !)
Bravo
obaneck- Pilier du forum
- Nombre de messages : 2705
Age : 70
Localisation : Près de la Grande Bleue
Date d'inscription : 20/05/2021
Re: Vieux truc de la manuf de Maubeuge
Fabian23 a écrit:Je pense que je vais utiliser du MDF, facile à découper et usiner. À mon avis c'est important que le matériau ne doit pas être trop fragile au risque de briser lors du martellement de la balle. J'ai déjà testé des sabots de bois pour le Dreyse et ils ont bien tendance à voler en éclats et même brûler dans le canon . Avec un épais disque de feutre derrière ils survivent mieux. Le sabot pour le 1837 était bien prévu d'une rondelle en feutre ou cuir.
Le médium (comme on l'appelais "avant" ) me paraît un bon compromis, moins cassant et plus souple que le bois, il remplacera avantageusement le couple bois-feutre.
Belle acquisition, merci de nous l'avoir présentée. C'est un bel exemple du patrimoine armurier français du XIX éme siècle, qui sera préservé et ramené à la vie par un véritable passionné, tu méritais bien de tomber sur une rareté
Caudron- Pilier du forum
- Nombre de messages : 3283
Age : 60
Date d'inscription : 02/02/2020
Presentation
Voici mon topo au sujet de la carabine:
Concernant les cartouches propres à cette carabine je serais très reconnaissant si quelqu'un à des infos plus précises. Je connais les donnés dans Bodroit et j'ai aussi trouvé un extrait d'un guide technique de 1851 qui mentionne la composition pour la carabine suivante mle1840 "à munitions". Les deux carabines partagent le même calibre et le même pas de rayures, les différence sont que la charge pour la carabine 1840 passe à 6g au lieu de 4g et le nombre de rayures est réduit de 6 à 4.
Les questions que je me pose sont:
1. Pour la cartouche 1837 il est cité que l'amorce est logé dans le sabot selon le principe Brunéel, d'où la présence du conducteur autour de la cheminée. Selon la littérature d'époque que j'ai trouvé sur BnF par contre ils semblent indiquer que ce principe n'a pas dépassé le stand d'éssai. Le sabot pour la cartouche 1840 n'a pas d'amorce intégré car le calpin graisse est cloué à sa face arrière.
2. Comment est disposée la charge de poudre? Est-elle séparée du projectile à l'intérieur de l'enveloppe de la cartouche comme dans les cartouches pour armes à tige et minié qqs années plus tard?
Dus au fait que le sabot doit se trouve à une extrémité de la cartouche, cette cartouche serait la première du type où le tireur verse la charge, inverse la cartouche, insert le projectile et ensuite déchire l’excès de papier avant d'enfoncer la balle complètement.
Concernant les cartouches propres à cette carabine je serais très reconnaissant si quelqu'un à des infos plus précises. Je connais les donnés dans Bodroit et j'ai aussi trouvé un extrait d'un guide technique de 1851 qui mentionne la composition pour la carabine suivante mle1840 "à munitions". Les deux carabines partagent le même calibre et le même pas de rayures, les différence sont que la charge pour la carabine 1840 passe à 6g au lieu de 4g et le nombre de rayures est réduit de 6 à 4.
Les questions que je me pose sont:
1. Pour la cartouche 1837 il est cité que l'amorce est logé dans le sabot selon le principe Brunéel, d'où la présence du conducteur autour de la cheminée. Selon la littérature d'époque que j'ai trouvé sur BnF par contre ils semblent indiquer que ce principe n'a pas dépassé le stand d'éssai. Le sabot pour la cartouche 1840 n'a pas d'amorce intégré car le calpin graisse est cloué à sa face arrière.
2. Comment est disposée la charge de poudre? Est-elle séparée du projectile à l'intérieur de l'enveloppe de la cartouche comme dans les cartouches pour armes à tige et minié qqs années plus tard?
Dus au fait que le sabot doit se trouve à une extrémité de la cartouche, cette cartouche serait la première du type où le tireur verse la charge, inverse la cartouche, insert le projectile et ensuite déchire l’excès de papier avant d'enfoncer la balle complètement.
Re: Vieux truc de la manuf de Maubeuge
Bonjour Fabian,Fabian23 a écrit:Voici mon topo au sujet de la carabine:
Concernant les cartouches propres à cette carabine je serais très reconnaissant si quelqu'un à des infos plus précises. Je connais les donnés dans Bodroit et j'ai aussi trouvé un extrait d'un guide technique de 1851 qui mentionne la composition pour la carabine suivante mle1840 "à munitions". Les deux carabines partagent le même calibre et le même pas de rayures, les différence sont que la charge pour la carabine 1840 passe à 6g au lieu de 4g et le nombre de rayures est réduit de 6 à 4.
Les questions que je me pose sont:
1. Pour la cartouche 1837 il est cité que l'amorce est logé dans le sabot selon le principe Brunéel, d'où la présence du conducteur autour de la cheminée. Selon la littérature d'époque que j'ai trouvé sur BnF par contre ils semblent indiquer que ce principe n'a pas dépassé le stand d'éssai. Le sabot pour la cartouche 1840 n'a pas d'amorce intégré car le calpin graisse est cloué à sa face arrière.
2. Comment est disposée la charge de poudre? Est-elle séparée du projectile à l'intérieur de l'enveloppe de la cartouche comme dans les cartouches pour armes à tige et minié qqs années plus tard?
Dus au fait que le sabot doit se trouve à une extrémité de la cartouche, cette cartouche serait la première du type où le tireur verse la charge, inverse la cartouche, insert le projectile et ensuite déchire l’excès de papier avant d'enfoncer la balle complètement.
Intéressantes réflexions, tu relances beaucoup d'interrogations ...
La fièvre de connaissances ne se tarit pas
PS Disposes-tu du lien de ton extrait d'époque ?
Tico- Pilier du forum
- Nombre de messages : 2242
Age : 44
Date d'inscription : 13/12/2016
Re: Vieux truc de la manuf de Maubeuge
Salut Tico.
Voici le lien (page 40): https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1182749w
Discussion au sujet de la cartouche Brunéel (à partir de la page 22): https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k8721353
Il est marrant de voir que les fusils ne sont pas "à percussion" mais "percutant"
Voici le lien (page 40): https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1182749w
Discussion au sujet de la cartouche Brunéel (à partir de la page 22): https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k8721353
Il est marrant de voir que les fusils ne sont pas "à percussion" mais "percutant"
Re: Vieux truc de la manuf de Maubeuge
Félicitation pour cette acquisition.
J’ai jeté un œil dans ce que j’ai. Rien sur la construction de la cartouche. En tous cas rien qui permette de lever ton doute.
Par contre, dans le Lombard, il parle bien de cette carabine, mais l’appelle carabine de tirailleur modèle… 1838!
Je ne sais d’ailleurs pas si cette année modèle (1837 ou 1838) est réellement officielle.
En lisant Lombard, on peut avoir un doute. Je cite :
« … un rédacteur du « journal des armes spéciales » désigna en 1835 cette carabine d’essai « carabine Poncharra », au grand dam de M. Delvigne qui protesta plusieurs fois, en revendiquant son invention.
Mais, en 1838, la « carabine de tirailleur » était née et fut donnée à un bataillon de tirailleurs en Afrique.
La Manufacture d’armes de Châtellerault en fabriqua 2 548 de 1838 à 1840, période correspondant au mandat de Directeur du Colonel de Poncharra à la Manufacture ».
Pour le reste, rien de plus que dans le Boudriot, à part qu’il précise que les rayures mesurent 2,3 mm de largeur.
J’ai jeté un œil dans ce que j’ai. Rien sur la construction de la cartouche. En tous cas rien qui permette de lever ton doute.
Par contre, dans le Lombard, il parle bien de cette carabine, mais l’appelle carabine de tirailleur modèle… 1838!
Je ne sais d’ailleurs pas si cette année modèle (1837 ou 1838) est réellement officielle.
En lisant Lombard, on peut avoir un doute. Je cite :
« … un rédacteur du « journal des armes spéciales » désigna en 1835 cette carabine d’essai « carabine Poncharra », au grand dam de M. Delvigne qui protesta plusieurs fois, en revendiquant son invention.
Mais, en 1838, la « carabine de tirailleur » était née et fut donnée à un bataillon de tirailleurs en Afrique.
La Manufacture d’armes de Châtellerault en fabriqua 2 548 de 1838 à 1840, période correspondant au mandat de Directeur du Colonel de Poncharra à la Manufacture ».
Pour le reste, rien de plus que dans le Boudriot, à part qu’il précise que les rayures mesurent 2,3 mm de largeur.
Invité- Invité
Re: Vieux truc de la manuf de Maubeuge
Beau et rare spécimen !
euleuleu- Membre confirmé
- Nombre de messages : 324
Age : 58
Localisation : 3813
Date d'inscription : 23/01/2021
Re: Vieux truc de la manuf de Maubeuge
Très belle pièce et un grand merci pour la vidéo explicative
Vmax666- Pilier du forum
- Nombre de messages : 2258
Age : 65
Localisation : Suisse
Date d'inscription : 08/09/2012
Re: Vieux truc de la manuf de Maubeuge
Je partage un premier extrait du rapport du capitaine Rayne (avec description du projectile Brunéel, il faut que je retrouve la photo du croquis) :
"De nouveaux essais durent donc être entrepris pour obvier aux effets fâcheux qu’exerçait sur le forcement du projectile l’existence au fond de l’âme d’une partie non rayée, se prolongeant jusqu’au delà de la position occupée par la balle, alors qu’elle reposait sur la charge. Les expériences recommencèrent dès 1833, en prenant pour point de départ un perfectionnement qui venait d’être introduit dans le chargement des armes rayées par Mr Delvigne, officier de la Garde royale. Cette proposition qui datait d’ailleurs de 1827 a le grand mérite d’avoir, à cette époque où les commissions officielles, chargées des études sur les carabines, se composaient à la fois d’hommes de science et de praticiens, enseigné la bonne voie où l’on devait s’engager pour poursuivre les progrès réels à appliquer aux armes portatives rayées.
Jusqu’à ce moment les points les plus défectueux reconnus dans l’emploi des armes rayées avaient été les difficultés excessives du chargement et les imperfections du forcement, lequel existait toujours en trop fort ou trop faible, mais toujours irrégulier. La valeur d’une arme rayée tient surtout à la manière dont le forcement est pratiqué, c’est donc de ce côté que devaient être dirigés les perfectionnements.
Or quelles sont les conditions auxquelles doit satisfaire le forcement d’une balle. On peut les résumer ainsi. Le forcement doit être :
1/ assuré, c’est-à-dire que la balle doit s’imprimer dans les rayures d’une quantité suffisante pour ne pas leur échapper pendant son trajet dans l’arme, et pour prendre le mouvement de rotation correspondant à leur inclinaison.
2/ complet, c’est-à-dire qu’il ne doit rester aucun jour entre la paroi de la balle et celle du canon, afin d’éviter que les gaz, en s’échappant par ces jours, n’exercent pas une action égale sur tout le pourtour de la balle, et ne la fassent dévier de sa direction.
3/ régulier, c’est-à-dire qu’il doit se produire à chaque coup de la même manière, condition essentielle pour la régularité du tir.
Système Delvigne :
La proposition de Delvigne avait précisément pour but d’assurer le forcement à l’aide d’une disposition particulière du fond de l’âme, de le compléter par un tracé du profil des rayures déterminé expérimentalement, enfin de le régulariser en fixant convenablement les détails du chargement.
Le principe du système reposait sur l’adoption d’une culasse à chambre cylindrique. Cette chambre plus étroite que le tube du canon contenait la charge, et présentait à son orifice un ressaut à fraisure conique, sur lequel une balle sphérique, ayant environ 3/10 de mm de moins que le calibre du canon venait se placer, pour y être frappées par une baguette à tête massive. En aplatissant sous ce choc, la balle remplissait les rayures et se trouvait ainsi forcée. (voir croquis img 8320)
Inconvénients de ce système :
Aussitôt que l’on vient à examiner de près la manière dont fonctionnait ce système, on ne tarda pas à reconnaître que si le chargement était plus facile qu’avec les procédés antérieurs, on était loin cependant d’obtenir, sous le rapport de la justesse du tir, des résultats comparables à ceux que l’on obtenait par le chargement au maillet. On conçoit en effet que la balle, reposant sur les bords de la chambre, devait y pénétrer en partie sous le choc de la baguette, en tassant ainsi plus ou moins la poudre dont elle écrasait les grains : de plus son centre de gravité ne restait généralement pas sur l’axe du canon, ce qui était une cause puissante de déviation, comme on peut s’en rendre compte par les considérations suivantes :
Le projectile, supposé homogène, étant inégalement forcé dans le canon supposé à rayures hélicoïdales, l’axe de ce projectile qui contient le centre de gravité décrira une hélice de même pas que les rayures de l’arme. Dès que le projectile aura franchi la bouche du canon, son centre de gravité s’échappera suivant la tangente au denier élément de l’hélice qu’il aura décrite dans l’intérieur du canon. Par conséquent, il se produira un écart d’autant plus marqué que la force centrifuge, qui tend à éloigner le projectile du centre de son mouvement de rotation, sera plus considérable. Le projectile étant devenu libre, éprouve immédiatement un changement d’axe de rotation : au lieu de continuer à tourner autour de l’axe primitif, il continue à tourner dans le mêmes sens, mais autour d’un axe passant par le centre de gravité, comme si on lui avait imprimé tout d’abord un mouvement de rotation autour de cet axe.
En outre, les rayures de cette arme s’encrassaient facilement, et ne fonctionnaient plus après un petit nombre de coups, le chargement devenait difficile, et le tir mauvais, inférieur même à celui des rayures droites, malgré l’addition de la part de l’inventeur, d’un calepin graissé enveloppant la balle.
La proposition Delvigne semblait donc compromise dès sa naissance. Mais comme la justesse de la carabine proposée, comparée à celle du fusil lisse d’infanterie, fut trouvée dans les rapport de 3 à 2, on eut garde d’y renoncer complètement, et on résolut de poursuivre l’examen du système, espérant remédier aux défauts qu’il présentait, tout en conservant la balle plus petite de calibre que le canon.
Cartouche à sabot et à calepin de Brunéel : (voir croquis img 8321)
Tout d’abord on eut l’idée d’appliquer à l’arme Delvigne la cartouche de l’armurier Brunéel , que ce dernier avait proposée en même temps qu’une arme, dont j’ai dit un mot précédemment, qui servit de point de départ pour la transformation des fusils français au système percutant et l’établissement du Mle 1840.
Cette cartouche était terminée à sa partie postérieure par un petit sabot en bois sur lequel la balle venait reposer. De cette manière, dans le chargement Delvigne, se trouvait empêchée l’introduction du plomb dans la chambre. On put alors supprimer la fraisure de cette chambre : le soldat reposa directement sur le ressaut, et une rondelle ou calepin de serge graissée d’environ 35 mm de diamètre, clouée sous ce sabot, offrit le double avantage de remédier aux inconvénients de l’encrassement prématuré, en nettoyant à chaque coup les rayures, et de conserver la justesse en maintenant l’axe du sabot sur l’axe du canon, et empêchant les dégagements inégaux de gaz autour de la balle.
Il est impossible de méconnaître que ce nouveau chargement, tout imparfait qu’il fût encore, constituait véritablement un grand progrès. Les essais auxquels il fut soumis mirent en relief un principe important que la théorie explique et que l’expérience vint en outrer confirmer.
Ce principe peut s’énoncer ainsi : « L’aplatissement des balles rondes augmente la stabilité de leur axe de rotation, et par suite la justesse de leur tir ». on sait en effet que parmi les différents axes, autour desquels un solide de résolution peut effectuer son mouvement de rotation, il en est un qui jouit principalement de cette propriété remarquable, à savoir que le mouvement qui s’opère autour de cet axe présente le plus de stabilité. Bien plus, lorsqu’un mouvement de rotation rapide est imprimé à ce solide autour d’un axe instantané, ce mouvement tend à s’établir autour de l’axe de plus grande stabilité qui se nomme axe de plus grand moment d’inertie. Or quand une balle est aplatie sous l’action de la baguette, comme dans le système Delvigne, et qu’elle prend en quelque sorte la forme d’un disque bi convexe, l’axe du plus grand moment d’inertie est précisément celui qui correspond à l’aplatissement, c’est-à-dire le plus petit axe, qui coïncide alors avec l’axe du canon. Le mouvement de rotation imprimé par les rayures autour de cet axe se conservera donc plus longtemps qu’autour d’aucun autre. L’axe de rotation se confondant ainsi avec la direction du mouvement de translation les résistances exercées sur la surface du projectile autour de cette direction seront égales entre elles pour tous les points de cette surface et symétriquement placées, ainsi que je l’ai établi déjà précédemment. Dès lors les forces déviatrices se composeront mutuellement et il est à prévoir que la justesse sera plus grande.
Expériences sur des balles à axes inégaux :
C’est en effet ce que mirent en évidence des expériences exécutées vers cette époque dans les manufactures alors existantes de Maubeuge te de Mutzig. On tira dans une même arme rayée du calibre de 16,9 mm, à la même distance, et dans les mêmes circonstances de tir 3 balles différentes ainsi établies :
La 1ère sphérique, au diamètre de 16,35 mm, du poids de 25 gr et qui devait s’aplatir sous le choc de la baguette.
La 2e, de forme ovale, ayant pour diamètre 16,35/19,18 mm et pesant 31 gr
La 3e, de forme ovale également, ayant pour diamètre 16,35/21,43 mm et pesant 39 gr.
Dans le chargement, le grand diamètre de ces 2 dernières balles coïncidait avec l’axe du canon. En outre on parvint à force ces balles à la baguette par le même mode et aussi parfaitement que la balle sphérique.
La balle à axe raccourci obtint sur les 2 autres un avantage considérable.
Il fut aussi constaté que du moment où l’axe de rotation n’est pas le plus court, comme avec les balles de 39 et de 31 gr, la différence de justesse n’est pas grande, et que ce n’est pas la balle qui a l »axe allongé qui donner de moins bons résultats, peut-être parce qu’elle est plus lourde. Mais la balle à axe de rotation raccourci l’emporte toujours en justesse sur les autres balles à axe de rotation plus ou moins allongé.
On trouve d’ailleurs, dans le journal de l’Ecole Polytechnique (27e cahier, année 1839) un compte-rendu d’expériences faites à Metz par Mr le général Didion qui confirme ces résultats, c’est-à-dire la supériorité de justesse de tir de la balle à axe de rotation un peu aplati sur la balle sphérique, ou sur la balle allongée suivant l’axe du canon, et terminée par des ??? (img 8322).
A l’appui de ces faits et pour confirmer la réalité de ce principe de la stabilité de l’axe de rotation d’un projectile lorsque cet axe se confond avec l’axe de plus grand moment d’inertie, on peut encore citer les expériences qui s’exécutèrent à l’aide du gyroscope inventé par Léon Foucault et modifié par Maldan, en vue de l’approprier à l’explication du mouvement des projectiles.
Cet instrument consiste en principe en un corps rond aplati, soit un sphéroïde ou un tore, très mobile au milieu d’un système d’anneaux, disposés de façon que l’on puisse donner à volonté à son axe une direction quelconque.
Dd’ est l’axe du corps tournant, bb’ est un axe horizontal perpendiculaire à l’axe aa’ et permettant de donner à cet axe toute espèce de position dans un plan vertical normal à bb’.
Cc’ est un axe vertical autour duquel tout le système peut tourner librement.
D est un pignon servant à donner au corps tournant un mouvement de rotation très rapide autour de l’axe aa’.
Il faut que le centre de gravité du corps coïncide toujours exactement avec le centre de figure commun du système des anneaux, quelle que soit la position du corps. Pour cela, il est nécessaire que le centre de rotation des 2 anneaux, ainsi que l’axe du corps tournant s’entrecroisent en un seul et même point qui doit de plus se confondre avec le contre de gravité (img 8323).
Pour obtenir ce résultat les 2 pivots du corps tournant qui simule le projectile peuvent s’avancer ou reculer à volonté au moyen de vis micrométriques. Dans ces conditions, en suspendant le corps dans les anneaux, on pourra donner à son axe telle direction que l’on jugera à propose, et il se maintiendra dans la position voulue pendant l’expérience.
Cela posé, si on fait marcher l’appareil, on observe que tant que le sphéroïde ne tourne pas autour de son axe de plus grande stabilité, la moindre force appliquée à l’un ou l’autre des 2 anneaux tournants, fait mouvoir cet anneau avec facilité. Mais il n’en est plus de même dès que le corps tourne autour de son axe : il faut employer alors une force très sensible pour déranger même de très peu, soit l’un soit l’autre des 2 anneaux, et cette difficulté d’incliner l’axe de rotation augmente avec la vitesse de rotation.
Une autre expérience qui démontre non moins évidemment le même principe et qui est plus facile à répéter, consiste à suspendre un disque métallique à l’extrémité d’un fil. Si l’on donne à ce fil une torsion suffisante pour pouvoir imprimer au disque un mouvement de rotation considérable, on verra au bout de quelques tours ce disque prendre une position horizontale et tourner autour de son petit axe, c’est-à-dire de l’axe du plus grand moment d’inertie.
Ainsi donc pour ce qui se rapporte au tir des armes portatives les projectiles animés d’un rapide mouvement de rotation autour de leur axe de révolution et de plus grand moment d’inertie doivent tendre à se mouvoir sur leurs trajectoires en tournant autour du même axe, et en conservant leur axe de rotation parallèle à lui-même.
J’indiquerai plus loin que ce parallélisme de l’axe de rotation des projectiles est heureusement combattu par l’action même de la résistance de l’air qui tend à le rapprocher à chaque instant de la tangente à la trajectoire, condition évidemment la plus favorable.
La proposition de Delvigne donnait satisfaction aux principes mécaniques que je viens d’analyser, elle méritait par conséquent d’être prise en considération. Aussi fut-elle l’objet d’expériences officielles qui eurent lieu en 1833 et en 1834 dans les manufactures de Maubeuge, de Charleville et de Mutzig.
En même temps qu’on étudiait une nouvelle arme pour le service des places, on en chercha une seconde plus portable et appropriée à l’armement d’un corps portant le nom de francs-tireurs, dont le maréchal Soult demandait la création.
Carabine de tirailleurs à la Pontcharra modèle 1837 / Grosse carabine ou fusil de rempart modèle 1838 :
Les travaux entrepris conduisirent à arrêter les modèles de 2 armes appelées l’une petite carabine ou carabine de tirailleurs modèle 1837 dite à la Pontcharra, l’autre grosse carabine ou fusil de rempart modèle 1838. Ces armes une fois mises en service donnèrent lieu à des observations dont on profita pour les modifier dans plusieurs de leurs parties. On assista ainsi d’une part à la création de la carabine dite de munition modèle 1840, puis de la carabine modèle 1842, et d’autre part à celle des fusils de rempart modèle 1840 et 1842. Ils furent du reste les seuls modèles d’armes auxquels on continua d’appliquer les principes de chargement et de forcement de Delvigne.
Il me semble indispensable d’analyser les considérations diverses qui guidèrent les commissions de 1833 dans l’établissement de ces armes rayées et la fixation de leurs éléments les plus caractéristiques parce qu’il me sera ainsi fourni l’occasion de discuter plus d’un principe général se rapportant aux modifications qui imposent pour le tracé des rayures des changements dans le mode de forcement des balles.
Calibre du canon et de la balle / Vent :
La nécessité de conserver aux balles sphériques employées à cette époque soit dans les armes lisses existantes (16,3 mm), soit dans les armes rayées qu’il s’agissait de créer un diamètre uniforme pour la facilité des approvisionnements, et d’autre part l’obligation de réserver un vent suffisant pour la commodité du chargement et du forcement, fixaient à peu près le calibre de l’arme qui était destinée au service de campagne. On adopta 17 mm pour la petite carabine de tirailleurs.
Pour la grosse carabine, dont l’emploi était limité à des circonstances spéciales, on ne craignit pas d’en forcer le calibre et de la porter à 20,5 mm.
Le système de forcement Delvigne permettait-il d’admettre de grandes différences dans le diamètre des balles ? les expériences précédemment citées qui avaient établi que l’axe de rotation raccourci était plus favorable à la justesse du tir que l’axe de rotation allongé pouvaient autoriser à l’espérer, mais il n’en devait être ainsi qu’à la condition que la justesse augmentât en raison de l’aplatissement de la balle. Or des tirs exécutés, avec le mode de chargement Delvigne, pour préciser ce point si important dans le problème à résoudre, donnèrent constamment de mauvais résultats, soit que l’on diminuât les projectiles pour les tirer dans le même canon, soit que l’on augmentât le calibre du canon pour le tirer avec la même balle. Ceci indiquait que ce système ne convenait pas, s’il y avait une grande différence entre le diamètre de la balle et le calibre du canon. On remarqua en effet, dans ce cas, en déculassant le canon après avoir forcée la balle, que le centre de figure du projectile ne se trouvait plus sur l’axe du canon, que la balle était plus forcée d’un côté que de l’autre, malgré le sabot interposé entre la chambre et la balle, circonstance très défavorable à la justesse du tir et qui a lieu d’une manière encore plus prononcée lorsqu’on n’emploie pas le sabot. D’ailleurs il faut reconnaître que la dépression de la balle forcée par le procédé Delvigne devait lui faire perdre aux grandes distances et à cause de la résistance de l’air, l’avantage qu’elle pouvait avoir au départ sur la balle sphérique.
En conséquence si d’une part il était acquis que la balle se forçait d’autant moins bien qu’elle différait plus du calibre du canon, il y avait donc à fixer par l’expérience directe la rotation exacte qui devait exister entre le diamète de la balle et celui de l’âme, non seulement sous le rapport de l’influence de ces 2 causes relatives à la justesse du tir, mais encore sous le rapport de la facilité du chargement et de la prolongation du tir. Un vent de 5/10 à 8/10 de mm parut concilier tous les avantages.
On adopta donc pour la petite carabine une balle de 16,3 mm et pour la grosse carabine une balle de 20 mm, ce qui donnait dans le 1er cas un vent de 7/10 mm et dans le second de 5/10 mm.
Quant aux poids qui en résultaient pour les balles, ils étaient égaux à 25,6 gr pour l’une et à 45,6 gr pour l’autre.
Poids des charges :
Pour la détermination des charges, on s’appuya sur les considérations suivantes :
1/ la quantité de poudre devait être telle qu’elle pût s’enflammer complètement avant que le projectile quittât le canon, afin qu’elle produisit tout son effet.
2/ la charge devait assurer les effets de justesse, de portée et de pénétration qu’on voulait obtenir.
3/ le recul devait pouvoir être supporté.
Or dans les armes rayées en général, le projectile forcé de suivre les rayures, éprouve dans l’âme des frottements qui diminuent sa vitesse de translation. En outre, le mouvement de rotation que les rayures impriment au projectile dépend à la fois de la vitesse de translation et de l’inclinaison des rayures. Il varie en raison directe de la 1ère, et en raison inverse de la 2ème. Il s’en suit que le poids des charges ne peut pas dépasser certaines limites, car si la charge est trop forte, la portion de la balle engagée dans les rayures peut s’en échapper ou se déchirer pendant son trajet dans le canon. Si au contraire elle est trop faible, le mouvement de translation et par suite celui de rotation devenant trop lent, la portée et la justesse se trouvent diminuées. D’autre part comparées avec les fusils lisses, les armes rayées devaient admettre des charges réduites, par cette raison que le forcement et la suppression du vent qui en résultait permettaient aux gaz d’acquérir dans le même espace de temps une plus grande tension.
Dans les armes du système Delvigne en particulier, on ne pouvait employer que des charges très faibles, par suite de la forme même de la balle avec les projectiles sphériques aplatis, la quantité de plomb qui s’imprime dans les rayures est peu considérable, et ne présente que peu de résistance à l’arrachement.
Aussi pour la petite carabine on adopta la charge de 4 gr et pour la grosse carabine 6 gr.
Ces 2 carabines servirent à l’armement d’un bataillon de tirailleurs qui fut créé à Vincennes à la fin de 1838 et envoyé en Afrique en 1839. La petite carabine avait une grande justesse et un tir efficace jusqu’à 300 mètres, mais cette portée fut reconnue insuffisante, et on voulut l’étendre jusqu’à 600 mètres. Pour cela on augmenta considérablement la charge, en l’élevant à 7 gr, les calibres de l’arme et de la balle restèrent les mêmes. On eut ainsi la carabine dite de munition modèle 1840 à laquelle on adopta une hausse mobile jugée nécessaire par l’accroissement des distances de tir.
Cette carabine 1840 fut donnée aux bataillons de chasseurs d’Orléans, créés cette même année. On constat bientôt que le recul était intolérable. Ce qui amena à diminuer la charge, qui devint 6,25 gr. Afin de conserver au tir son efficacité, on augmenta le calibre de l’arme de 0,5 mm et en même temps le diamètre de la balle de 0,7 mm. En définitive le poids de la balle devint de 29 gr, c’est-à-dire plus fort de 3,4 gr. En même temps le vent était réduit de 0,2 mm, double condition favorable pour maintenir les effets balistiques équivalents à ce qu’ils étaient auparavant, malgré la diminution de la charge. On eut ainsi la carabine modèle 1842.
Quant aux fusils de rempart ou grosse carabines, les variations de leurs éléments furent moins importantes. Ainsi en 1840 on créa le fusil de rempart allégé pour lequel on porta la charge à 6gr25. En 1842, on créa un nouveau modèle qui ne différait du précédent que par un allègement encore plus grand. Quant aux calibres de ces 3 fusils de rempart et aux diamètres des balles employées, ils restèrent toujours fixées à 20,5 et 20 mm.
Dimensions de la chambre et du sabot :
On put dès lors arrêter les dimensions de la chambre et du sabot en ayant égard à des considérations d’encrassement, de facilité d’inflammation et de forcement. Plus la chambre est étroite, plus elle offre de facilité pour forcer la balle sur le sabot, mais aussi plus elle s’encrasse promptement, et il arriverait qu’au bout d’un petit nombre de coups, elle ne pourrait plus contenir toute la charge de poudre qui se trouverait en partie écrasée par le sabot. Dans une chambre très allongée, l’inflammation de la poudre étant moins rapide que dans une chambre courte, il eut été à craindre qu’une partie de la poudre fût projetée hors du canon.
D’ailleurs il ne suffit pas que le sabot trouve sur la chambre un appui convenable pour faciliter le forcement, il faut encore que son diamètre soit assez grand pour que son axe soit maintenu sur l’axe de l’âme par le calepin, et que celui-ci soit suffisamment pressé contre la paroi du canon pour empêcher ou atténuer les dégagements de gaz. D’autre part, il ne faut pas que ce diamètre soit assez fort pour faire éprouver des difficultés de chargement.
Pour ces diverses raisons, on admit les dimensions suivantes :
PETITE carabine : calibre de l’âme 17 mm – diamètre de la chambre 12 mm – Diamètre du sabot : 15,5 mm
GROSSE carabine : 20,5 mm – 14,7 mm – 18,8 mm.
Quant à la longueur de la chambre, elle se déduisait de la fixation du diamètre et du poids de la charge.
Lorsqu’on créa plus tard la carabine de munition modèle 1840 puis la carabine modèle 1842, la longueur seule de la chambre fut modifiée, en conséquence des variations qu’on fit subir à la charge et le diamètre de cette chambre resta le même, puisqu’il n’y avait rien de changé dans les conditions qui avaient servi à le déterminer en 1837. Ainsi les nouvelles longueurs de la chambre durent :
Pour la carabine de munition modèle 1840 (charge 7gr) 62 mm
Pour la carabine modèle 1842 (charge 6 gr) 52 mm
(voir croquis img 8327).
Quant aux fusils de rempart modèle 1840 et 1842, qui succédèrent au modèle 1838, la charge n’ayant été augmentée que d’une quantité insignifiante, 0,25 gr, on ne toucha en rien aux dimensions de la chambre dont la longueur resta égale à 44 mm.
"De nouveaux essais durent donc être entrepris pour obvier aux effets fâcheux qu’exerçait sur le forcement du projectile l’existence au fond de l’âme d’une partie non rayée, se prolongeant jusqu’au delà de la position occupée par la balle, alors qu’elle reposait sur la charge. Les expériences recommencèrent dès 1833, en prenant pour point de départ un perfectionnement qui venait d’être introduit dans le chargement des armes rayées par Mr Delvigne, officier de la Garde royale. Cette proposition qui datait d’ailleurs de 1827 a le grand mérite d’avoir, à cette époque où les commissions officielles, chargées des études sur les carabines, se composaient à la fois d’hommes de science et de praticiens, enseigné la bonne voie où l’on devait s’engager pour poursuivre les progrès réels à appliquer aux armes portatives rayées.
Jusqu’à ce moment les points les plus défectueux reconnus dans l’emploi des armes rayées avaient été les difficultés excessives du chargement et les imperfections du forcement, lequel existait toujours en trop fort ou trop faible, mais toujours irrégulier. La valeur d’une arme rayée tient surtout à la manière dont le forcement est pratiqué, c’est donc de ce côté que devaient être dirigés les perfectionnements.
Or quelles sont les conditions auxquelles doit satisfaire le forcement d’une balle. On peut les résumer ainsi. Le forcement doit être :
1/ assuré, c’est-à-dire que la balle doit s’imprimer dans les rayures d’une quantité suffisante pour ne pas leur échapper pendant son trajet dans l’arme, et pour prendre le mouvement de rotation correspondant à leur inclinaison.
2/ complet, c’est-à-dire qu’il ne doit rester aucun jour entre la paroi de la balle et celle du canon, afin d’éviter que les gaz, en s’échappant par ces jours, n’exercent pas une action égale sur tout le pourtour de la balle, et ne la fassent dévier de sa direction.
3/ régulier, c’est-à-dire qu’il doit se produire à chaque coup de la même manière, condition essentielle pour la régularité du tir.
Système Delvigne :
La proposition de Delvigne avait précisément pour but d’assurer le forcement à l’aide d’une disposition particulière du fond de l’âme, de le compléter par un tracé du profil des rayures déterminé expérimentalement, enfin de le régulariser en fixant convenablement les détails du chargement.
Le principe du système reposait sur l’adoption d’une culasse à chambre cylindrique. Cette chambre plus étroite que le tube du canon contenait la charge, et présentait à son orifice un ressaut à fraisure conique, sur lequel une balle sphérique, ayant environ 3/10 de mm de moins que le calibre du canon venait se placer, pour y être frappées par une baguette à tête massive. En aplatissant sous ce choc, la balle remplissait les rayures et se trouvait ainsi forcée. (voir croquis img 8320)
Inconvénients de ce système :
Aussitôt que l’on vient à examiner de près la manière dont fonctionnait ce système, on ne tarda pas à reconnaître que si le chargement était plus facile qu’avec les procédés antérieurs, on était loin cependant d’obtenir, sous le rapport de la justesse du tir, des résultats comparables à ceux que l’on obtenait par le chargement au maillet. On conçoit en effet que la balle, reposant sur les bords de la chambre, devait y pénétrer en partie sous le choc de la baguette, en tassant ainsi plus ou moins la poudre dont elle écrasait les grains : de plus son centre de gravité ne restait généralement pas sur l’axe du canon, ce qui était une cause puissante de déviation, comme on peut s’en rendre compte par les considérations suivantes :
Le projectile, supposé homogène, étant inégalement forcé dans le canon supposé à rayures hélicoïdales, l’axe de ce projectile qui contient le centre de gravité décrira une hélice de même pas que les rayures de l’arme. Dès que le projectile aura franchi la bouche du canon, son centre de gravité s’échappera suivant la tangente au denier élément de l’hélice qu’il aura décrite dans l’intérieur du canon. Par conséquent, il se produira un écart d’autant plus marqué que la force centrifuge, qui tend à éloigner le projectile du centre de son mouvement de rotation, sera plus considérable. Le projectile étant devenu libre, éprouve immédiatement un changement d’axe de rotation : au lieu de continuer à tourner autour de l’axe primitif, il continue à tourner dans le mêmes sens, mais autour d’un axe passant par le centre de gravité, comme si on lui avait imprimé tout d’abord un mouvement de rotation autour de cet axe.
En outre, les rayures de cette arme s’encrassaient facilement, et ne fonctionnaient plus après un petit nombre de coups, le chargement devenait difficile, et le tir mauvais, inférieur même à celui des rayures droites, malgré l’addition de la part de l’inventeur, d’un calepin graissé enveloppant la balle.
La proposition Delvigne semblait donc compromise dès sa naissance. Mais comme la justesse de la carabine proposée, comparée à celle du fusil lisse d’infanterie, fut trouvée dans les rapport de 3 à 2, on eut garde d’y renoncer complètement, et on résolut de poursuivre l’examen du système, espérant remédier aux défauts qu’il présentait, tout en conservant la balle plus petite de calibre que le canon.
Cartouche à sabot et à calepin de Brunéel : (voir croquis img 8321)
Tout d’abord on eut l’idée d’appliquer à l’arme Delvigne la cartouche de l’armurier Brunéel , que ce dernier avait proposée en même temps qu’une arme, dont j’ai dit un mot précédemment, qui servit de point de départ pour la transformation des fusils français au système percutant et l’établissement du Mle 1840.
Cette cartouche était terminée à sa partie postérieure par un petit sabot en bois sur lequel la balle venait reposer. De cette manière, dans le chargement Delvigne, se trouvait empêchée l’introduction du plomb dans la chambre. On put alors supprimer la fraisure de cette chambre : le soldat reposa directement sur le ressaut, et une rondelle ou calepin de serge graissée d’environ 35 mm de diamètre, clouée sous ce sabot, offrit le double avantage de remédier aux inconvénients de l’encrassement prématuré, en nettoyant à chaque coup les rayures, et de conserver la justesse en maintenant l’axe du sabot sur l’axe du canon, et empêchant les dégagements inégaux de gaz autour de la balle.
Il est impossible de méconnaître que ce nouveau chargement, tout imparfait qu’il fût encore, constituait véritablement un grand progrès. Les essais auxquels il fut soumis mirent en relief un principe important que la théorie explique et que l’expérience vint en outrer confirmer.
Ce principe peut s’énoncer ainsi : « L’aplatissement des balles rondes augmente la stabilité de leur axe de rotation, et par suite la justesse de leur tir ». on sait en effet que parmi les différents axes, autour desquels un solide de résolution peut effectuer son mouvement de rotation, il en est un qui jouit principalement de cette propriété remarquable, à savoir que le mouvement qui s’opère autour de cet axe présente le plus de stabilité. Bien plus, lorsqu’un mouvement de rotation rapide est imprimé à ce solide autour d’un axe instantané, ce mouvement tend à s’établir autour de l’axe de plus grande stabilité qui se nomme axe de plus grand moment d’inertie. Or quand une balle est aplatie sous l’action de la baguette, comme dans le système Delvigne, et qu’elle prend en quelque sorte la forme d’un disque bi convexe, l’axe du plus grand moment d’inertie est précisément celui qui correspond à l’aplatissement, c’est-à-dire le plus petit axe, qui coïncide alors avec l’axe du canon. Le mouvement de rotation imprimé par les rayures autour de cet axe se conservera donc plus longtemps qu’autour d’aucun autre. L’axe de rotation se confondant ainsi avec la direction du mouvement de translation les résistances exercées sur la surface du projectile autour de cette direction seront égales entre elles pour tous les points de cette surface et symétriquement placées, ainsi que je l’ai établi déjà précédemment. Dès lors les forces déviatrices se composeront mutuellement et il est à prévoir que la justesse sera plus grande.
Expériences sur des balles à axes inégaux :
C’est en effet ce que mirent en évidence des expériences exécutées vers cette époque dans les manufactures alors existantes de Maubeuge te de Mutzig. On tira dans une même arme rayée du calibre de 16,9 mm, à la même distance, et dans les mêmes circonstances de tir 3 balles différentes ainsi établies :
La 1ère sphérique, au diamètre de 16,35 mm, du poids de 25 gr et qui devait s’aplatir sous le choc de la baguette.
La 2e, de forme ovale, ayant pour diamètre 16,35/19,18 mm et pesant 31 gr
La 3e, de forme ovale également, ayant pour diamètre 16,35/21,43 mm et pesant 39 gr.
Dans le chargement, le grand diamètre de ces 2 dernières balles coïncidait avec l’axe du canon. En outre on parvint à force ces balles à la baguette par le même mode et aussi parfaitement que la balle sphérique.
La balle à axe raccourci obtint sur les 2 autres un avantage considérable.
Il fut aussi constaté que du moment où l’axe de rotation n’est pas le plus court, comme avec les balles de 39 et de 31 gr, la différence de justesse n’est pas grande, et que ce n’est pas la balle qui a l »axe allongé qui donner de moins bons résultats, peut-être parce qu’elle est plus lourde. Mais la balle à axe de rotation raccourci l’emporte toujours en justesse sur les autres balles à axe de rotation plus ou moins allongé.
On trouve d’ailleurs, dans le journal de l’Ecole Polytechnique (27e cahier, année 1839) un compte-rendu d’expériences faites à Metz par Mr le général Didion qui confirme ces résultats, c’est-à-dire la supériorité de justesse de tir de la balle à axe de rotation un peu aplati sur la balle sphérique, ou sur la balle allongée suivant l’axe du canon, et terminée par des ??? (img 8322).
A l’appui de ces faits et pour confirmer la réalité de ce principe de la stabilité de l’axe de rotation d’un projectile lorsque cet axe se confond avec l’axe de plus grand moment d’inertie, on peut encore citer les expériences qui s’exécutèrent à l’aide du gyroscope inventé par Léon Foucault et modifié par Maldan, en vue de l’approprier à l’explication du mouvement des projectiles.
Cet instrument consiste en principe en un corps rond aplati, soit un sphéroïde ou un tore, très mobile au milieu d’un système d’anneaux, disposés de façon que l’on puisse donner à volonté à son axe une direction quelconque.
Dd’ est l’axe du corps tournant, bb’ est un axe horizontal perpendiculaire à l’axe aa’ et permettant de donner à cet axe toute espèce de position dans un plan vertical normal à bb’.
Cc’ est un axe vertical autour duquel tout le système peut tourner librement.
D est un pignon servant à donner au corps tournant un mouvement de rotation très rapide autour de l’axe aa’.
Il faut que le centre de gravité du corps coïncide toujours exactement avec le centre de figure commun du système des anneaux, quelle que soit la position du corps. Pour cela, il est nécessaire que le centre de rotation des 2 anneaux, ainsi que l’axe du corps tournant s’entrecroisent en un seul et même point qui doit de plus se confondre avec le contre de gravité (img 8323).
Pour obtenir ce résultat les 2 pivots du corps tournant qui simule le projectile peuvent s’avancer ou reculer à volonté au moyen de vis micrométriques. Dans ces conditions, en suspendant le corps dans les anneaux, on pourra donner à son axe telle direction que l’on jugera à propose, et il se maintiendra dans la position voulue pendant l’expérience.
Cela posé, si on fait marcher l’appareil, on observe que tant que le sphéroïde ne tourne pas autour de son axe de plus grande stabilité, la moindre force appliquée à l’un ou l’autre des 2 anneaux tournants, fait mouvoir cet anneau avec facilité. Mais il n’en est plus de même dès que le corps tourne autour de son axe : il faut employer alors une force très sensible pour déranger même de très peu, soit l’un soit l’autre des 2 anneaux, et cette difficulté d’incliner l’axe de rotation augmente avec la vitesse de rotation.
Une autre expérience qui démontre non moins évidemment le même principe et qui est plus facile à répéter, consiste à suspendre un disque métallique à l’extrémité d’un fil. Si l’on donne à ce fil une torsion suffisante pour pouvoir imprimer au disque un mouvement de rotation considérable, on verra au bout de quelques tours ce disque prendre une position horizontale et tourner autour de son petit axe, c’est-à-dire de l’axe du plus grand moment d’inertie.
Ainsi donc pour ce qui se rapporte au tir des armes portatives les projectiles animés d’un rapide mouvement de rotation autour de leur axe de révolution et de plus grand moment d’inertie doivent tendre à se mouvoir sur leurs trajectoires en tournant autour du même axe, et en conservant leur axe de rotation parallèle à lui-même.
J’indiquerai plus loin que ce parallélisme de l’axe de rotation des projectiles est heureusement combattu par l’action même de la résistance de l’air qui tend à le rapprocher à chaque instant de la tangente à la trajectoire, condition évidemment la plus favorable.
La proposition de Delvigne donnait satisfaction aux principes mécaniques que je viens d’analyser, elle méritait par conséquent d’être prise en considération. Aussi fut-elle l’objet d’expériences officielles qui eurent lieu en 1833 et en 1834 dans les manufactures de Maubeuge, de Charleville et de Mutzig.
En même temps qu’on étudiait une nouvelle arme pour le service des places, on en chercha une seconde plus portable et appropriée à l’armement d’un corps portant le nom de francs-tireurs, dont le maréchal Soult demandait la création.
Carabine de tirailleurs à la Pontcharra modèle 1837 / Grosse carabine ou fusil de rempart modèle 1838 :
Les travaux entrepris conduisirent à arrêter les modèles de 2 armes appelées l’une petite carabine ou carabine de tirailleurs modèle 1837 dite à la Pontcharra, l’autre grosse carabine ou fusil de rempart modèle 1838. Ces armes une fois mises en service donnèrent lieu à des observations dont on profita pour les modifier dans plusieurs de leurs parties. On assista ainsi d’une part à la création de la carabine dite de munition modèle 1840, puis de la carabine modèle 1842, et d’autre part à celle des fusils de rempart modèle 1840 et 1842. Ils furent du reste les seuls modèles d’armes auxquels on continua d’appliquer les principes de chargement et de forcement de Delvigne.
Il me semble indispensable d’analyser les considérations diverses qui guidèrent les commissions de 1833 dans l’établissement de ces armes rayées et la fixation de leurs éléments les plus caractéristiques parce qu’il me sera ainsi fourni l’occasion de discuter plus d’un principe général se rapportant aux modifications qui imposent pour le tracé des rayures des changements dans le mode de forcement des balles.
Calibre du canon et de la balle / Vent :
La nécessité de conserver aux balles sphériques employées à cette époque soit dans les armes lisses existantes (16,3 mm), soit dans les armes rayées qu’il s’agissait de créer un diamètre uniforme pour la facilité des approvisionnements, et d’autre part l’obligation de réserver un vent suffisant pour la commodité du chargement et du forcement, fixaient à peu près le calibre de l’arme qui était destinée au service de campagne. On adopta 17 mm pour la petite carabine de tirailleurs.
Pour la grosse carabine, dont l’emploi était limité à des circonstances spéciales, on ne craignit pas d’en forcer le calibre et de la porter à 20,5 mm.
Le système de forcement Delvigne permettait-il d’admettre de grandes différences dans le diamètre des balles ? les expériences précédemment citées qui avaient établi que l’axe de rotation raccourci était plus favorable à la justesse du tir que l’axe de rotation allongé pouvaient autoriser à l’espérer, mais il n’en devait être ainsi qu’à la condition que la justesse augmentât en raison de l’aplatissement de la balle. Or des tirs exécutés, avec le mode de chargement Delvigne, pour préciser ce point si important dans le problème à résoudre, donnèrent constamment de mauvais résultats, soit que l’on diminuât les projectiles pour les tirer dans le même canon, soit que l’on augmentât le calibre du canon pour le tirer avec la même balle. Ceci indiquait que ce système ne convenait pas, s’il y avait une grande différence entre le diamètre de la balle et le calibre du canon. On remarqua en effet, dans ce cas, en déculassant le canon après avoir forcée la balle, que le centre de figure du projectile ne se trouvait plus sur l’axe du canon, que la balle était plus forcée d’un côté que de l’autre, malgré le sabot interposé entre la chambre et la balle, circonstance très défavorable à la justesse du tir et qui a lieu d’une manière encore plus prononcée lorsqu’on n’emploie pas le sabot. D’ailleurs il faut reconnaître que la dépression de la balle forcée par le procédé Delvigne devait lui faire perdre aux grandes distances et à cause de la résistance de l’air, l’avantage qu’elle pouvait avoir au départ sur la balle sphérique.
En conséquence si d’une part il était acquis que la balle se forçait d’autant moins bien qu’elle différait plus du calibre du canon, il y avait donc à fixer par l’expérience directe la rotation exacte qui devait exister entre le diamète de la balle et celui de l’âme, non seulement sous le rapport de l’influence de ces 2 causes relatives à la justesse du tir, mais encore sous le rapport de la facilité du chargement et de la prolongation du tir. Un vent de 5/10 à 8/10 de mm parut concilier tous les avantages.
On adopta donc pour la petite carabine une balle de 16,3 mm et pour la grosse carabine une balle de 20 mm, ce qui donnait dans le 1er cas un vent de 7/10 mm et dans le second de 5/10 mm.
Quant aux poids qui en résultaient pour les balles, ils étaient égaux à 25,6 gr pour l’une et à 45,6 gr pour l’autre.
Poids des charges :
Pour la détermination des charges, on s’appuya sur les considérations suivantes :
1/ la quantité de poudre devait être telle qu’elle pût s’enflammer complètement avant que le projectile quittât le canon, afin qu’elle produisit tout son effet.
2/ la charge devait assurer les effets de justesse, de portée et de pénétration qu’on voulait obtenir.
3/ le recul devait pouvoir être supporté.
Or dans les armes rayées en général, le projectile forcé de suivre les rayures, éprouve dans l’âme des frottements qui diminuent sa vitesse de translation. En outre, le mouvement de rotation que les rayures impriment au projectile dépend à la fois de la vitesse de translation et de l’inclinaison des rayures. Il varie en raison directe de la 1ère, et en raison inverse de la 2ème. Il s’en suit que le poids des charges ne peut pas dépasser certaines limites, car si la charge est trop forte, la portion de la balle engagée dans les rayures peut s’en échapper ou se déchirer pendant son trajet dans le canon. Si au contraire elle est trop faible, le mouvement de translation et par suite celui de rotation devenant trop lent, la portée et la justesse se trouvent diminuées. D’autre part comparées avec les fusils lisses, les armes rayées devaient admettre des charges réduites, par cette raison que le forcement et la suppression du vent qui en résultait permettaient aux gaz d’acquérir dans le même espace de temps une plus grande tension.
Dans les armes du système Delvigne en particulier, on ne pouvait employer que des charges très faibles, par suite de la forme même de la balle avec les projectiles sphériques aplatis, la quantité de plomb qui s’imprime dans les rayures est peu considérable, et ne présente que peu de résistance à l’arrachement.
Aussi pour la petite carabine on adopta la charge de 4 gr et pour la grosse carabine 6 gr.
Ces 2 carabines servirent à l’armement d’un bataillon de tirailleurs qui fut créé à Vincennes à la fin de 1838 et envoyé en Afrique en 1839. La petite carabine avait une grande justesse et un tir efficace jusqu’à 300 mètres, mais cette portée fut reconnue insuffisante, et on voulut l’étendre jusqu’à 600 mètres. Pour cela on augmenta considérablement la charge, en l’élevant à 7 gr, les calibres de l’arme et de la balle restèrent les mêmes. On eut ainsi la carabine dite de munition modèle 1840 à laquelle on adopta une hausse mobile jugée nécessaire par l’accroissement des distances de tir.
Cette carabine 1840 fut donnée aux bataillons de chasseurs d’Orléans, créés cette même année. On constat bientôt que le recul était intolérable. Ce qui amena à diminuer la charge, qui devint 6,25 gr. Afin de conserver au tir son efficacité, on augmenta le calibre de l’arme de 0,5 mm et en même temps le diamètre de la balle de 0,7 mm. En définitive le poids de la balle devint de 29 gr, c’est-à-dire plus fort de 3,4 gr. En même temps le vent était réduit de 0,2 mm, double condition favorable pour maintenir les effets balistiques équivalents à ce qu’ils étaient auparavant, malgré la diminution de la charge. On eut ainsi la carabine modèle 1842.
Quant aux fusils de rempart ou grosse carabines, les variations de leurs éléments furent moins importantes. Ainsi en 1840 on créa le fusil de rempart allégé pour lequel on porta la charge à 6gr25. En 1842, on créa un nouveau modèle qui ne différait du précédent que par un allègement encore plus grand. Quant aux calibres de ces 3 fusils de rempart et aux diamètres des balles employées, ils restèrent toujours fixées à 20,5 et 20 mm.
Dimensions de la chambre et du sabot :
On put dès lors arrêter les dimensions de la chambre et du sabot en ayant égard à des considérations d’encrassement, de facilité d’inflammation et de forcement. Plus la chambre est étroite, plus elle offre de facilité pour forcer la balle sur le sabot, mais aussi plus elle s’encrasse promptement, et il arriverait qu’au bout d’un petit nombre de coups, elle ne pourrait plus contenir toute la charge de poudre qui se trouverait en partie écrasée par le sabot. Dans une chambre très allongée, l’inflammation de la poudre étant moins rapide que dans une chambre courte, il eut été à craindre qu’une partie de la poudre fût projetée hors du canon.
D’ailleurs il ne suffit pas que le sabot trouve sur la chambre un appui convenable pour faciliter le forcement, il faut encore que son diamètre soit assez grand pour que son axe soit maintenu sur l’axe de l’âme par le calepin, et que celui-ci soit suffisamment pressé contre la paroi du canon pour empêcher ou atténuer les dégagements de gaz. D’autre part, il ne faut pas que ce diamètre soit assez fort pour faire éprouver des difficultés de chargement.
Pour ces diverses raisons, on admit les dimensions suivantes :
PETITE carabine : calibre de l’âme 17 mm – diamètre de la chambre 12 mm – Diamètre du sabot : 15,5 mm
GROSSE carabine : 20,5 mm – 14,7 mm – 18,8 mm.
Quant à la longueur de la chambre, elle se déduisait de la fixation du diamètre et du poids de la charge.
Lorsqu’on créa plus tard la carabine de munition modèle 1840 puis la carabine modèle 1842, la longueur seule de la chambre fut modifiée, en conséquence des variations qu’on fit subir à la charge et le diamètre de cette chambre resta le même, puisqu’il n’y avait rien de changé dans les conditions qui avaient servi à le déterminer en 1837. Ainsi les nouvelles longueurs de la chambre durent :
Pour la carabine de munition modèle 1840 (charge 7gr) 62 mm
Pour la carabine modèle 1842 (charge 6 gr) 52 mm
(voir croquis img 8327).
Quant aux fusils de rempart modèle 1840 et 1842, qui succédèrent au modèle 1838, la charge n’ayant été augmentée que d’une quantité insignifiante, 0,25 gr, on ne toucha en rien aux dimensions de la chambre dont la longueur resta égale à 44 mm.
Conservateur- Futur pilier
- Nombre de messages : 773
Age : 50
Date d'inscription : 05/01/2015
Re: Vieux truc de la manuf de Maubeuge
suite extrait rapport/mémoire capitaine Rayne (système Brunéel, description munition) :
Une commission permanente, dite des armes portatives, fut créée à Vincennes, et ses premiers travaux furent consacrés à l’examen de propositions véritablement sérieuses, qui venaient d’être présentées, en 1827, par un arquebusier de Lyon, Brunéel.
On rencontre dans ces propositions un document précieux, à savoir le premier exemple, en France, d’une cartouche portant avec elle son amorce : à la vérité cette réunion cessait au moment du tir. Si cette particularité d’ailleurs ne se bornait pas l’importance des améliorations que contenaient en germe les principes émis par Brunéel. Le nom de cet armurier s’attache également aux premiers progrès des armes carabinées.
Quoiqu’il en soit les soins que la commission de Vincennes apporta dans l’examen du système proposé, peuvent donner la mesure de l’intérêt qu’il offrait : les expériences, que son étude provoqua, conduisirent aux résultats les plus considérables, l’adoption définitive du système à percussion et la création d’un nouveau modèle de fusil, qui fut dénommé fusil modèle 1840.
Eu égard à ces diverses considérations, il convient d’entrer dans quelques détails touchant le mode de construction de cette arme Brunéel.
Ce qui appela tout d’abord l’attention sur ce système, c’est que le mode d’amorcer paraissait être pour les soldats le plus pratique entre cent autres proposés jusque là. La culasse à bouton plein était remplacée par une culasse à chambre tronconique, dans laquelle s’introduisait la charge, et communiquant par un canal percé dans le fond avec une cheminée vissée à l’extérieur. Cette culasse à chambre, qui devait être en fer cémenté et trempé, afin d’acquérir une grande dûreté, avait pour but de donner à la cheminée un point d’appui plus résistant. Brunéel n’ayant pas cru possible, au point de vue de la solidité, de tarauder l’écrou de la cheminée dans le fer même du canaon. La cartouche contenait, sous la balle, une rondelle qui fut faite successivement en liège, en carton, en bois. Cette rondelle était percée au centre d’un trou rond pour y loger l’amorce renfermée dans une capsule cylindrique en cuivre. Le papier de la cartouche était replié et collé sur cette rondelle : en outre pour empêcher la capsule de se perdre, on collait également sur son logement un petit cercle de papier fin. D’autre part, un conducteur cylindrique d’un diamètre convenable entourait la cheminée : il était destiné à faciliter le placement de la capsule, les introduisant le sabot de la cartouche dans ce conducteur, et en la poussant contre la cheminée, la capsule se plaçait d’elle-même et restait fixée par le frottement contre des stries ménagées à la surface extérieure de la cheminée : le soldat devait simplement avoir l’attention de tourner un peu la cartouche entre ses doigts en le retirant du conducteur. Le fusil une fois amorcé de cette manière, on achevait de charger comme à l’ordinaire.
Le système fut l’objet d’un rapport des plus favorables au ministre de la guerre. La Commission appréciait comme très avantageuse sa simplicité, son exécution facile de nuit comme de jour, et l’adoption en eût été arrêtée, lorsque les évènements de 1830 vinrent jeter de la perturbation et occasionner des retards dans la marche des épreuves définitives.
Les essais furent continués néanmoins sur une petite échelle et ne reprirent qu’en 1835 des proportions plus grandes, lorsque, sur la proposition du Comité de l’artillerie, en affecta ces armes à quelques corps d’Afrique, afin qu’on pût juger des avantages et des inconvénients qu’elles présenteraient en campagne. Le fusil primitif avait déjà subi plusieurs modifications qu’avaient enseignées les expériences déjà faites, et vers le commencement de 1838 le ministre de la Guerre ordonna de transformer 10 000 fusils à silex d’après le système Brunéel corrigé, et de les répartir entre un certain nombre de régiments en France. Ces nouvelles armes eurent toujours sur le fusil à silex une supériorité marquée comme production et communication du feu et justesse de tir : la complication de la cartouche-amorçoir et du conducteur cylindrique qu’elle nécessitait formait le principal obstacle à leur adoption.
Aussi la commission dut examiner d’autres modes d’amorcer. On avait soumis à son appréciation bien des mécanismes, pour le placement des capsules, désignés sous le nom d’amorçoirs. Je ne citerai que le suivant, dû à l’armurier Charoy : il consistait en un tube dans lequel glissaient les capsules sous la pression d’un ressort à boudin. Ce tube était placé à la partie antérieure de la platine sur un pivot autour duquel il pouvait décrire un certain arc abandonné à lui même, il était relevé par le jeu d’un ressort ; lorsqu’on l’abaissait par une pression directe de la main, une ouverture ménagée à son extrémité venait couvrir la cheminée.
La capsule qui remplissait juste l’ouverture se plaçait naturellement sur le cône où le frottement suffisait pour la maintenir.
Quelque ingénieux qu’il fut, ce système d’amorçoir, aussi bien que les autres, furent reconnus trop délicats et leur délicatesse les fit rejeter d’une manière absolue pour le service d’une arme de guerre.
Si l’on considère le jeu de cet amorçoir Charoy, n’est-on pas frappé par la similitude qu’il présente avec le système mis en pratique de nos jours sur certaines armes américaines, dites à répétition. D’une part on amenait sur la cheminée par l’action d’un ressort à boudin successivement plusieurs amorces, disposées à l’avance dans un magasin spécial : un simple mouvement de bascule du tube au magasin permettait l’amorçage : d’autre part ce sont des cartouches complètes, que par des moyens analogues on fait arriver à volonté dans la chambre du canon. Il peut paraitre étonnant que dès cette époque, alors que la cartouche Brunéel mettait précisément sur la voie des cartouches amorcées, on se soit approché de si près de cette solution exigée pour obtenir un tir rapide, sans que le principe du tir à répétition, dans une arme se chargeant par la culasse, n’ait frappé d’avantage les esprits alors si appliqués à la question de la transformation des armes. La réalisation de cet immense progrès est demeurée ajournée jusqu’au moment où des évènements d’une gravité extrême, l’abaissement d’une grande nation et l’agrandissement d’une plus petite, sont venus modifier d’une manière profonde autant qu’imprévue les conditions d’équilibre politique en Europe.
Après des tâtonnements prolongés qui occupèrent la Commission des armes portatives de 1827 à 1840, on s’arrêta finalement au placement de la capsule à la main. Sur les instances du comité d’artillerie, on s’attacha en dernier lieu à faciliter l’emploi de la capsule et l’on arriva à la grosse capsule à rebords, telle qu’elle a existé jusqu’en 1866, laquelle pouvait être maniée en toute sécurité et facilement de nuit comme de jour, dans toutes les circonstances atmosphériques, par les fusils les plus rigoureux. Il n’y eut plus dans la suite que des améliorations de détails relatives au transport, par exemple l’emploi du sachet de 8 capsules disposé à l’un des bouts du paquet de 6 cartouches.
J’ai indiqué que les nombreuses expériences auxquelles avait donné lieu l’arme Brunéel avait conduit la Commission à lui faire subir des modifications. Celles-ci portèrent sur les particularités suivantes :
La culasse à chambre de forme tronconique fut remplacée par une culasse à chambre de forme cylindrique, du même diamètre que l’âme.
Le canal de lumière, dans l’origine, était sinueux, évasé à son orifice intérieur, et débouchait au fond de la chambre : on le fit plus direct, plus court, en le rapprochant de l’axe du canon et à une distance telle que la ligne de mire n’était pas marquée par les capsules à rebords. On fit arriver l’orifice intérieur de la lumière à 6,9 mm en avant du fond de la chambre, à l’effet de diminuer le nombre des ratés de canon, en donnant un emplacement suffisant pour loger les crasses.
Le canal de lumière fur fraisé à son orifice supérieur afin de diminuer le plan de percussion et de facilité l’inflammation de l’amorce : mais l’épaisseur du cuivre des capsules ayant été augmentée parce que les éclats du cuivre plus mince paraissaient dangereux, on observa que la fraisure de la cheminée était insuffisante, et afin de prévenir de nombreux ratés, on dut diminuer de nouveau le plan de percussion de la cheminée en faisant un chanfrein au sommet du cône : cette modification permettait d’ailleurs de mettre plus aisément les capsules à fond, lors même que la couche de vernis recouvrant le fulminate aurait légèrement diminué le diamètre intérieure de la capsule, en formant un petit bourrelet contre ses parois.
L’acier fondu non trempé fut substitué dans la fabrication des cheminées à l’acier ordinaire trempé, afin d’empêcher la rupture du cône sous le choc du chien. Le cône fut conservé lisse, au lieu d’être strié. Toutefois, conserver au sommet de la cheminée une résistance suffisante, on prit le soin de tremper la partie supérieure du cône sur une hauteur de 2 mm, et toute la cheminée était ensuite recuite au bleu.
On eut l’idée de fendre les capsules afin d’éviter les éclats et les adhérences et de recouvrir le fulminate d’une couche de vernis, afin de le préserver de l’humidité.
Enfin, la confection de la cartouche fut simplifiée par la suppression du sabot que portait la cartouche Brunéel, et réduite à l’enroulement d’une enveloppe unique en papier contenant la charge et la balle.
On se trouva donc ainsi bien près des conditions mêmes que l’on trouve sur le fusil modèle 1857 et la carabine modèle 1846 sans tige.
En définitive, il ne restait plus du fusil Brunéel primitif que le remplacement de la culasse pleine par la culasse à chambre en fer cémenté et trempé. Ce fut cette idée qui servit de point de départ pour l’application du système percutant soit aux modèles antérieurs soit au modèle neuf qui fut crée à ce moment sous la dénomination de fusil modèle 1840, et dans l’établissement duquel on introduisit tous les perfectionnements les plus récents, tels que l’emploi d’une hausse fixe placée sur la culasse, portant le but en blanc à 150 mètres et donnant plus de facilité pour ajuster, l’emploi d’un guidon brasé sur le canon au lieu d’être fixé sur l’embouchoir, l’emploi de la platine à chainette.
Une commission permanente, dite des armes portatives, fut créée à Vincennes, et ses premiers travaux furent consacrés à l’examen de propositions véritablement sérieuses, qui venaient d’être présentées, en 1827, par un arquebusier de Lyon, Brunéel.
On rencontre dans ces propositions un document précieux, à savoir le premier exemple, en France, d’une cartouche portant avec elle son amorce : à la vérité cette réunion cessait au moment du tir. Si cette particularité d’ailleurs ne se bornait pas l’importance des améliorations que contenaient en germe les principes émis par Brunéel. Le nom de cet armurier s’attache également aux premiers progrès des armes carabinées.
Quoiqu’il en soit les soins que la commission de Vincennes apporta dans l’examen du système proposé, peuvent donner la mesure de l’intérêt qu’il offrait : les expériences, que son étude provoqua, conduisirent aux résultats les plus considérables, l’adoption définitive du système à percussion et la création d’un nouveau modèle de fusil, qui fut dénommé fusil modèle 1840.
Eu égard à ces diverses considérations, il convient d’entrer dans quelques détails touchant le mode de construction de cette arme Brunéel.
Ce qui appela tout d’abord l’attention sur ce système, c’est que le mode d’amorcer paraissait être pour les soldats le plus pratique entre cent autres proposés jusque là. La culasse à bouton plein était remplacée par une culasse à chambre tronconique, dans laquelle s’introduisait la charge, et communiquant par un canal percé dans le fond avec une cheminée vissée à l’extérieur. Cette culasse à chambre, qui devait être en fer cémenté et trempé, afin d’acquérir une grande dûreté, avait pour but de donner à la cheminée un point d’appui plus résistant. Brunéel n’ayant pas cru possible, au point de vue de la solidité, de tarauder l’écrou de la cheminée dans le fer même du canaon. La cartouche contenait, sous la balle, une rondelle qui fut faite successivement en liège, en carton, en bois. Cette rondelle était percée au centre d’un trou rond pour y loger l’amorce renfermée dans une capsule cylindrique en cuivre. Le papier de la cartouche était replié et collé sur cette rondelle : en outre pour empêcher la capsule de se perdre, on collait également sur son logement un petit cercle de papier fin. D’autre part, un conducteur cylindrique d’un diamètre convenable entourait la cheminée : il était destiné à faciliter le placement de la capsule, les introduisant le sabot de la cartouche dans ce conducteur, et en la poussant contre la cheminée, la capsule se plaçait d’elle-même et restait fixée par le frottement contre des stries ménagées à la surface extérieure de la cheminée : le soldat devait simplement avoir l’attention de tourner un peu la cartouche entre ses doigts en le retirant du conducteur. Le fusil une fois amorcé de cette manière, on achevait de charger comme à l’ordinaire.
Le système fut l’objet d’un rapport des plus favorables au ministre de la guerre. La Commission appréciait comme très avantageuse sa simplicité, son exécution facile de nuit comme de jour, et l’adoption en eût été arrêtée, lorsque les évènements de 1830 vinrent jeter de la perturbation et occasionner des retards dans la marche des épreuves définitives.
Les essais furent continués néanmoins sur une petite échelle et ne reprirent qu’en 1835 des proportions plus grandes, lorsque, sur la proposition du Comité de l’artillerie, en affecta ces armes à quelques corps d’Afrique, afin qu’on pût juger des avantages et des inconvénients qu’elles présenteraient en campagne. Le fusil primitif avait déjà subi plusieurs modifications qu’avaient enseignées les expériences déjà faites, et vers le commencement de 1838 le ministre de la Guerre ordonna de transformer 10 000 fusils à silex d’après le système Brunéel corrigé, et de les répartir entre un certain nombre de régiments en France. Ces nouvelles armes eurent toujours sur le fusil à silex une supériorité marquée comme production et communication du feu et justesse de tir : la complication de la cartouche-amorçoir et du conducteur cylindrique qu’elle nécessitait formait le principal obstacle à leur adoption.
Aussi la commission dut examiner d’autres modes d’amorcer. On avait soumis à son appréciation bien des mécanismes, pour le placement des capsules, désignés sous le nom d’amorçoirs. Je ne citerai que le suivant, dû à l’armurier Charoy : il consistait en un tube dans lequel glissaient les capsules sous la pression d’un ressort à boudin. Ce tube était placé à la partie antérieure de la platine sur un pivot autour duquel il pouvait décrire un certain arc abandonné à lui même, il était relevé par le jeu d’un ressort ; lorsqu’on l’abaissait par une pression directe de la main, une ouverture ménagée à son extrémité venait couvrir la cheminée.
La capsule qui remplissait juste l’ouverture se plaçait naturellement sur le cône où le frottement suffisait pour la maintenir.
Quelque ingénieux qu’il fut, ce système d’amorçoir, aussi bien que les autres, furent reconnus trop délicats et leur délicatesse les fit rejeter d’une manière absolue pour le service d’une arme de guerre.
Si l’on considère le jeu de cet amorçoir Charoy, n’est-on pas frappé par la similitude qu’il présente avec le système mis en pratique de nos jours sur certaines armes américaines, dites à répétition. D’une part on amenait sur la cheminée par l’action d’un ressort à boudin successivement plusieurs amorces, disposées à l’avance dans un magasin spécial : un simple mouvement de bascule du tube au magasin permettait l’amorçage : d’autre part ce sont des cartouches complètes, que par des moyens analogues on fait arriver à volonté dans la chambre du canon. Il peut paraitre étonnant que dès cette époque, alors que la cartouche Brunéel mettait précisément sur la voie des cartouches amorcées, on se soit approché de si près de cette solution exigée pour obtenir un tir rapide, sans que le principe du tir à répétition, dans une arme se chargeant par la culasse, n’ait frappé d’avantage les esprits alors si appliqués à la question de la transformation des armes. La réalisation de cet immense progrès est demeurée ajournée jusqu’au moment où des évènements d’une gravité extrême, l’abaissement d’une grande nation et l’agrandissement d’une plus petite, sont venus modifier d’une manière profonde autant qu’imprévue les conditions d’équilibre politique en Europe.
Après des tâtonnements prolongés qui occupèrent la Commission des armes portatives de 1827 à 1840, on s’arrêta finalement au placement de la capsule à la main. Sur les instances du comité d’artillerie, on s’attacha en dernier lieu à faciliter l’emploi de la capsule et l’on arriva à la grosse capsule à rebords, telle qu’elle a existé jusqu’en 1866, laquelle pouvait être maniée en toute sécurité et facilement de nuit comme de jour, dans toutes les circonstances atmosphériques, par les fusils les plus rigoureux. Il n’y eut plus dans la suite que des améliorations de détails relatives au transport, par exemple l’emploi du sachet de 8 capsules disposé à l’un des bouts du paquet de 6 cartouches.
J’ai indiqué que les nombreuses expériences auxquelles avait donné lieu l’arme Brunéel avait conduit la Commission à lui faire subir des modifications. Celles-ci portèrent sur les particularités suivantes :
La culasse à chambre de forme tronconique fut remplacée par une culasse à chambre de forme cylindrique, du même diamètre que l’âme.
Le canal de lumière, dans l’origine, était sinueux, évasé à son orifice intérieur, et débouchait au fond de la chambre : on le fit plus direct, plus court, en le rapprochant de l’axe du canon et à une distance telle que la ligne de mire n’était pas marquée par les capsules à rebords. On fit arriver l’orifice intérieur de la lumière à 6,9 mm en avant du fond de la chambre, à l’effet de diminuer le nombre des ratés de canon, en donnant un emplacement suffisant pour loger les crasses.
Le canal de lumière fur fraisé à son orifice supérieur afin de diminuer le plan de percussion et de facilité l’inflammation de l’amorce : mais l’épaisseur du cuivre des capsules ayant été augmentée parce que les éclats du cuivre plus mince paraissaient dangereux, on observa que la fraisure de la cheminée était insuffisante, et afin de prévenir de nombreux ratés, on dut diminuer de nouveau le plan de percussion de la cheminée en faisant un chanfrein au sommet du cône : cette modification permettait d’ailleurs de mettre plus aisément les capsules à fond, lors même que la couche de vernis recouvrant le fulminate aurait légèrement diminué le diamètre intérieure de la capsule, en formant un petit bourrelet contre ses parois.
L’acier fondu non trempé fut substitué dans la fabrication des cheminées à l’acier ordinaire trempé, afin d’empêcher la rupture du cône sous le choc du chien. Le cône fut conservé lisse, au lieu d’être strié. Toutefois, conserver au sommet de la cheminée une résistance suffisante, on prit le soin de tremper la partie supérieure du cône sur une hauteur de 2 mm, et toute la cheminée était ensuite recuite au bleu.
On eut l’idée de fendre les capsules afin d’éviter les éclats et les adhérences et de recouvrir le fulminate d’une couche de vernis, afin de le préserver de l’humidité.
Enfin, la confection de la cartouche fut simplifiée par la suppression du sabot que portait la cartouche Brunéel, et réduite à l’enroulement d’une enveloppe unique en papier contenant la charge et la balle.
On se trouva donc ainsi bien près des conditions mêmes que l’on trouve sur le fusil modèle 1857 et la carabine modèle 1846 sans tige.
En définitive, il ne restait plus du fusil Brunéel primitif que le remplacement de la culasse pleine par la culasse à chambre en fer cémenté et trempé. Ce fut cette idée qui servit de point de départ pour l’application du système percutant soit aux modèles antérieurs soit au modèle neuf qui fut crée à ce moment sous la dénomination de fusil modèle 1840, et dans l’établissement duquel on introduisit tous les perfectionnements les plus récents, tels que l’emploi d’une hausse fixe placée sur la culasse, portant le but en blanc à 150 mètres et donnant plus de facilité pour ajuster, l’emploi d’un guidon brasé sur le canon au lieu d’être fixé sur l’embouchoir, l’emploi de la platine à chainette.
Conservateur- Futur pilier
- Nombre de messages : 773
Age : 50
Date d'inscription : 05/01/2015
Un peu de tir!
Voici mes premiers essais.
La cartouche Brunéel est l'horreur à utiliser par contre la cartouche 1840 convient tout à fait. Je suis certain que sur appui le groupe serait bien plus petit. Par contre je ne vois que des problèmes de transport et conservation avec son calpin graissé externe.
La cartouche Brunéel est l'horreur à utiliser par contre la cartouche 1840 convient tout à fait. Je suis certain que sur appui le groupe serait bien plus petit. Par contre je ne vois que des problèmes de transport et conservation avec son calpin graissé externe.
TIR et COLLECTION Armes Règlementaires :: Armes règlementaires à poudre noire :: Armes à poudre noire à percussion
Page 1 sur 1
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum